JIMMY TRAPON, Le triomphe de la peur

jimmy trapon le triomphe de la peur

Mot de la fin.

Comme il est de coutume, nous avons demandé à Jimmy Trapon de rédiger un petit mot de la fin pour conclure ce mois passé en sa compagnie. Nous vous le dévoilons sans tarder. Il se baptise Le triomphe de la peur, et, avouons-le, avec style et panache, il retranscrit à merveille l’état actuel des choses, dans ce pays dont le Siècle des Lumières n’est plus qu’un lointain souvenir. Nous remercions Jimmy Trapon de s’être prêté au jeu de l’auteur du mois, pour son implication sans failles. Nous lui donnons rendez-vous très bientôt, sans nul doute, puisque, comme il l’évoquait dans son interview que nous vous invitons à relire, il indique qu’il a signé chez MVO éditions pour son prochain livre (qu’il nous tarder de découvrir, quand l’heure viendra). En attendant, découvrez sans attendre, son mot de la fin.

Le triomphe de la peur

L’ombre du nombre. Chaque soir. Qui se suspend sur les écrans. Qui déroule en ruban. Et le ballet des évangiles sous leurs blouses invisibles. Les prêches d’apocalypse déversées sans pudeur. Tremblez, pauvres pécheurs, vous êtes la cause de ce malheur. Obéir ou mourir. Assujetti ou assassin. La vérité d’un jour n’est plus celle de demain. Quelle importance. Nul ne peut contester l’existence de la mort. Alors. Alors. Alors. Vous avez tort, notre parole est d’or. Prêtez dès à présent le serment d’Hypocrite. Haut et très fort. La main posée à l’opposé d’un cœur qui doit être occulté. Couvrez-moi ce sourire que je ne saurais voir. Sans de pareils objets, des âmes sont dévorées. Et cela fait de vous des coupables mauvais. Que sonnent les trompettes du triomphe de la peur. Et quand les poules auront des dents. Qu’adviendra-t-il de la terreur. Mieux vaut être prudent. Museler les poussins comme des dangereux chiens. Semer dans leur caboche qu’ils sont des assassins. Des menaces incessantes pour les vieux coqs en pâte. Ceux-là même dont le chant ne marque plus le temps. Qu’à l’aube du néant dans un refrain sans fin. Sacrifier l’avenir pour sauver le passé. Penser prolongation plutôt qu’introduction. Quant aux principes fondamentaux du radeau hexagone. S’assoir dessus comme on poserait son cul sur le siège d’un métro. Vous n’irez plus au bois, les chênes sont coupés. L’apôtre que voilà ira les ramasser. Entrez dans le rang. Voilez comme on vous ment. Assis. Couchés. Debout. Restez cloitrés à la maison et embrassez la soumission. Tendez la patte et relevez la manche autant de fois que sonnera la sanction du clairon. Chantage pour le précieux sésame. Pour quelques bouts de mousse. D’écorce. Au souvenir des troncs.

Tout en haut de l’échelle, le sourire machiavel. Le beurrier devenu majesté. L’adolescent tyran. Emmerder. Diviser. Régner. Devise autocratique de l’enfant narcissique. Pointer du doigt les criminels qui respectent la loi. Les scélérats qui osent douter du roi. Passer la corde autour du cou des parias qu’on nomme fous. Qui affrontent l’échafaud tout en restant debout. Honte aux infâmes qui refusent la terreur, la panique et l’horreur. Qu’on prive ces renégats de boisson. De chanson. De soins. Et même des flèches de Cupidon. Qu’ils cèdent ou non, l’important n’est pas là. La foule suivra en masse et marchera au pas. Les asservis. Volontaires et primaires. En tête de procession pour toujours plus de privation. Et puis, les timorés. Les indécis. Les résignés. Tous agrippés au même panier. Le canon sur la tempe. Inquiets de l’étiquette qu’on pourrait leur coller. Ou affolés de couler seul et du mauvais côté. Comment leur en vouloir. Le monde d’avant tant espéré à l’horizon de ce miroir espion. Et puis, celui d’après qui se dessine vraiment à l’abri des regards indiscrets. Car le despote le sait. Il ne demeure de plus belle cécité que celle de la foule apeurée. Des marcheurs silencieux qui se refusent parfois d’entendre et quelquefois comprendre. Et qui préfèrent attendre. Attendre. Attendre de savoir de quel côté la pièce va retomber.

Jimmy Trapon

Plus d’infos.

Lire un extrait de Des nouvelles du nord de Paname et la chronique du livre
Chronique de la novella 22/10, 22:10
Relire le portrait de l’auteur du mois. Découvrir la première partie de son interview, la deuxième et la troisième.
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