PI 1 SHODOUKAN : l’interview de fin de dossier

Interview de Pi1 Shoudokan.

Pi1 shodoukan, c’est Arthur Lobert et Xavier Morel, deux multi-instrumentistes inspirés qui nous proposent un space rock décliné sur 6 albums. Dans le cadre de notre dossier spécial, les deux artistes ont accepté de répondre à quelques questions. Cette interview fermera ce dossier « spatial » que nous avions ouvert pour explorer l’univers fou et les différentes facettes du duo.

L’interview de Pi1 Shodoukan.

Litzic : Salut Pi1, première question rituelle, comment ça va ? Il ne fait pas trop chaud à Toulouse ?

Pi1 : Ça ne va pas trop mal, malgré le début de canicule, merci !
(ndlr : petit décalage spatio-temporel dû à notre pause de quelques jours)

L : Comment vous est venue l’idée de ce concept (développer musicalement l’évolution d’une entité virtuelle appelée Pi1 Shodoukan) absolument dantesque ? Quel en a été le point de départ ? Êtes-vous parti du premier album en vous disant « on va développer sur ce thème » ou tout était-il prévu avant celui-ci ?

Pi1 : Vaste question … En effet, le projet est assez ambitieux. L’embryon de cette histoire trottait déjà dans notre tête depuis une petite dizaine d’années, de manière assez vague. L’idée était de pouvoir développer une histoire par des médiums autres que la littérature ou le cinéma. Peu à peu, cette dernière a gagné en consistance et en forme (ses 5 différents «actes », etc.). L’idée et le « scénario » final étaient déjà présents et aboutis lors de l’écriture du premier album, au moins dans ses grandes lignes. C’est d’ailleurs cette histoire qui est à la base de cet album, et non l’inverse.
Musicalement, l’origine du projet est une pièce pour piano seul d’une vingtaine de minutes, qui racontait les grandes lignes de l’histoire de Pi1. C’est ce morceau de piano qui sert de trame au tout premier album.

Cependant, bien que les 5 actes et leurs thèmes respectifs aient été pensés en amont de l’écriture du premier album, les développements de ces derniers en albums « enfants » n’étaient pas encore très détaillés au début du projet, et chaque album successif nous permet d’affiner cette histoire lors de la phase d’écriture.

Relire la chronique : Odyssey (le concept)

L : Pour simplifier votre projet : vous partez du sommet d’une pyramide pour atteindre sa base. L’album mère étant tout en haut et ses « enfants » à sa base. Peut-on croire que les 5 enfants (Question, Reflection, Doubt, Experience, acceptation) auront-ils en même d’autres rejetons ?

Pi1 : Du calme et du sang-froid camarade ! Avant de parler d’autres rejetons, il nous faut déjà finir les deux albums restants ! Pour l’instant, rien n’est prévu dans ce sens. Mais comme dit précédemment, vu que nous continuons d’écrire les détails de cette histoire à chaque album, peut-être ressentirons-nous le besoin d’en ajouter ? Rien n’est exclu, mais dans tous les cas ce ne sera pas pour tout de suite …

 » Peut-être est-ce lié, mais nous aimons bien les constructions musicales circulaires et cycliques. »

L : Pourquoi ce nom de Pi1 shodoukan ? Pi en référence au chiffre caractéristique des cercles, comme si cette odyssée évoquait quelque chose de circulaire ?

Pi1 : Shodoukan est un mélange de deux termes japonais : [Shodo] – calligraphie, et[kan] – instinct, sentiment. On peut voir la concaténation de ces deux termes comme une “calligraphie des sentiments”, et ça nous paraissait plutôt cohérent avec le projet de raconter une histoire simplement par la musique.
Quant à l’utilisation de Pi, il y a un peu de ça, sans doute … Peut-être est-ce lié, mais nous aimons bien les constructions musicales circulaires et cycliques.
Enfin, le numéro de chaque album (1.1, 1.2, etc), représente la version de l’IA au stade de l’histoire.

L :  Donc Pi1 est bien une intelligence artificielle s’éveillant à la conscience ? Vous avez le droit de garder le mystère. Pour ma part, j’aime l’idée de l’I.A

Pi1 : Pi1 est en effet une intelligence artificielle qui “s’humanise”.

Relire la chroniques : Odyssey The evolution (disque mère),

L : Quelles sont vos références musicales, mais également vos références cinématographiques et littéraires ? J’imagine que vous aimez bien la science-fiction car l’Odyssey m’évoque pas mal d’images du genre (comme 2001 l’Odyssée de l’espace par exemple).

Pi 1 : Deuxième vaste question … Déjà, on est assez friands de SF. Hypérion de Dan Simmons nous a mis une grosse claque a tous les deux, comme tout le cycle Fondation d’Asimov, les Dune de Herbert, les vieux Van Vogt, etc. Mais on n’est pas trop sectaires et monomaniaques, on lit un peu de tout …
Un peu pareil pour les références cinéma, ça passe du Il était une fois en Amérique de Sergio Leone à un bon vieux Will Ferrell des familles, y en a un peu pour tous les goûts.
Quant aux références musicales, ça s’entend peut-être, mais on est tous les deux fans des Pink Floyd. Le cote très « cinéma » dans leur musique, leurs longues plages instrumentales très parlantes, leur recherche constante d’innovation … On peut dire la même chose de Mike Oldfield, dans une moindre mesure. Pour tout ce qui est musique électronique, c’est très difficile de passer à côté de Aphex Twin. L’influence qu’il a eue sur toutes les musiques électro actuelles est hallucinante. Meshuggah pour le métal, bien sur. Les constructions et formes classiques nous ont influencés aussi, on est assez amateurs de Bach, entre autres.
Beaucoup d’autres albums qui nous ont marqués en termes d’écriture. Par exemple, tous les albums de Radiohead sont des petits bijoux de construction. Crack the Sky de Mastodon, certaines pistes de Toska, We Lost the Sea, Tides of Nebula, … Impossible de faire une liste exhaustive.

 » On reste assez classique en terme d’instrumentation et d’orchestration. »

L : Comment bossez-vous ? Tout est écrit ou bien laissez-vous un peu place à l’improvisation ?

Pi 1 : Absolument toute notre musique est écrite, on ne laisse aucune place à l’improvisation. Du coup, le processus est forcément assez long.
On s’impose également la contrainte de l’histoire et du scénario sous-jacent à la musique. C’est fondamental pour nous d’obtenir une cohérence dans l’écriture musicale et l’histoire de Pi1 : la musique doit la représenter au mieux.
Ainsi, on rejette énormément de morceaux qui musicalement nous plaisent beaucoup mais qui ne collent pas à l’ambiance recherchée et au storytelling, qui feraient un peu “hors sujet” dans l’album entier. Pour ceux-là, on les met de côté sans aucun scrupule. Pour Question, on doit avoir jeté peut-être trois bons quarts d’heure de musique a cause de ça. Peut-être les sortirons-nous en stand-alone plus tard.
Enfin, une fois que l’intégralité de la musique a été composée, que nous avons suffisamment de matériel et que l’histoire est aboutie, arrive la phase de “montage”, un peu comme pour un film. Avec la composition, c’est peut-être le processus que l’on apprécie le plus : faire des coupes pour rendre tel ou tel passage plus percutant, supprimer des redites, peaufiner les transitions, ajouter des samples de voix et de discours à tel ou tel endroit, changer la place d’un morceau, etc. C’est très long, mais particulièrement jouissif de voir l’album final prendre forme peu à peu.
En particulier, le choix des samples de voix que nous utilisons et leur placement dans la musique : quand on trouve le bon, qu’il se cale parfaitement en rythme et en tessiture avec l’instrumentation derrière et qu’il est porteur de sens, c’est génial.

Relire la chronique : Question

L : Qui joue de quoi ? Quel est l’instrument le plus chelou que vous avez utilisé jusqu’à présent sur ce projet ?

Pi 1 : On est tous deux multi-instrumentistes : claviers, guitares, basse, machines diverses pour les deux. Mais il n’y en a qu’un seul qui joue de la batterie, l’autre étant incapable de toute coordination pieds-mains. Quant aux instruments étranges, il y en a assez peu, en fait … On reste assez classique en terme d’instrumentation et d’orchestration. C’est principalement dans tout ce qui est ambiance et sound-design que l’on cherche quelquefois à sortir du cadre établi.

L : J’ai fait un compte rapide qui porte la durée d’écoute totale des albums d’ Odyssey aux alentours des 480 minutes. Depuis combien de temps bossez-vous dessus et combien de temps, en moyenne par semaine, lui accordez-vous ?

Pi1 : Pour revenir à la pièce de piano “fondatrice” de notre musique et qui sert de base au premier album, l’écriture du scénario et l’aboutissement du concept, il a fallu à peu près 7 ans avant de se lancer dans le premier album.
Le premier album est sorti en Octobre 2016, il a fallu à peu près 16 mois pour l’achever, donc en termes de production musicale pure, ça doit faire a peu près 7 ans (sans compter la première pièce de piano).
Pour le temps consacré en moyenne par semaine, on est bien incapable d’y répondre … Comme tout projet – artistique ou non -, il y a des phases d’investissement intenses et des périodes plus légères. Par exemple, pour le dernier album « Question », nous avons passé 5 mois d’écriture et d’enregistrement à être dans le studio 6j/7 et 18 heures par jour, et d’autres mois à travailler une à deux journées/semaine dessus. Mais ça reste un travail régulier.

« il a fallu a peu près 7 ans avant de se lancer dans le premier album. »

L : Quand vous aurez terminé Acceptation, vous vous sentirez vide sans doute, non ? Est-ce que ça ne réduira pas votre amitié et votre collaboration artistique en poussière ? Je ne vous le souhaite pas bien entendu !

Pi1 : Vide peut-être, content et soulagé sans aucun doute ! Soulagé parce qu’on savait qu’on voulait faire ça depuis le début, on savait que ça nous prendrait une petite dizaine d’années. On sera content quand on aura vu le bout ! Mais ce n’est absolument pas la finalité de notre collab’ musicale : on peut/veut toujours faire de la musique en dehors du cadre Odyssey. On y réfléchit un peu, d’ailleurs … Odyssey n’est qu’un prétexte parmi d’autres pour notre collaboration musicale, et des histoires il y en a un nombre infini à raconter …

Relire la chronique : Reflection

L : Envisagez-vous une suite à cette « histoire » ou un prequel (après l’Odyssée, l’Iliade, comme un clin d’oeil à Homère) ?

Pi1 : Encore une fois : du calme et du sang-froid ! Pas pour l’instant non, mais rien n’est exclu. Typiquement, les morceaux que l’on a rejetés lors des précédents albums peuvent donner matière à des petits « extras » … Rien de précis à l’horizon, cependant …

L : Vous travaillez sur d’autres projets en parallèle ?

Pi1 : Nous sommes également associés au sein d‘un cabinet de conseil et développement open source (avec 3 autres collaborateurs).

« …nous avons passé 5 mois d’écriture et d’enregistrement à être dans le studio 6j/7 et 18 heures par jour… »

L : Certains groupes rejouent parfois l’intégrale d’un de leurs disques sur scène. Certains cinémas organisent des marathons (Marvel, Star Wars etc…). Imaginez-vous un jour jouer l’intégralité de cette odyssée sur scène ?

Pi1 : Ça serait le rêve ! Un rêve encore plus fou serait de pouvoir engager suffisamment de musiciens pour jouer l’ensemble de notre musique sur scène sans machines – car nous ne sommes que deux, ce qui limite un peu nos possibilités en live …
Encore mieux, que nous ne le jouons même pas, même pas chef d’orchestre : être simplement dans la salle et regarder des musiciens jouer notre musique. Ça, ça serait dément.

Relire la chronique : Doubt

L :  Quand pensez-vous sortir les deux albums suivants ? Avez-vous déjà travaillé sur certaines de leurs pistes ?

Pi1 : C’est encore à l’état embryonnaire … Nous nous sommes à peine décidé sur le prochain album que nous allons traiter : Expérience, ou Acceptation ? Il faut savoir que chaque album que l’on écrit est fortement influencé par nos expériences personnelles, et ce sont ces dernières qui vont en partie déterminer l’album dans lequel on va se lancer, tout simplement parce que nos expériences nourrissent l’écriture. Typiquement, le 1.3 qui est le plus sombre de l’histoire, a été écrit dans une période assez sombre de nos vies personnelles.

L :  Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour la suite ?

Pi1 : Déjà, qu’on arrive au bout du projet et qu’on puisse le développer selon nos idées. Bien entendu, pour nous permettre de faire cela, il nous faut une plus grande visibilité. On souhaiterait vraiment que de plus en plus de monde apprécie et partage notre travail, comme n’importe quel artiste en somme …

L :  Vous avez carte blanche pour faire votre autopromo, réclamer des sous, pousser un coup de gueule, un coup de cœur : c’est à vous !

Pi1 : Un grand merci pour tes chroniques sur nos albums, on espère vraiment qu’elles donneront envie à de nouvelles personnes de se plonger dedans et qu’elles apprécient autant que toi. Quant aux coups de gueule, on va passer notre tour.

 

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