Interview : quelques questions à Gabriel Kevlec

quelques questions à gabriel kevlecPremière partie de notre entretien avec Gabriel Kevlec.

Nous avons posé quelques questions à Gabriel Kevlec autour de ses premiers émois littéraires, de ses premiers pas dans l’écriture, ainsi que sur sa manière de travailler. On vous laisser découvrir tout cela sans tarder.

L’interview

Litzic : Bonjour Gabriel. Tout d’abord question de base : comment vas-tu ?

Gabriel Kevlec : Bonjour ! Je vais bien… je crois. Ce n’est jamais une question simple pour moi, et vous allez vite vous en rendre compte, j’ai mon signe astrologique (balance) qui me colle à la peau : je suis incapable de répondre simplement à une question !

L : Peux-tu nous expliquer un peu qui tu es, quels sont tes premiers souvenirs de lecture ?

Gabriel Kevlec : Qui je suis… moi, et c’est déjà suffisamment compliqué comme ça !
Mes premiers souvenirs de lecture sont les contes. Grimm, Gripari, Wilde… j’ai grandi persuadé que la magie existait, que les monstres peuplaient le monde mais qu’on pouvait les combattre, et que quelques mots prononcés correctement peuvent changer le cours de l’histoire.

L : Quels sont les auteurs/autrices qui t’ont marqué, à un moment ou à un autre de ta vie ? Pourquoi ?

Gabriel Kevlec : Barjavel a été le premier auteur duquel je suis réellement tombé en pâmoison, le premier chez qui j’ai découvert une façon de décrire l’amour véritable, l’amour à la folie. Après lui… je n’ai fait que ça, chercher dans les lignes toutes les façons de dire « je t’aime », de dire « j’ai envie de toi », de dire « tu me manques ».

Éluard m’a appris la beauté qu’une poignée de mots peut cacher, Verlaine la puissance de la sonorité, les textes de Ferré m’ont appris les figures de style, et puis… Riboulet, Guibert, Laclos, Sade, et tant d’autres m’ont fait entrer dans l’univers fabuleux des mots qui ont une odeur, une saveur, celle de l’envie brute, du sexe doux, de la tendre brutalité.

…je n’ai fait que ça, chercher dans les lignes toutes les façons de dire « je t’aime »…

L : Même question avec les livres. Quels sont ceux qui t’ont touché, qui ont façonné ton imaginaire, ou qui ont simplement permis que tu te dises : moi aussi je vais raconter des histoires ?

Gabriel Kevlec : La Nuit des Temps est mon livre de chevet depuis que j’ai 14 ans. C’est à mes yeux la plus belle des histoires d’amour jamais écrites. J’étais un ado, et je rêvais d’une romance aussi fabuleuse et tragique que celle-ci, quitte à souffrir, quitte à tout perdre ! Je voulais moi aussi prendre une balle dans le poignet et écrire « Sans rancune » à la plume !

À l’âge où mes camarades de classe enchaînaient des amourettes mouchoirs, moi j’espérais la grande déclaration, l’âme sœur, l’amour de toute une vie. On est très sérieux quand on a 14 ans ! C’est vers cette période que j’ai commencé à écrire avec acharnement, pour combler ce que le réel ne m’apportait pas.

Beaucoup plus tard, je suis tombé par hasard sur Celui qui regardait le Ciel, de Frédéric Bleumalt. Comment vous décrire ce que j’ai ressenti… c’était inouï. Inimaginable. Je lisais, et je me retrouvais dans ces mots, cette façon de chercher l’esthétique du phonème, et le bleu, le bleu partout. Ma grande histoire d’amour, elle était là, dans ces lignes. Parce qu’en lisant ce roman, je suis (re)tombé amoureux de l’écriture, de ce que cela peut m’apporter comme immense joie et insupportable chagrin.

L : Quel a été le déclencheur de ton écriture ? Un besoin ? Une envie ? Une vocation ?

Gabriel Kevlec : Écrire a toujours été un besoin. Besoin de combler les manques, la solitude, d’échapper au réel quand il faisait un peu trop mal ou un peu trop peur. Besoin de re-convoquer la magie aussi, dans un monde qui à mes yeux en manquait cruellement. Et puis… besoin d’aimer, je crois. J’ai été un enfant aimé, adoré. On m’a rempli de tant d’amour, ça déborde de partout, il fallait que j’en fasse quelque chose.

Alors j’en ai tissé des fils, des tissus d’histoires pour m’habiller et arborer mes amours : l’amour des hommes, des peaux, du sexe, l’amour de ces fragilités qui font les hommes si forts, l’amour des vies en vrac, des gueules cassées, de ceux qu’on ne regarde pas assez, de ceux qui ont l’envie furieuse qu’on les prenne dans les bras. L’amour de… l’amour, tout simplement, l’amour scandé, gémi, montré, celui qu’on offre sans rien attendre en retour, celui qu’on reçoit comme un cadeau, celui qui fait les corps magiques, les peaux qui se parlent et les chairs liquides.

…L’amour de… l’amour, tout simplement, l’amour scandé, gémi, montré, celui qu’on offre sans rien attendre en retour…

L : Comment t’y prends-tu pour écrire ? As-tu besoin d’un plan ou te laisses-tu embarquer par tes personnages, ton histoire ? Te laisses-tu des libertés ou tout doit-il être « calibré » selon ton bon vouloir ?

Gabriel Kevlec : Lorsqu’une histoire naît dans ma tête, j’écris son plan, son squelette sur papier. Des dates, des mots clés, des prénoms… Je tisse peu à peu autour. Quand je sens que le squelette est suffisamment solide, je passe sur ordinateur, je le recopie, le découpe en chapitres qui seront cent fois remaniés et je commence véritablement à écrire. Je n’écris pas dans l’ordre de l’histoire, mais selon mes humeurs. Il n’est pas rare que je change une scène, une fin, voire même un personnage entier en cours de travail. Je ne m’interdis rien, car il n’est d’espace de plus grande liberté qu’une page blanche.

L : Comment procèdes-tu après le premier jet de ton roman. Te laisses-tu du temps pour laisser maturer ou es-tu tout le temps dessus pour y apporter des ajustements ?

Gabriel Kevlec : Le premier jet n’en est pas vraiment un : tandis que j’écris pour la première fois une scène, je retravaille pour la trentième fois une autre. Je ne me force ni à l’écriture, ni à la pause. Si j’ai les mots qui fourmillent au bout des doigts, je peux rester 6, 7, 8 heures devant mon écran, mais il m’arrive d’avoir des périodes de plusieurs semaines au cours desquelles je suis incapable d’écrire la moindre ligne.

J’ai la chance d’être entouré de gens qui ne mâchent pas leurs mots…

L : Relis-tu tes écrits à voix haute pour t’assurer de leur musicalité ?

Gabriel Kevlec : Je me relis toujours à voix haute, à la fois pour ajuster le rythme, jouer sur les sonorités, ciseler les allitérations, mais aussi pour placer correctement la ponctuation. Je peux hésiter plus d’une heure sur le placement d’une virgule : je suis « légèrement » perfectionniste.

L : As-tu recours à des bêta lecteurs, à des proches pour avoir un peu plus d’objectivité sur tes écrits ?

Gabriel Kevlec : J’ai des bêta lecteurs qui s’assurent à la fois que je n’ai pas laissé passer de coquilles et qui m’aident à prendre du recul sur mes textes, pointant les éventuelles incohérences ou les références un peu obscures qui mériteraient une note de bas de page.

J’ai la chance d’être entouré de gens qui ne mâchent pas leurs mots, ce qui n’est pas toujours facile, comme cet ami qui a créé pour moi, en bêta-lisant Le Choix de l’Oranger, une « alerte harlequin » quand il trouvait dans mes scènes de sexe des expressions trop nunuches, ou cet autre qui a carrément souligné un chapitre entier de En Toi et marqué en commentaire « ça, c’est de la merde, tu recommences ». Leur œil nu, neuf, et sans fioritures me permet d’avancer, d’essayer de progresser toujours.

Infos

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Découvrir sa plume avec sa nouvelle Sou mi

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