[ auteur du mois ] l’interview Des catastrophes…
Troisième partie de l’interview axée sur Des catastrophes pas très naturelles.
Découvrez la troisième partie de l’interview de notre auteur du mois Jean-Marie Fleurot. Elle est articulé autour de son recueil de nouvelles Des catastrophe pas très naturelles, et nous propose de plonger plus avant dans ce qui a permis à son élaboration. Nous y apprenons quels en ont été les axes de rédactions, et nous découvrons un peu plus la personnalité de l’auteur. C’est par ici !
L’interview « Des catastrophes… »
Litzic : Avant de décortiquer un peu plus tes écrits (notamment sur ton recueil de nouvelles Des catastrophes pas très naturelles), tu dis ne pas aimer beaucoup la routine. Question sans doute un peu bête du coup : tu dois écrire sous l’impulsion du moment du coup, non ? A moins que tu ne cherches à me tromper en ayant aménagé des heures d’écriture dans ton quotidien ?
Jean-Marie Fleurot : Non j’écris sur l’envie du moment, souvent le week-end ou pendant les vacances parce que j’ai une activité professionnelle assez prenante et qu’il m’arrive souvent de bosser à la maison.
L : D’ailleurs, en moyenne, combien de temps penses-tu (et passes tu à) écrire par semaine ?
Jean-Marie Fleurot : Je ne peux pas quantifier par semaine, c’est vraiment variable et encore une fois rien à voir avec un Hemingway qui s’asseyait tous les matins pour écrire ses 500 mots.
» Tout peut arriver et n’importe qui peut changer soudain de vie et disparaître ou devenir un autre… »
L : Revenons à Des catastrophes pas très naturelles. Première question : pourquoi ce titre ?
Jean-Marie Fleurot : Le titre s’est imposé à la fin, en passant en revue ce catalogue de catastrophes – guerres, meurtres, inondations- qui avaient en fait tous comme dénominateur commun d’être causées par la main de l’homme même et surtout quand elles étaient dites « naturelles ». Parce que sans l’homme rien n’arrive, ni le bien, ni le mal non plus d’ailleurs.
L : As tu écrit chaque nouvelle dans l’ordre qui est celui du livre ou bien as tu piocher dans des textes que tu avais en réserve ?
Jean-Marie Fleurot : Non j’ai commencé par la nouvelle « marseillaise », autour de laquelle je tournais depuis longtemps, qui a failli devenir un roman et que j’ai finalement ramassé au format nouvelle. Sarajevo, c’était juste une piste et c’est l’héroïne qui est venu lui donner de la vie. La nouvelle finale n’était pas prévue à vraie dire. Mais j’avais confié le recueil à un éditeur qui trainait et le 6 aout est arrivé. Une journée vacante de canicule et le texte est venu très vite. Par contre, ce n’est qu’au bout d’un moment que j’ai songé à l’intégrer au recueil.
L : Un thème qui m’apparaît central se dégage de ce recueil, celui de la guerre. Etait-ce prémédité ?
Jean-Marie Fleurot : C’est drôle en fait que tu dises ça. Enfin pas vraiment car je ne peux pas nier que la guerre soit centrale. Mais en fait, ce qui, pour moi, est le fil conducteur du recueil (sauf pour la dernière nouvelle) ce sont les héroïnes. Le paysage s’est construit autour d’elles et en arrière-plan même si le décor a changé c’est la même silhouette qui revient.
L : En parlant de guerre, elle prend ici plusieurs formes : celle des vraies guerres (notamment la Seconde Guerre mondiale), de la guerre des gangs, du trafic de drogue, des guerres intimes aussi. Pourquoi ce thème ?
Jean-Marie Fleurot : Les guerres sont des moments où tout est suspendu, le temps, la morale, les habitudes. Tout peut arriver et n’importe qui peut changer soudain de vie et disparaître ou devenir un autre…
L : J’aime la façon dont tu amènes les choses, par un jeu de descriptions qui s’enchainent avec du rythme. Elles sont relativement brèves, dépouillées jusqu’à l’os, ces descriptions. Elles nous mettent directement « dans la peau » des personnages. Est-ce une constante chez toi ou bien est-ce que cela se prêtait bien au thème général de ton recueil ?
Jean-Marie Fleurot : Non ce n’est pas une « méthode » spécialement pour ce recueil mais ça correspond bien à ma façon d’écrire qui est assez « cinématographique », sans forcément que je le recherche, mais ça correspond à la représentation des personnages telle qu’elle vient au fur et à mesure qu’ils prennent forme.
« Mais en fait, ce qui, pour moi, est le fil conducteur du recueil (sauf pour la dernière nouvelle) ce sont les héroïnes. «
L : Ta plume, ici, laisse peu d’espoir. Crois-tu que nous vivions une époque où l’espoir n’est qu’un leurre visant à consommer plutôt qu’à profiter de ce qui nous est donné ? (on rentre dans des considérations presque philosophiques là, non?)
Jean-Marie Fleurot : Je crois en effet qu’on nous conditionne à mesurer nos aspirations, nos attentes, nos rêves, ce que nous attendons de la vie en termes de consommation, plutôt qu’à profiter de ce qui nous est donné comme tu le dit. Et que surtout cette incitation vise à nous faire abandonner notre liberté, à nous faire refouler ce qu’il y a de critique et d’autonome en nous pour tenir la culture de masse dominante comme seule issue. Bref à nous ranger sagement dans une boite dans laquelle nous serons facilement étiquetés et d’où nous n’aurons pas l’idée d’aller voir ailleurs.
L : Malgré tout, tes personnages sont très humains. Nous voyons qu’ils se retrouvent là, dans telle ou telle situation, par le fruit de mauvais choix, des leurs ou de ceux de leurs aînés. Penses-tu que le destin est déjà tout écrit, pour chacun d’entre nous (et pour tes personnages également) ?
Jean-Marie Fleurot : Je parlerai surtout pour mes personnages mais tu as compris qu’ils me doivent beaucoup. Ils font sans arrêt des choix, vitaux ou purement banals et anecdotiques, qui mis bout à bout finissent par constituer une histoire, en plus de ceux que les autres ont faits ou font pour eux. Mais rien n’est écrit, il suffit d’une rencontre, d’un regard et tout peut changer soudain et les compteurs être remis à zéro. En apparence…
L : Tu évoques des thèmes ultra-rabâchés, et pourtant tu arrives à me surprendre, sur toutes les nouvelles. C’est quoi ta formule magique pour ne pas sombrer dans la répétition de ce qui a été fait avant ?
Jean-Marie Fleurot : C’est très gentil. Franchement je n’ai pas la réponse. Peut-être la trouille de faire comme tout le monde ? Rires…
L : J’ai senti, à travers toutes tes nouvelles, un amour pour tes personnages, « méchants » comme « gentils ». Je me trompe ?
Jean-Marie Fleurot : Non tu as parfaitement raison. Déjà le point de départ du recueil ce sont deux « héroïnes » qui n’ont rien à voir ensemble, une au bord de la Méditerranée, l’autre à Sarajevo, mais sont les deux reflets d’une marseillaise qui doit encore habiter pas loin des Goudes. Et puis les autres aussi, je les connais pas mal même s’ils arrivent de loin pour se retrouver là.
L : Qu’y a-t-il de fascinant, d’après toi, chez les « perdants » (parce que, plus ou moins, ils le sont tous dans Des catastrophes pas très naturelles)?
Jean-Marie Fleurot : Les perdants sont plus complexes, car ils ne sont jamais que perdants. Ils ont souvent choisi de perdre, donc refusé les règles du jeu auxquelles ils ont substitué les leurs qu’ils sont souvent seuls à connaître. Ce sont des tricheurs qui flouent leur entourage, la société, les « autres ». Et dans la littérature, je pense que n’importe quel alcoolo paumé de Fitzgerald est 100 fois plus humain et plus passionnant à écrire que tous les machos à grande gueule de Hemingway.
L : Edilivre est, si je ne m’abuse, une maison d’édition à compte d’auteur. Pourquoi ce choix ? Ta plume mérite pourtant une maison d’édition à compte d’éditeur. Est-ce par choix ou par dépit que tu as choisi cette voie?
Jean-Marie Fleurot : Le choix d’Edilivre en fait, est une voie qui me convient parfaitement pour l’instant dans la mesure où ce qui m’importe c’est de donner une visibilité à mes écrits, cette activité restant « annexe » et n’ayant pas vocation à devenir un métier. Je suis édité de manière professionnelle sans que cela ait un coût pour moi et mes lecteurs achètent mes livres en numérique ou sur des plateformes telles que FNAC ou AMAZON. Bien sûr, je ne bénéficie pas du circuit de distribution ni de l’appui publicitaire d’un éditeur mais soyons honnêtes, à part les auteurs phares, les « autres » restent dans l’ombre et ne bénéficient pas de plus de soutien des éditeurs, je pense, que s’ils étaient chez EDILIVRE…
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