[ AUTEUR DU MOIS ] DAVID FONSECA, points de cohérence.
Refermer le cercle.
Avant de lire, demain, le mot de la fin de notre auteur du mois David Fonseca, nous souhaitions revenir sur deux ou trois éléments du travail de cet auteur. Il s’agit de points de cohérence qui apparaissent à la lecture de ses deux romans, Cellules et Faillir, tous deux parus dans la collection L’Orpailleur, chez Az’art atelier éditions.
Des points communs.
Comme il l’a été évoqué dans la complète interview que nous avons menée avec lui, David Fonseca a opté pour deux types d’histoires différentes, sur le fond et sur la forme. La première est une autofiction, la seconde un véritable roman. Néanmoins, nous y retrouvons quelques points de convergence qui permettent en quelque sorte de nous retrouver avec une bibliographie circulaire. Tout d’abord, il y a ce choix d’exprimer les choses à la première personne du singulier. Comme nous l’évoquions dans l’interview, cela paraît évident pour l’autofiction, moins pour Faillir où le travail d’immersion dans le personnage du patient est assez bouleversant.
En effet, l’usage du « je » pourrait nous amener à penser que David Fonseca souffre lui-même d’une forme pathologique grave nécessitant qu’il soit enfermé. Il n’en est évidemment rien (sauf peut-être qu’il est, comme nous tous du reste, potentiellement sujet à des crises existentielles, mais là n’est pas la question). En fait, David Fonseca sonde ici l’âme d’un homme en proie à ses démons. Mais est-ce si évident ? Vous vous doutez bien que non, sinon nous ne poserions pas la question. Car dans Faillir, rien n’est moins sûr que la folie. Le personnage principal n’est-il simplement pas quelqu’un qui se fuit lui-même comme pour mieux fuir un monde qui ne lui correspond pas ?
Cette idée de fuite est déjà présente dans Cellules, notamment dans cette fuite par la course à pied, cette fuite, comme une échappée belle dans le monde des livres, mais également dans cette fugue du domicile familial pour vivre chez un cousin. Mais fuir, n’est-ce pas, finalement, toujours pour mieux se retrouver ? Cet antagonisme est un point d’équilibre sur lequel l’auteur joue en permanence, comme pour mieux tester notre point de bascule personnel.
Une boucle universelle.
L’écriture de David Fonseca se referme souvent sur elle-même (ou plus exactement se nourrit de son propre terreau intime). Cela peut paraître une nouvelle fois contradictoire puisqu’elle nous ouvre des horizons dégagés, touche à des vérités profondes dont nous n’avons le plus souvent pas conscience. À regarder trop profondément en nous, c’est un coup à faire ressortir tout ce qu’on avait pris grand soin d’enterrer. Le personnage du patient, nous le retrouvons déjà dans Cellule, dans une évocation rapide néanmoins présente et puissante.
En effet, dans faillir, ce patient parle de sa famille, du père, du frère, comme pour répondre au « David » de l’autofiction. Dialogue à distance, le vertige n’en est que plus présent. Et plutôt que de parler de cercle, nous dirions plutôt que lire ces deux romans, l’un après l’autre, dans l’ordre qui nous convient (nous avons personnellement commencé par celui qui n’était pas sous protection plastique, flemmards que nous sommes, autrement dit Faillir), nous place dans une spirale, descendante, comme si David Fonseca forçait notre conscience par ses mots foreurs.
Plutôt que d’amener le lecteur à se refermer sur lui-même, cette spirale permettrait plutôt de faire remonter à la surface quelques idées importantes, apportant des réponses présentes par l’évocation d’un passé que nous avions, par la force de la frénésie permanente de nos vies, fini par oublier de scruter en détail depuis de trop longues années d’insouciance. Jamais il ne nous a paru si important de jeter un œil dans le rétroviseur pour éviter le mur (personnel, intime) qui se profile droit devant nous.
Passé le présent.
Le passé, même s’il n’existe plus que dans le jeu des souvenirs, forcément pollués par les paroles induisant certaines couleurs qui n’ont de réelles que l’importance que nous souhaitons leur donner, n’a pourtant jamais fini de nous façonner. Le fuir, c’est nous fuir. Mais trop le choyer, c’est également nous perdre. Ce passé, cette évocation de l’enfance est une force présente et vivace chez David Fonseca. Tenter de retrouver ce paradis perdu est pourtant un leurre, et l’auteur, même si, probablement, par l’écriture, cherche à le retrouver, ne parviendra jamais à restituer la magie de l’innocence.
Mais il s’en approche, l’effleure. Même si cette innocence finalement n’est pas celle que l’on croit puisque nous la retrouvons en filigrane dans la quête de l’évocation de celle-ci. Spirale encore. Serpent qui se mord la queue. Mais qui, une nouvelle fois remet en relief, en perspective nos propres idées, nos propres perceptions. Nous n’avons plus qu’à piocher ici ou là dans ce qui nous est de plus intime pour nous en nourrir.
En ce sens, la lecture des deux livres de David Fonseca, et de son troisième à paraître très prochainement, s’avère indispensable. Parce que des notions universelles ressurgissent à chaque page tourné. Où une nouvelle fois tout le travail de l’auteur déteint sur nous. Et éveille notre curiosité sur nos fonctionnements. Une nouvelle fois, l’universel est intime, ou inversement. Qu’importe puisque tout est circulaire dans le flux des idées.
Relire le portrait o-su-bjectif de David Fonseca
Relire Portraiture, texte offert par notre auteur du mois pour que vous appréhendiez sa plume de la meilleure des façons possibles.
Enfin, relire la chronique de Faillir et celle de Cellules
Redécouvrez la première partie, la deuxième, la troisième, la quatrième et la cinquième et dernière partie l’interview de David Fonseca
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