22-12, de Générale Pery à Beach Scvm
Nouvelle sélection musicale du vendredi 08 avril.
Cette playlist 22-12 est bien plus consciente qu’il y paraît au premier abord. Derrière des musiques souvent enlevées, joyeuses, des propos plus sombres surgissent, marquant un décalage qui s’avère le plus souvent payant. Trois exemples jalonnent ce fait dans cette sélection qui, on l’espère, n’en est pas moins divertissante et plutôt optimiste.
GENERALE PERY
Attention, morceau fort ! Quand le monstre éducation nationale sévit, il n’y va pas de main morte. Il faut dire que tout « client » dépassant du cadre imposé doit être maté, pour bien rentrer dans la case qui lui est allouée. Cela est souvent fait au détriment de l’enfant, premier concerné, et de ses parents, eux aussi au premier plan. C’est ce que raconte en substance Enfant à problèmes de Générale Pery qui y raconte le parcours semé d’embûches d’un petit bout dès son entrée en maternelle. Et ce petit bout n’est autre que le frère de la chanteuse Générale Pery (Perrine Megret de son vrai nom).
Accompagné de son acolyte Le programmeur (Antoine Lefort), Générale Pery propose une pop urbaine et électronique consciente, qui presse et nous rejette dans les cordes. Voix saccadée marquant le mal-être, musique heurtée comme symbolisant les tourments internes, Enfant à problèmes est criant de vérité, de sincérité et nous donne simplement envie de refondre un système qui oublie toute humanité. Pourtant, des êtres humains font ce système, des êtres humains épuisés, dévalorisés eux-mêmes (par un état qui n’y met pas les moyens) dans ce pourtant noble métier qu’est celui d’apprendre à des enfants les bases de toute vie en société.
Électrochoc, coup de poing, ce morceau émouvant montre aussi que l’on peut s’en sortir. Chapeau au petit bout qui a grandi, qui n’a pas méprisé l’école comme elle l’a méprisé. Le plus intelligent est tout désigné.
ZIRAH MAERI
Baby It’s Over est le premier single de Zirah Maeri et marque déjà une esthétique forte. Passons sur le look androgyne de la chanteuse nous faisant irrémédiablement penser à celui d’une certaine Patty Smith, tout se joue (également) ailleurs. Dans une attitude, certes, dans un son aussi. Celui-ci est rock, direct, sensuel, légèrement agrémenté d’une touche blues, et de ce petit parfum propre au Summer of love et d’un groupe comme Jefferson Airplane (la présence vocale évoque un peu celle de Grace Slick).
Pour le reste, ça déroule avec passion, sur une basse ronde, sur une impulsion sanguine qui ne manque jamais de panache. La voix est impeccable, vibrante, féline, avec ce très léger trémolo qui lui donne une expression un peu old school du plus bel effet. Enfin, le refrain, d’une rare efficacité, agit comme un révélateur de passion. Dur de rester de marbre à l’écoute de ce premier single qui annonce forcément une suite électrisante.
YMNK
Derrière l’électronique, un homme. Un homme qui bricole ses claviers, qui bricole aussi ses images, et qui produit une musique étrangement addictive, qui laisse voir, derrière des sonorités rétro futuristes, une musicalité sensible, bien plus riche qu’il n’y paraît. Petit à petit en effet, se construit devant nos oreilles le thème de Water, à la fois soluble et insoluble, liquide et solide donc, mais toujours ondoyant, nous berçant dans un rêve ensoleillé, cocotier et vagues bleu turquoise, où les rêves se noient sans qu’on ne perde pied.
Bien sûr, on danse, le groove nous y invite, mais si on écoute plus attentivement, à corps reposé, la progression du titre devient hypnotique. Les apports en patte de mouche donnent une dimension plus dense à Water, finissent par remporter la donne, et nous enivre, nous fait tourner la tête comme une pina colada dégustée en plein soleil. Et on en reprendrait bien une deuxième, soit dit en passant, tant l’ivresse provoquée est grisante.
BRISEBARD
Brisebard fait absolument le genre de pop dont on se réjouit de la sentir s’infiltrer dans nos tympans. En effet, comme un médicament, elle fait du bien à l’organisme. En français dans le texte, elle propose une vivifiante poussée d’hormones, celles du plaisir, avec ces rythmes légers et ces motifs joyeux. En 3’20, en reprenant certains codes aux yéyés et à la pop du swinging London, Brisebard nous propose un voyage dans le temps qui a oublié d’être bête.
Et il nous pose la question, toujours délicate : Est-ce ça l’amour ? Parce que, finalement, quelle réponse donner à cela ? Quand on est amoureux, on est à la fois heureux et triste, optimiste et pessimiste, le cœur bouillonne et cherche des nouveaux repères. Et nous, au milieu, tout perdu, on avance tant bien que mal, sans véritablement savoir où nous allons. Mais l’amour, ce sentiment unique, vaut malgré tout la peine d’être vécu, non ?
Ce titre referme l’EP Cul et chaise, toujours disponible. Et si vous désirez voir Brisebard en concert, sachez qu’il sera le 30 avril à La Pointe Lafayette (Paris) ainsi que le 25 juin à La Magnifique Society (Reims).
NOVA TWINS
Parce que ça ne fait jamais de mal par où ça passe, Cleopatra nous propose une percée dans l’univers électro rock de Nova Twins. Les lignes de chant sont percutantes, autant que le flow bien velu qui nous plaque le dos contre notre fauteuil, en même temps qu’il nous gifle avec conviction. On ne reste jamais insensible quand on nous prend pas les sentiments, ce que font ces jumelles à la personnalité explosive !
YVES JARVIS
Qu’est-ce qu’on aime cet artiste. A chaque nouveau single, nous retrouvons sa patte, mais exprimée d’une façon totalement inédite. Se réinventant constamment mais à peu près toujours avec les mêmes éléments, il nous embarque dans son univers qui dégage immanquablement une forme de douceur et d’honnêteté. C’est une nouvelle fois le cas avec Bootstrap Jubilee extrait de The Zug, son nouvel album à paraître en mai chez Anti-. Et on le répète, c’est une des artistes que nous apprécions le plus depuis quelques années. Alors n’hésitez surtout pas à la découvrir !
BEACH SCVM
La sortie de leur premier album se rapproche à grands pas. C’est donc le bon timing pour Beach Scvm pour présenter son nouveau single. En quatre panneaux, celui-ci met en « relation » les différents personnages que l’on retrouve, du moins pour 3 d’entre eux, sur le précédent clip du groupe, à savoir celui de Monday, avant qu’un ultime clip s’intercalera entre eux le jour de la sorti de l’album, révélant la fin de ce triptyque de clip.
Si musicalement le titre se montre plutôt léger, enjoué, les mélodies chantées sont elles légèrement plus teintées de mélancolie, et surtout de doute. Car ce titre n’est qu’une affirmation de celui-ci, de l’anxiété qui parfois nous empêche d’aller vers l’autre, par crainte d’être rejeté, par crainte aussi, parfois, du regard des autres. Alors, on se saborde, même si notre désir nous criait le contraire.
Toujours gorgé de sens, derrière des apparences joyeuses, souvent catchy, Beach Scvm montre une maturité surprenante et l’annonce de Blooming point, qui arrivera le 27 mai prochain, s’avère une très bonne nouvelle. On vous en reparlera à coup sûr !