[BD] NANCY PEÑA, Le chat du kimono (éd. La boite à bulles)|[
À la poursuite du kimono
Une femme à la beauté intemporelle est convoitée par un artisan des kimonos. Il ne peut souffrir qu’elle ne lui appartienne pas. Elle arbore un somptueux kimono avec des chats peints par l’artisan. Il poursuit la belle de ses ardeurs, et sa passion dévorante le pousse à toutes les extrémités. L’un des chats du kimono s’échappe et va alors tout faire pour retrouver son tissu perdu. Il rencontrera une galerie de personnages étranges et fantasques, dont un célèbre duo de détectives et une jeune fille rêveuse adorant passer de l’autre côté du miroir.
Légende à tiroirs
À partir d’une légende japonaise mystérieuse et fascinante, Nancy Peña nous offre une multitude de pistes. Elle joue avec nous, nous livre une voie pour mieux nous piéger par la suite, nous offre des dessins qui mêlent les contrastes avec efficacité. Les formes s’épousent, se mélangent et se confondent dans un joyeux kaléidoscope noir et blanc.
Le chat du kimono nous tient en haleine, nous emmène dans les pattes d’un matou facétieux et mu par son désir de retrouver sa place sur un kimono mythique. Les tiroirs de l’intrigue se succèdent à un rythme effréné et nous entraînent dans une valse à mille temps. Heureusement, les pages entièrement noires à la fin de chaque acte nous permettent une respiration, un peu comme les fondus enchaînés au cinéma. Les cadrages en BD font souvent penser au septième art, et la BD qui nous chavire aujourd’hui participe de cette porosité entre les arts, dont nous vous avons déjà parlé maintes fois dans nos chroniques.
Ode au rêve
Le rêve, l’étrange et l’incongru se conjuguent ici avec aisance, et nous ne nous étonnons pas que ce chat quitte son kimono pour vivre des aventures rocambolesques. Nous sommes alors clairement dans le merveilleux au sens littéraire du terme. Le monde qui nous est présenté est empli de magie, et nous acceptons cette magie, car elle semble la norme dans cet univers qui navigue entre exotisme et légendes d’antan et vieille Europe peuplée d’individus noyés dans des préceptes surannés ou des vapeurs de narguilés.
Cette BD nous ravit l’âme et le cœur grâce à la qualité du dessin, au jeu perpétuel entre ombre et lumière. Un véritable jeu du chat et de la souris se met en place, et je peux vous dire que nous sommes la souris dans cette histoire à l’encre élégante et au scénario réglé comme du théâtre japonais Kabuki. Nous avons plaisir à nous draper et à nous fondre dans ces kimonos mystiques.
Pour conclure
Le chat du kimono est une bulle de voyage et de liberté. Elle nous transporte, nous téléporte même dans un monde de motifs vénérables, de traditions séculaires, de clins d’œil à des personnages littéraires berçant notre patrimoine immuable.
Le chat chaloupe et nous propose un charivari d’impressions d’estampes séculaires, de protagonistes mythiques et de légendes entêtantes. Une invitation à larguer les amarres et à voyager aux confins de nos rêves mirobolants. Suivez sans hésiter les pattes de velours d’un félin espiègle et roublard.
FLORENT LUCÉA
Le chat du kimono de Nancy Peña, La Boîte à bulles, 104 pages, janvier 2007
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Florent vous donne rendez-vous à la rentrée avec des nouvelles chroniques BD. En attendant, vous pouvez relire sa dernière en date, Le voyage de Marcel Grob
Florent Lucéa a rejoint l’équipe Litzic. Il chronique pour vous les BDs qui lui ont tapé au coeur et à l’oeil. Peintre, dessinateur et auteur protéiforme, il apporte son regard à la fois curieux et pertinent sur ce que l’on nomme communément le Neuvième art. Il a été notre auteur du mois en mai 2019.
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