BENOÎT BEHUDÉ, portrait objectif // l’auteur et ses doutes.
Suite du portrait de Benoît Behudé (plus objectif cette fois).
Pour ceux qui se demandent « c’est quoi un auteur ? », nous pouvons évidemment répondre que c’est quelqu’un qui écrit, qui crée un univers, des personnages, un ou des environnements. Mais être auteur ne se résume pas à cela. Suite à une discussion passionnante par téléphone avec notre auteur du mois de janvier Benoît Behudé, il nous apparaît important de revenir sur certains points importants, très souvent communs aux auteurs.
Tout d’abord, on ne devient pas auteur « comme ça ». C’est souvent une vocation qui s’impose, de façon plus ou moins brutale.
Un événement de vie peut déclencher une envie importante de se saisir de la plume, mais le plus souvent, c’est présent, de façon plus ou moins claire, expressive, en chaque auteur. Cela ressort, d’une façon ou d’une autre, sans qu’il y ait de logique d’âge (n’oublions pas notre ami Thomas Degré qui a commencé à écrire sur le tard). Bref, être auteur, ça ne se commande pas.
Les débuts.
Benoît Behudé nous confiait qu’il n’était pas un grand lecteur (vous découvrirez tout cela dans l’interview que nous menons encore à l’heure actuelle avec lui). Mais l’écriture s’imposait malgré tout à lui, d’une façon que nous pourrions qualifier de détournée. En effet, celle-ci passait par la musique. Fan de HF Thiéfaine (et on le comprend fort bien), l’écriture révélait bien des secrets, des doubles sens, des images qu’il (notre auteur du mois) n’arrivait pas à décrypter en totalité. Si le caractère cryptique possède des vertus, comme celles de faire turbiner notre imaginaire à plein régime, en connaitre les tenants et aboutissants en révèle bien des autres, et souvent des plus importants.
Alors, peu à peu, il se glisse dans la Littérature. Nous mettons un L majuscule car, pour acquérir des bases, il se lance à la conquête des classiques. Petit à petit, il se forge une idée de ce qu’est l’écriture, en même temps que certains univers musicaux délivrent leurs secrets (plus ou moins bien gardés). Et cela met le feu aux poudres puisqu’il entame l’écriture de son premier roman, Lièvre noir.
Lien musique littérature.
Il ne fait pour nous aucun doute qu’il existe un fil tendu entre les deux têtes de litzic, à savoir littérature et musique. D’une part parce que dans les deux cas, que vous soyez musiciens pur et dur ou auteur-compositeur, il faut écrire (soit une partition, soit des paroles, soit les deux). Et puis, il y a des imaginaires, comme ceux de certains albums, comme Animals de Pink Floyd, qui évoquent des auteurs et des œuvres illustres (dans le cas d’Animals, Georges Orwell). C’est donc avec peu de surprise que Benoît Behudé nous explique avoir bossé sur son roman en écoutant 3 albums des floyd, The dark side of the moon, Wish you were here et le fameux Animals.
Contrairement à Thiéfaine, ceux-ci peuvent servir d’arrière-plan sonore peu perturbant car les paroles laissent souvent la place à la musique pure (Shine on you crazy diamond nous paraît être un excellent exemple, tout comme The great gig in the sky, pour n’en citer que deux, en y ajoutant Sheep, dogs etc…). Bref, comme d’autres auteurs, le besoin de s’isoler pendant l’exercice d’écriture s’impose pour lui, non pas comme un besoin viscéral, mais plus exactement comme un catalyseur d’idée pour broder un univers cohérent. Donc ici, pas de grand écart entre le rock planant des Floyd et, par exemple, une fureur à la Rammstein.
L’édition.
Ce point revient des plus fréquemment. De très nombreux auteurs sont en effet déroutés, pour ne pas dire parfois terrifiés, par le monde de l’édition. Celui-ci, il est vrai, peut s’avérer très complexe à appréhender. Lors de notre entretien téléphonique, Benoît évoquait le fait de « savoir se vendre ». En effet, écrire et faire connaître son ouvrage sont deux choses aussi éloignées qu’une banane d’une pelleteuse. Pourtant, l’auteur se retrouve bien seul à accomplir de nombreuses tâches : écrire son livre, le corriger une première fois, puis démarcher les éditeurs. Pour cela, il (l’auteur) passe un temps monstre pour cibler les éditeurs dont les lignes éditoriales correspondent à son histoire.
Outre le fait qu’énormément d’auteurs doutent de leur légitimité, qu’ils manquent très souvent de confiance en eux et/ou en leurs écrits, une fois l’éditeur démarché, ils n’ont aucune façon de savoir si leur mail (dans le cas d’un tapuscrit) ou leur courrier (dans le cas d’un manuscrit, mais cessez ces pratiques par pitié) a été lu. Des nouvelles questions surgissent : n’ai-je pas su bien vendre mon livre ? N’ai-je pas accroché le professionnel ? A-t-il trouvé cela mauvais et si oui, pourquoi ? Tous les éditeurs ne répondent pas forcément, nous ne leur jetons pas la pierre, étant souvent pris par le temps, eux aussi.
Bref, de nombreux auteurs abandonnent avant d’avoir trouvé un éditeur (ce qui est forcément dommageable, voire carrément un crime de lèse-majesté dans certains cas). Nous tenons à rassurer tous les auteurs, il existe des maisons d’édition très correctes, elles sont nombreuses, et peuvent vous accompagner. Il ne reste qu’à les trouver et surtout de ne pas sombrer dans le piège de l’édition à compte d’auteur, une calamité sans nom isolant encore davantage l’auteur (à notre avis). Mais cela est chronophage et souvent décourageant.
Bref…
Les points évoqués ci-dessus l’ont été avec Benoît Behudé. Ils nous questionnent sur bien des aspects de l’auteur que tous les auteurs connaissent, de façon plus ou moins grande. Pour autant, les lecteurs n’en sont pas forcément conscients. Si l’on ajoute à cela que les auteurs, dans la grande majorité des cas, ne vivent pas de leur plume (seuls des auteurs installés comme Houellebecq, Nothomb et quelques autres forts connus y parviennent), nous obtenons un tableau un peu pessimiste du métier d’auteur.
Néanmoins, nous utilisions le terme de vocation plus haut. Une vocation, vous ne la choisissez pas, c’est elle qui vous choisit. Il faut faire avec et essayer de lui donner ce qu’elle désire. Nous espérons de tout cœur que Benoît Behudé, dont le livre est pour l’heure auto-édité, trouvera très vite un bon éditeur pour que ce livre puisse s’exprimer pleinement.
Relire le portrait (subjectif) de nôtre auteur du mois.
Lire le chapitre 4 de Lièvre Noir
Lire la chronique de Lièvre noir