GABRIEL KEVLEC, Le choix de l’oranger

gabriel kevlec le choix de l'orangerTriangle amoureux.

Ce deuxième roman de Gabriel Kevlec, Le choix de l’oranger, une nouvelle fois publié dans la collection Alcôve des éditions Ex Aequo, quitte les abords de la Tamise de Cordons pour se situer quelque part entre l’Auvergne et l’Indre-et-Loire. Il est une histoire d’amour, une romance impliquant 3 jeunes hommes, mais aussi une histoire de reconstruction, autant physique que cérébrale. Enfin, il est une histoire de choix, comme son nom le suggère.

Samaël est un jeune homme en voie de reconstruction. Battu à mort à cause de son homosexualité (un piège tendu par un prétendu soupirant qui se termine en bain de violence gratuite), il se recompose à la fois un corps, un visage, mais aussi répare, comme il peut, ses plaies de l’âme. Ne sortant que peu de chez lui, c’est sur le net qu’il parvient à communiquer avec le monde extérieur, notamment en postant des éléments de son blog (il écrit des textes, des poèmes), qu’il relaye notamment sur Twitter. C’est là qu’il fait la connaissance de Manoé. Entre eux, c’est le coup de foudre « virtuel ».

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En même temps….

Alors qu’il se rend à l’hôpital pour enlever les derniers gros bandages sur son visage, ceux-là mêmes qui vont permettre à sa peau de retrouver la lumière du jour après une lourde chirurgie réparatrice, qui laissera néanmoins une cicatrice, il est séduit par Ferréol. Ce dernier, sous prétexte de lui fournir une pommade cicatrisante, se présentera à son domicile. Une joute physique s’engagera entre les deux hommes.

D’un côté, l’amour platonique, celui des mots, de l’esprit, du partage d’idée, de l’autre, l’amour physique, d’une extrême douceur, entre deux hommes ayant subi le traumatisme des corps. Entre les deux, un homme qui a perdu ses repères, qui refuse de se voir (quasiment), qui cherche l’amour aussi désespérément qu’il cherche à retrouver un corps, une conscience de qui il est véritablement en dedans. Et qui tombe, quasiment simultanément amoureux des deux hommes.

S’impose alors le choix. Doit-il rester auprès de Ferréol, concret, qui petit à petit tisse des liens autrement plus développés que simplement physique avec lui, ou doit-il choisir Manoé, cet homme qui semble le compléter à merveille mais qu’il n’a jamais touché et qui lui ne l’a même jamais vu ?

Casse-tête.

Gabriel Kevlec, s’il parlait déjà d’une forme de violence dans Cordons, celle du rejet, autant d’une homosexualité que de celle de l’accepter entièrement, réitère, mais de façon inédite, celle-ci suite à une agression qui n’a pas détruit que des tissus organiques. Ce postulat de départ, plaçant Samaël dans une posture de victime (quand bien même cet état n’est pas exprimé par la fameuse victime, donc qui ne joue jamais le pathos mais qui restitue, par fragments, la violence du passage à tabac), offre à l’auteur l’opportunité d’imaginer ce que peut vivre une personne qui a frôlé la mort.

Avec une justesse assez terrifiante, il nous place au plus près des affres de Samaël, de cette dualité entre l’envie de vivre à nouveau de façon simple (il rêve de corps à toucher, que quelqu’un touche le sien, d’amour, mais aussi d’une normalité simplement méritée) et de rester caché à la vue de tous.

Petit à petit, le papillon sort de sa chrysalide par l’entremise de deux amants. Son incapacité à choisir le place dans une situation qui le propulse une nouvelle fois dans une violence intime, morale, car un choix, fatalement, « détruira » l’un de ses amants, chose à laquelle Samaël ne peut se résoudre. Dans sa tête, le casse-tête ressemble à s’y méprendre à une torture mentale, qui lui jouera là aussi de vilains tours. D’autant que les mots, très présents et très très importants dans ce roman, peuvent être, même involontairement et de façon presque anodine, être aussi tranchant que n’importe quel couteau.

Heureusement.

Fort heureusement, il y a l’amour. L’amour que l’on vit au creux de la poitrine et l’amour des corps qui se frôlent, s’emboitent, se reconnaissent. Cet amour, contrasté entre sa version physique et sa version cérébrale permettra néanmoins à Samaël de retrouver « corps » dans la réalité. Il laissera peu à peu tomber ses barrières, aidé en cela par ses deux amants.

La fin du roman lui donnera raison quant à ce choix si complexe. Avec un art du suspens et de l’écriture allant au plus près de la moelle de ses personnages, Gabriel Kevlec parle simplement de la vie, de ses brisures, de ses espoirs, de ses doutes et de ses victoires. Si la langue est aérienne, elle plonge souvent sa plume dans les viscères, nous montrant le côté organique d’un sentiment qui pourtant se situe quelque part entre le cerveau et le cœur.

Jamais manichéen, dévoilant des personnages pleins d’intelligence (émotionnelle, corporelle), l’auteur nous réconcilie avec l’espèce humaine qui, si elle est capable d’atrocités comme battre un homme à mort à cause de son orientation sexuelle, est encore capable des plus belles déclarations d’amour.

Infos

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