[ ALBUM ] PI1 SHODOUKAN, Doubt (Odyssey)

Troisième volet de l’évolution de l’entité virtuelle Pi1 Shodoukan, Doubt.

Comment quelques notes peuvent elles à ce point annoncer la couleur d’un album ? On poursuit l’exploration de l’univers de Pi1 Shodoukan avec le troisième volet de son évolution, Doubt. L’odyssée de Pi1 shodoukan se poursuit, sur ce sentiment étrange et parfois dévastateur qu’est le doute, source de remises en question parfois violentes qui viennent rendre la vie relativement désagréable et instable.

Ici, tout commence par quelques notes de piano, aérées, qui laissent la porte ouverte au questionnement. Et celui-ci viendra ponctuer Doubt de façon régulière tout au long de ses quatre titres. Ces quelques notes nous installent d’emblée dans la teneur globale de l’album, ou l’électricité la plus ténue rencontre la plus débridée, où les rythmiques légères rencontrent celles qui sont plus plombées.

Violence.

Nous sentons dans cet album plus de violence que dans les 2 premiers volets consacrés à l’évolution de l’entité Pi1. Ou peut-être s’agit-il plus de tension que de violence. Les aspects proches du metal, déjà ressentis sur Reflection sont ici plus présents. Nous y sentons une manifestation d’une douleur, d’un refus quelconque d’acceptation de l’inacceptable. Cet inacceptable est mis en relief par des extraits de discours qui forcément nous laisse un goût amer dans la bouche, comme peuvent les créer les propos de Ségala sur le fait de posséder une Rolex, ou bien les fragments de discours en allemand évoquant forcément Hitler (d’ailleurs il s’agit peut-être de lui).

Bref, il y a dans Doubt une ambivalence des sentiments. Les côtés les plus calmes apparaissant ici comme une analogie à celui qui se persuade qu’il est dans le bon chemin, en opposition avec les moments les plus violents qui évoquent justement un chambardement émotionnel fort, contrasté. Cet album joue donc les contrastes, toujours avec une puissance évocatrice d’une justesse rare. Mais… N’est-ce pas le titre de l’album qui nous amène à guider nos pensées sur les pistes que nous évoquons ou bien celles-ci apparaissent-elles d’elles-mêmes ? Nous ne savons pas, le doute s’immisce en nous.

Doute.

Nous jouons volontiers de cette corde douteuse pour étayer notre propos. Le simple pouvoir évocateur d’une musique peut-il guider notre réflexion ? Depuis le début de notre dossier consacré à Pi1 Shodoukan, nous tentons de mettre en relief des aspects musicaux avec une étude, parfois un peu foireuse, philosophico-métaphysique.

Pourtant, il nous apparaît important de le faire car, assurément, la musique de Pi1 remue. Indépendamment de ces qualités techniques (et nous le répétons, le travail accomplit ici est celui de deux musiciens uniquement et est absolument irréprochable), l’odyssée ici décrite est d’une richesse intellectuelle dingue.

Nous voulons dire par là que la démarche artistique est folle. Que ce groupe est fou ! Dans le bon sens du terme, entendons-nous bien. Venir à bout d’un tel projet (il reste encore deux albums à paraître, enfin si les choses doivent en rester là où le papier les a situées) est titanesque. Avec Doubt, nous voyons l’entité grandir, atteindre une maturité que nous nous efforçons d’atteindre nous-même.

Musicalement.

Le rock progressif du duo démontre une nouvelle fois toute sa richesse (et sa justesse). Les titres s’étirent aux frontières des 20 minutes, à l’exception du titre Violence, d’une rare brièveté chez le groupe puisqu’il peine à atteindre les 14 minutes. Sans doute parce que, comme son nom l’indique, la violence dont il est chargé est épuisante. Sentiment que nous ressentons pleinement à l’écoute de l’album, sur ce titre en particulier, car la force du doute est aussi de nous épuiser*.

Et ici, il y parvient merveilleusement, même par le biais de la musique. Trop d’informations à gérer, trop de bouillonnements internes, trop bouleversant également. Nous sommes dans un état second, parfois sidérés lorsque les extraits de discours se saisissent de nous, nous capturent littéralement par le pouvoir suggestif dont ils sont chargés. Les questions fusent : pourquoi cet extrait, quel est le propos du groupe, où veut en venir Pi1 Shodoukan ?

(*quand nous disons épuisés, c’est une image. La densité de l’album demande de l’attention, de l’implication, chose que nous lui accordons volontiers. Cette demande de « présence » nous éloigne, comme pour les précédents albums, de l’easy listening de certaines productions actuelles et montre que la musique a encore et toujours des choses à dire, des messages à porter.)

Les réponses ?

Les réponses, nous les trouvons une nouvelle fois dans la musique. Ici, le côté épique a (presque) disparu, laissant place à un aspect plus terre à terre, pragmatique. L’entité fait le bilan sur elle-même et sur ce qui l’entoure. Cela se traduit par une musique moins aérienne, plus lourde, plus métal nous le répétons (plus de double pédale à la batterie, des rythmiques plus puissantes, une production plus resserrée).

Pourtant, se dégage encore des 4 titres un espoir en filigrane. Une foi, serions-nous tentés de dire, dans laquelle l’entité puise la force de continuer à avancer. Il n’y a pas de renoncement dans Doubt. Il y a juste l’évocation de cette période charnière (ou des ces périodes) durant laquelle nous cherchons à définir notre ligne de conduite pour les années à venir. Cet album en est une évocation plutôt juste, fine. Et surtout pas moralisatrice ou on-ne-sait-quoi.

Le tour de force de Doubt.

Pi1 shodoukan trace sa route, nous entraîne dans son sillon, modifie, aussi, notre perception de ce qui nous entoure. Et nous pose la question de l’acceptation pleine est entière au détriment du doute (et de l’évolution). Un extrait parlé dit (nous paraphrasons) qu’il est facile de vivre sans se poser de questions, de suivre le cours de son existence sans chercher à en savoir plus, sans être curieux. Que c’est de ce manque de courage que résulte l’idiotie des gens.

Nous terminerons là-dessus, en disant néanmoins que la musique de Pi1 shodoukan n’est pas réservée à une élite. Au contraire, elle est assez instinctive pour que tous s’y retrouvent, assez riche également pour que chacun y trouve matière à réfléchir. Et faire ainsi disparaître quelques doutes.

Pi1 shodoukan Doubt

Relire les articles précédents consacrés à l’evolution of Pi1 Shodoukan : Question et Reflection

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