LARY KIDD, Le poids des livres, littérapée.

Larry Kidd le poids des livresEP paru chez Coyote Records.

Ce n’est plus trop une révélation, mais le hip-hop et nous, ça fait deux. Et puis nous ne sommes pas forcément fans de l’accent québécois. Ce constat posé, nous aurions pu croire que Lary Kidd n’avait rien pour nous séduire. Et pourtant, il nous terrasse avec son ep 5 titre Le poids des livres, paru chez Coyote Records.

Qu’est-ce qui fait que ce rappeur nous fait un tel effet ? Un amalgame explosif entre lyrics puissants et musicalité de ouf. Un peu comme si Lary Kidd retournait à la source, old school, presque hors courant (pas de trap ici), pour un résultat éblouissant. À classer directement dans notre panthéon des musiques qui peuvent nous faire changer d’avis sur un style musical dans sa globalité.

Nous avions dévoilé son titre Feu roulant dans une de nos récentes playlists également, titre nous ayant tout de suite envie de nous plonger plus avant dans l’univers du MC.

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Qui est Lary Kidd ?

Lary Kidd (un seul r à Lary) est un chanteur qui a sorti en 2017 Contrôle et en 2019 Surhomme. Il a aussi évolué dans un groupe répondant au nom de Loud Lary Ajust Ajust (Ajust étant, sur l’EP, à la réalisation musicale). Le poids des livres est ainsi la suite de son parcours en solo, une continuité à son œuvre. Lary Kidd (Laurent Fortier Brassard de son vrai nom) nous propose donc ici un EP qui ne manque pas de jouer avec les mots, avec les langues, avec un flow absolument impeccable, en miroir à un univers musical piochant ses thèmes dans la soul américaine.

Évidemment, les mots font mouche. Parce qu’ils possèdent un pouvoir évocateur fin et puissant, nous content la vie de leur auteur, mais également celle d’une société qui évolue, pas forcément dans le bon sens du terme. Les deux sont liés, toujours, prise de conscience individuelle au sein d’une collectivité dévoilant un regard perçant sur le monde.

Même s’il nous manque parfois quelques références quant au fait que le musicien soit québécois, et que notre culture rap laisse fortement à désirer, nous percutons sur la totalité de l’EP qui possède ce côté universel, que nous soyons francophones ou pas d’ailleurs. La musique de Lary Kidd en effet pulvérise les frontières des genres, des styles, des nationalités également.

Un œil perçant.

Ce qui nous épate dans Le poids des livres, c’est cette acuité qui met les choses à plat. Pas d’ego trip boursoufflé, pas de bling-bling de mauvais goût, mais au contraire une forme de sincérité qui émeut. Pourquoi ? Parce qu’on sent un type dont la sensibilité à fleur nous parle, sans gros effet, ou en tout cas jamais grossier. Grossier dans le genre grosse ficelle, genre effets téléphonés. Non ici, la finesse est de mise, tant sur le choix de mots que sur celui des samples, le tout aidant à poser une ambiance à la fois urbaine mais aussi plus intimiste.

Comme dit plus haut, nous avons dans cet EP un équilibre entre constats sur la société et sur le regard que le rappeur se porte à lui-même, tout cela en étant à la fois incisif et doux (dans le genre mise à nu intimiste), arrogant (qui balance quelques vérités bien senties, même si l’on sait qu’elles ne sont pas toutes bonnes à dire) et presque désinvolte. Forcément, si le flow n’allait pas de paire, tout tomberait à plat, mais ici, il possède une musicalité complémentaire à la propre musique des paroles (et de leurs images) et de celle des samples.

Le passage du français à l’anglais au sein de la même phrase parfois donne un dynamisme incroyable à l’ensemble, une présence à la fois fluide et qui nous marque doublement. Et puis dès que des mots sonnent inconnus à nos oreilles, ils nous invitent à justement à nous (re)concentrer à plein régime. Ainsi, Lary Kidd aiguise notre curiosité et, même au bout de 10 écoutes successives, nous découvrons des éléments à côté desquels nous étions passés.

Puissant.

Si la littérature possède en son cœur des univers infinis, si la musique est source incontestable de frissons émotionnels perpétuels, cet EP lie les deux dans un environnement qui ne peut que nous mettre à genoux par la force de ses évocations. On fait alors fi qu’il s’agisse là de hip-hop, que Lary Kidd possède un accent qui d’habitude parvient à nous rebuter, et nous plongeons corps et âme (et oreilles) dans cette prose sans défaut et cette musicalité « à l’américaine » qui réveille notre imaginaire.

Si nous ne devons écouter qu’un seul album de rap cette année, il s’agira de cet EP. Absolument parfait dans son fond et dans sa forme, Le poids des livres possède également le bon goût d’avoir un titre qui, forcément, nous parle profondément. Il y a le poids des livres, il y a aussi le poids de la musique.

La boucle est bouclée de façon parfaite.

Génial.

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