Chronique musique EP-mini album
Des EP de folie (déjà dispo ou à venir !)
Petite sélection de minis albums
Nous vous dévoilons une petite sélection d’EP de folie. On revient sur certains d’entre eux déjà sortis (Lary Kidd, NSDX, Jane Doe et Red Nobilis) et sur d’autres qui ne vont pas tarder à sortir (SOS Citizen, After Geography).
LARY KIDD
Retour du rappeur canadien Lary Kidd, avec son nouvel EP Vulgaire démonstration d’ignorance. Quel titre d’opus, une nouvelle fois, pour cet artiste qui mêle dans ses textes anglais et français avec une dextérité infernale, comme s’il créait son propre langage, avec forcément les images et la poésie qui vont avec. Mais cette fois-ci, contrairement à son opus Le poids des livres, il n’est pas seul aux commandes de ce 6 titres dense, vibrant de soul, aux couleurs dingues, où l’urbain se mélange à la classe nord américaine à mi-chemin entre les deux « coast » américaine et la motown.
Lary Kidd met cette fois-ci des artistes tels que Loud, 20some, Le Ice, Imposs et Mike Zup à l’honneur, tout en gardant près de lui des fidèles, Ruffsound (musique, réalisation et arrangements), Ajust (enregistrement), ainsi que Stack Moolah (musique). Il dit d’ailleurs, à propos de son EP et de ses collaborations : « Ce sont tous des artistes que je respecte beaucoup. Le projet n’est pas que all about me». Preuve d’une certaine noblesse d’esprit, d’une modestie également (elle se traduit aussi par des « anti ego-trip » dans lesquels il dit se remet lui-même à la place qui est la sienne).
Niveau texte, il perpétue ce que nous avions découvert dans Le poids des livres, à savoir une critique lucide (bien que parfois nébuleuse, ce qui est bien évidemment un choix artistique) d’une société de l’ego, de l’image, souvent vide d’intelligence. Le flow est une nouvelle fois impeccable, les punchlines mordantes. Ces visiteurs ne sont pas en reste, et leur timbre de voix apporte un contraste des plus intéressants avec le timbre plutôt « aigu » de Lary Kidd. Une nouvelle fois, cet EP est une démonstration de force, de maturité, et surtout d’un talent énorme.
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SOS CITIZEN
Hiver. Il fait nuit au levé. Sortie de boulot, dans la nuit, aussi. Entre les deux se succèdent brouillard matinal qui s’étire jusqu’au midi, succession d’averses de diverses intensités, froid, et passages nuageux. Ciel de cendre, tout manque cruellement de soleil. Même les oiseaux hésitent à chanter. Morosité. SOS Citizen sort un EP en février qui refoule toute cette grisaille aux oubliettes. Sa pop multicolore réchauffe les os, évoque un London qui n’aurait pas renié le Swinging au profit du brexit.
Mini-jupe, Austin mini, fleur dans les cheveux, chemises bariolées, voix féminine légère comme une caresse, compositions pleines de bonne humeur, de guitares mi-douces mi-mordantes, de claviers pimpants comme un soleil de printemps. Birds are now singing again dans les parcs et les cœurs. 5 titres, pas plus, suffisent à faire fleurir les sourires sur les visages, à mettre du peps dans les cœurs alanguis, à faire danser la vie, sous la pluie, le brouillard, peu importe. Efficace remède à la mélancolie, la douce nostalgie du combo, moderne dans son traitement et anglais jusqu’au bout des boots, le groupe, français, mérite les honneurs de trio le plus lumineux de ce début 2022.
Le groupe sera, si tout le permet, au Supersonic le 28.01. L’EP sera disponible le 24 février chez Le Cèpe records
Revoir Juliette
NSDX
Rock et contestataire, Conforme de NSDX dresse un portrait de la société et de l’Homme du XXIe siècle, pas très enthousiasmant à la vérité. Comme s’il se diluait, cet homo 2.0, dans la vacuité numérique d’un monde sans repères (ou les ayant oubliés au fur et à mesure des désillusions) où l’injonction à la consommation paraît être le seul modèle de conformité. Déjà évoqué en ces pages, ce titre s’inclut dans un EP où le spleen de NSDX fait des étincelles.
En 4 titres, il revient sur les relations humaines et intimes à l’heure des remises en cause et de l’éveil à soi et à l’autre. Romantique, conscient des lacunes inhérentes à chacun au moment où les bilans sont dressés, NSDX parvient à émouvoir sans pathos, agrémentant ses propos d’éclairs électriques, arc et flèches de cupidons déchus traînant dans la poussière, de rythmiques oscillant entre tension et apaisement. Rappelant un groupe comme Eiffel, ou Noir Désir dans une certaine mesure, sa langue ne louvoie pas pour exprimer avec sincérité, sans œillères, la difficulté à être simplement en phase avec ceux qui nous entourent.
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After Geography.
After geography propose un rock d’inspiration 70’s, fortement anglo saxon, hésitant à trancher entre révérence à sa gracieuse majesté Les Beatles et à la crise libertaire Flower power du Summer of love, du côté de Frisco. Se ressentent les ombres de Big Brother, de Joplin, des Beatles, des Stones aussi, pourtant le groupe est français. N’ayant rien à envier à la concurrence actuelle, jouant crânement sa chance en version duo, le groupe présente Mr Rain et démontre qu’il possède là un art de la composition ne laissant aucune place à l’approximation, sans pour autant sonner calibré par une quelconque entité supérieure.
Sachant rester original tout en recyclant une pop « ancestrale », un blues groovy (sur le morceau titre), et rock vintage, le groupe fait forte impression, fout les poils, met des guilis dans le ventre, et peint un sourire pas du tout de façade sur les visages barbus (ou imberbes) et dans les chignons de ces dames. Cet EP, sexy en diable, semble être la première marche, franchie avec allégresse et légèreté, d’un futur grand groupe (pourquoi pas un Foxygen frenchie ?).
JANE DOE
Voyage en terre folk. Jane duo, groupe là aussi français, mais s’exprimant sur cet opus exclusivement en anglais, a sorti fin octobre un 6 titres, Who’s the sinner ?, simplement envoûtant, à la croisée du blues, de la country, le tout en très grande partie acoustique, jouant qui plus est sur le canevas de voix féminines s’harmonisant au gré des ambiances. L’ensemble est boisé, souvent aérien, émotionnellement sur la corde (de guitare, de luth oriental, basse) sensible. La profondeur émane des compositions, subtile, et de cette magie propre aux voix qui s’entremêlent et dégagent une vérité ancestrale et universelle.
La production aide à entrouvrir un peu plus largement les chakras de l’ensemble, jouant sur des basses rondes, accueillantes, là où les seules cordes auraient pu rendre l’ensemble un peu trop cristallin et potentiellement un peu rebutant. L’absence de batterie ne plombe pas les rythmiques, bien au contraire, celles-ci semblant s’éveiller d’un long songe et mettre le monde d’aplomb, avec douceur et constance. L’envie de s’installer confortablement pour écouter ce disque saisira l’auditeur qui se perdra dans l’univers du groupe, laissant vaquer son imaginaire dans de vastes paysages, luxuriants, généreux. Une belle découverte, hors du temps, mais incroyablement salutaire en cette période trouble qui n’en finit plus.
RED NOBILIS
Virage pop rock avec ce chanteur inspiré par la scène britannique, et notamment, au niveau du chant, à un groupe comme Muse, Red Nobilis déroule un EP 5 titres démoniaques. Nommé Slice of life, il montre un savoir-faire mélodique de très belle facture. Bien que reposant sur des compositions d’aspect relativement classique (couplet refrain pont), il alterne les climats. Tantôt apaisés, voire aériens grâce à des nappes de clavier par exemple (rappelant là aussi Muse), tantôt plus mordants (la guitare possède un fort joli son), ces sautes d’humeur permettent de ne jamais sonner creux et de maintenir celui qui écoute sur le qui vive.
Il ose aussi s’approcher de compositions plus folk (Tori par exemple), ou desert rock/latine (Everything goes down, même si le chant apparaît un peu hasardeux, ce qui n’est paradoxalement pas sans charme), en privilégiant là aussi les mid tempos expressifs, souvent portés par des lignes de chant qui s’ancrent de façon définitive dans notre cerveau. Un superbe travail d’arrangement rehausse l’ensemble, lui conférant une certaine noblesse, plutôt romantique. Petit crush pour le titre I hate to decide, qui n’ait pas sans évoquer, lui aussi, Muse. Un beau travail, du début à la fin.