[ENTRETIEN] HEPTANES FRAXION, La poésie pour tous.
La poésie n’est pas élitiste.
Nous nous sommes entretenus au téléphone avec Heptanes Fraxion. Cet entretien, enregistré, servira pour une émission qui sera diffusée à la rentrée de janvier sur radio-activ, néanmoins nous voulions revenir sur un aspect important de celui-ci, à savoir que la poésie est un art que doit ce réapproprier un peu tout le monde. La poésie pour tous, loin d’une image élitiste imbuvable, qui retransmet la beauté de toute chose du quotidien.
Un peu de la même manière que la philosophie, la poésie est utilisée par une certaine sphère intellectuelle un peu déconnectée et barbante, en tout cas élitiste à en vomir (souvent). Elle est encodée de façon parfois cryptique, ne reflète qu’une beauté que l’on veut bien voir. Cette beauté, elle n’est pas agressive, elle ne remet finalement pas grand-chose en question et, d’une certaine manière, ne reflète pas une certaine frange de ce que vit la population. Notre discussion a porté sur ces lettres de noblesse qui, parfois, rebutent le quidam, effrayé par une langue qu’il ne comprend pas.
La poésie des instants.
Alors, à l’image de ce que peut proposer Heptanes Fraxion dans ses recueils ou sur son compte fb, la poésie est une histoire d’instant, celle que l’on chope au vent, en observant, avec un tant soit peu d’acuité, ce qui nous entoure. Pas forcément et uniquement dans un musée, dans un endroit féérique, mais également dans un entrepôt où le préparateur de commande s’échine le moral à empiler des colis les uns sur les autres à une cadence infernale. Il peut y avoir une poésie du geste, de la tâche répétitive, un éclairage particulier qui suscite une émotion au moment même où le cerveau, laissé au vestiaire, retrouve sa place dans la caboche de l’ouvrier lassé par le geste.
Cette histoire d’instant est importante. Il peut s’agir d’un contre-pied à ce que nous ont enseigné des professeurs (peu inspirés) au collège qui, se basant sur des classiques ayant fait leurs preuves, accablent le scolaire par son écrasante présence parfois monstrueuse. Lourde, engoncée dans un siècle des Lumières depuis longtemps révolu mais qui parce qu ‘il a existé empêche le siècle des « Obscurs » d’avoir droit de citer, cette poésie éloigne déjà tout un pan de la population qui ne comprend pas ce qu’elle raconte ou, pire, estime qu’elle ne s’adresse pas à elle.
Pourtant, des auteurs plus récents, plus « vivants » permettraient à des jeunes de comprendre que la poésie, ce n’est pas seulement une abstraction, mais également une réalité.
Poésie du concret.
Nous ne disons pas qu’il faut brûler les idoles du passé, mais simplement dire qu’il existe d’autres poètes, plus en prise avec le monde qui est le nôtre aujourd’hui. Dans ses poèmes, Heptanes Fraxion, qui, comme il l’a dit dans son interview à repris pied dans cet univers grâce à Cendrars et Bukowski, s’inspire de ce qui l’entoure, le beau, le laid, le transforme à sa guise, en module la matière, s’affranchit des codes, pour imposer des couleurs, des rythmes, des punchlines, des sentences sous une forme, ou une autre, mais qui déclenchent immanquablement une émotion.
La démarche d’Heptanes Fraxion est celle d’une liberté. Liberté retrouvée allions-nous dire, mais il n’en est rien, elle n’était pas perdue, elle était juste en sommeil, plongée dans une léthargie que l’école ne parvenait pas à électriser. Avec les exemples de Bukowski et Cendrars, c’est comme une forme d’autorisation tacite qui est transmise : peu importe la fond, la forme, la poésie est (ou peut être) personnelle et exprimée comme telle, c’est-à-dire en envoyant valdinguer les convenances, les codes, les injonctions.
Poésie liberté.
Ainsi, la poésie d’Heptanes Fraxion est celle d’une liberté. Elle n’attend rien, cette liberté, dans les sens où il, avant de réaliser qu’il avait un lectorat, écrivait pour lui, obstinément, comme si sa vie en dépendait. Et d’ailleurs peut-être en dépendait-elle, dans le sens où, d’une certaine façon, métaphysique presque, nous avons un rôle à jouer dans cette vie, il jouait la sienne. Avant de publier, il sculptait ses mots, ses phrases, aiguisait ses sens, sans réclamer de reconnaissance, saine ou malsaine.
Et puis il a publié ses écrits. Et puis il a développé ses mots, sous des formes diverses, poésie écrite ou rappée/spoken wordée, sur musique électro ou rock, mais toujours avec ce compas dans l’oeil qui pointe une réalité jamais toute noire (ni toute blanche). Maux de l’âme et mots de l’amour, parfois vachard, c’est une poésie qui remue et étale sur sa palette des déclinaisons de sentiments s’entrechoquant au rythme d’un langage qui lui est propre, épris d’une liberté qui devrait être un bien commun tous. Car c’est cela que nous retenons de cet entretien, celui de suivre sa route et d’infuser dans ses écrits une liberté sans codes autres que ceux que nous nous imposons nous-mêmes, en notre âme et conscience.
relire le portrait d’Heptanes Fraxion, auteur du mois de novembre et relire son poème Trampoline des émotions contradictoires. Relire également la chronique d’Errer me muscle, son recueil de poésie, la première partie de son interview et la deuxième partie de son interview, relire la chronique de Mina
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EXCLU ; Interview d’Heptanes FRaxion autour de son travail. Diffusé dans l’émision B.O.L que nous animons sur radio-activ !