JIMMY TRAPON et Dagara (interview 3é partie)

jimmy trapon et dagara

Fin d’interview.

Suite et fin de l’interview consacrée à Jimmy Trapon et Dagara. On y parle encore de sa plume littéraire, mais également de celle du parolier du groupe metal Dagara. Une manière de clore cette interview (avant de parler de la musique du groupe dans une chronique à venir). Retrouvez la partie 1 et la partie 2 de l’interview ICI et LA.

Interview fin !

Litzic : On retrouve le côté rock n’roll de Bukowski, la poésie de Vian, un peu d’horrifique, un peu de surréalisme. Dans ta musique, on retrouve un côté photo d’une société. Tu brasses assez large avec tes deux moyens d’expression. Mais si tu devais t’exprimer autrement, quel art aurait ta bénédiction ?

Jimmy Trapon : Difficile à dire, j’ai déjà beaucoup de chance d’avoir ces deux moyens d’expression. Il y a tellement de choses que j’aimerais savoir faire. Le dessin, je trouve ça fascinant, beaucoup d’émotions peuvent se transmettre par ce biais. Après, il y a aussi le théâtre qui est quelque chose que j’aurais bien aimé connaître. Une sorte de fusion entre la littérature et la scène, le rapport au public qu’on retrouve en concert.

L : Bosses-tu actuellement sur un autre projet d’écriture ? Quelles sont tes actus pour les jours, semaines, mois à venir ?

Jimmy Trapon : J’ai signé en novembre dernier un contrat d’édition avec la maison MVO. Il s’agit d’un roman où nous retrouvons toujours le narrateur des nouvelles du Nord de Paname mais quelques années plus tard. Je n’en parle pas trop pour le moment, mais c’est un récit où nous en apprenons davantage sur ce personnage, sur son itinéraire, sur sa vie.

D’ici mars/avril, le travail de correction/relecture avec l’éditeur va se lancer. Et la sortie est prévue pour l’été prochain si tout va bien. Après, difficile de beaucoup se projeter dans les semaines et les mois à venir… Dans cette période d’incertitude. Beaucoup d’évènements sont annulés. Quelques salons du livre sont prévus… Mais s’ils sont maintenus, reste à savoir dans quelles conditions le seront-ils.

L : Si tu ne devais en citer qu’un dans chaque catégorie :

Jimmy Trapon :

Un livre : Spontanément, je dirais 1984 qui me semble faire écho à beaucoup de choses aujourd’hui.

Un disque : Il est 23h48, le 17 janvier, je suis avec un petit verre de muscat bien installé dans mon canapé et là tout de suite, j’ai très envie de m’écouter le VIXI Tour XVII, un album live d’Hubert-Félix Thiéfaine.

Un film : Orange mécanique, j’ai l’affiche en face de moi, accrochée dans un cadre. Un sacré film !

Une œuvre d’art ou un artiste : Définitivement Boris Vian, écrivain, chanteur, musicien, inventeur et j’en passe ! Un artiste avant-gardiste et singulier. Un génie.

1984, HFT, Orange mécanique, Boris Vian

L : On a évoqué de loin ton groupe, Dagara. Peux-tu nous en dire plus : qui le compose, quelle est votre discographie, vos projets ?

Jimmy Trapon : Dagara c’est un groupe que j’ai monté sans rien y connaitre en 2007. Depuis la création du groupe, nous avons sortis deux EP intitulés « Dagara » et « La règle du Je », ainsi que deux albums : « La route du chaos » et « Réminiscence ».

Pendant près de dix ans, nous étions six membres. Un batteur, un bassiste, deux guitaristes, et deux chanteurs dont un jouait également des percussions. Depuis plus d’un an, le line-up a changé, une certaine lassitude s’était installée pour certains, les confinements successifs n’ayant rien arrangé, il y a eu un besoin de renouveau important.

Nous sommes désormais un quatuor. Batterie, guitare, bassiste-chanteur, et donc moi en voix principale.
Actuellement, nous sommes en phase d’enregistrement de nos nouveaux morceaux. Dans le courant du mois de février, nous entrons en studio pour enregistrer deux titres. Nous n’avons pas pour le moment l’ambition de sortir un album, mais plutôt des morceaux au compte-goutte.

D’une part, nous pensons que le CD est un objet qui tend à disparaître progressivement et qu’il n’est pas forcément judiciable aujourd’hui d’investir dans la production d’un album. Tant au niveau financier qu’au niveau du temps engendré. D’autre part, la période actuelle ne nous semble pas vraiment propice non plus à un tel investissement, dans la mesure où sortir un album sans avoir l’opportunité de le défendre sur scène avec toutes les restrictions qu’on connaît, nous paraît légèrement risqué.

Au niveau des concerts, nous avons beaucoup voyagé… Nous avons eu la chance de pouvoir réaliser plusieurs tournées européenne. Aujourd’hui, nous avons environ 300 concerts à notre actif, en France et dans une dizaine de pays, l’Espagne, la Belgique, ainsi que des pays plus lointains comme la Russie, l’Ukraine, la Moldavie, la république Tchèque, la Roumanie…

Aujourd’hui, nous avons environ 300 concerts à notre actif

L : Tu y chantes, mais y joues-tu aussi d’un instrument ?

Jimmy Trapon : Uniquement chanteur ! Avant de créer Dagara, j’écrivais des chansons en grattant des accords de guitare dans ma piaule. Mais l’écriture et le chant m’ont semblé être une meilleure voie, notamment pour avoir plus de liberté scénique. En tout cas, bien plus que la guitare où mon niveau de toute façon est assez limité.

L : Tu disais que tu laisses l’émotion surgir pour coller tes paroles sur la musique. Mais t’arrive-t-il aussi d’écrire des textes en amont propice à ce qu’une musique naisse des textes ?

Jimmy Trapon : Pour Dagara, ça n’a jamais été totalement le cas. J’ai pu utiliser des bouts de textes pour les intégrer à des chansons pour le groupe, mais je n’ai jamais écrit un texte entier en amont. En revanche, il m’est arrivé, plus jeune, d’écrire des textes que j’ai ensuite mis en musique à l’aide de ma guitare. Mais rien de très sérieux.

Ce sont des textes qui sont très axés sur l’existence et le besoin de délivrance

L : De quoi parlent-ils au juste, tes textes ?

Jimmy Trapon : Mes textes de chansons reprennent des thèmes que j’aborde également dans mes livres. L’errance et la recherche de sens. La peur, la solitude et la volonté de transcendance. Ce sont des textes assez sombres, peut-être parfois un peu nihilistes dans le sens où la vision qu’ils reflètent demeure assez désenchantée. Ils évoquent de manière assez introspective toute la difficulté qu’on peut parfois ressentir à vivre aussi bien avec soi-même qu’avec les autres. Ce sont des textes qui sont très axés sur l’existence et le besoin de délivrance.

L : Je triche un peu, j’ai eu tes textes en ma possession, celles du nouvel Ep et celles de l’album Réminiscence. Tu t’y exprimes (souvent, majoritairement) en rimes. Pourquoi ?

Jimmy Trapon : Certainement pour accentuer le côté poétique des textes… Pour rendre la lecture plus fluide et l’écoute agréable.

La réflexion s’effondre

L : J’y lis de la désillusion, de la résignation, une incapacité à transfigurer la réalité en un futur qui pourrait être heureux. Es-tu fatalement pessimiste concernant l’espèce humaine ?

Jimmy Trapon : Il y a un mélange de toutes ces choses, effectivement… Je suis généralement assez pessimiste concernant l’espèce humaine et j’ai tendance à l’être davantage encore quand je constate le désastre actuel. Descartes disait qu’il existe un fossé séparant l’homme de l’animal. Que l’animal est démuni de la pensée mais également de toutes les jouissances de la matière pensante comme le langage, la volonté, la sensibilité. J’ai le sensation que la pensée disparaît. La réflexion s’effondre. Le langage s’appauvrit. Quant à la sensibilité…

On s’émerveille d’un plug anal de 24 mètres sur la Place Vendôme, d’un empaquetage de l’Arc de Triomphe façon colis Amazon. Je n’évoquerais pas la servitude volontaire des masses dans cette crise politique et sanitaire, mais je n’en pense pas moins. L’espèce humaine, selon moi, se rapproche tranquillement de l’espèce animale. D’un pas lourd et certain. Un animal domestique, raisonné par la peur, ayant pour unique volonté de se divertir et remplir sa gamelle de croquettes.

L : Qu’est-ce que la musique te permet d’exprimer que l’écriture de roman ou de nouvelle ne te permet pas (et inversement) ?

Jimmy Trapon : La musique me permet de m’exprimer physiquement. Il y a une débauche d’énergie très importante pendant une prestation scénique, et dans une moindre mesure pendant les répétitions. Une expression du corps qui n’existe pas dans la littérature. La musique est un défouloir instantané. A l’inverse, l’écriture d’une histoire va m’apporter une expression plus posée, plus réfléchie. Une expression beaucoup plus libre.

Impact immédiat/à long terme.

L : Dire, en chantant, en screamant, a-t-il plus d’impact, de qualités cathartiques ?

Jimmy Trapon : C’est une bonne question… Je pense que dire en chantant ou dire en écrivant ont tout deux des qualités cathartiques. Le chant a peut-être un impact plus immédiat. L’écriture à un impact peut-être moins immédiat mais qui dure davantage dans le temps.

L : Te verrais-tu écrire pour une musique autre que le metal ou au contraire ton propos doit-il être expulsé avec cette « violence » pour atteindre son but ?

Jimmy Trapon : Je pourrais tout à fait écrire pour une musique autre que le metal. D’ailleurs, je pense que certains de mes textes pourraient très bien s’adapter à d’autres styles de musique.

L : Ton nouvel EP et ton album, où peut-on se les procurer ?

Jimmy Trapon : Le dernier album est disponible en téléchargement sur toutes les plateformes classiques ainsi qu’en physique sur notre boutique en ligne : https://dagara.bigcartel.com/
Le prochain EP est en cours d’enregistrement, donc encore un peu de patience !

L : Des dates sont-elles bientôt prévues ?

Jimmy Trapon : Comme pour les salons du livre, beaucoup d’incertitudes à ce niveau, notamment en ce qui concerne les restrictions imposées par le gouvernement. Nous avons une date parisienne prévue le 26 février. Un festival en septembre prochain. Quelques autres dates dans les tuyaux ainsi qu’une tournée espagnole… Mais rien de signé encore. On attend de voir comment les choses évoluent.

L : Merci d’avoir pris ce temps pour répondre à nos questions.

Plus d’infos.

Lire un extrait de Des nouvelles du nord de Paname et la chronique du livre
Chronique de la novella 22/10, 22:10
Relire le portrait de l’auteur du mois. Découvrir la première partie de son interview et la deuxième.
Page fb de l’auteur et la boutique où acquérir ses livres
Page fb de Dagara et sa boutique
Et aussi le youtube du groupe

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