[BD] JOE TODD-STANTON, Léo et la Méduse//mythofantaisiste
Une invitation mythofantaisiste
La famille Vieillepierre possède un arbre généalogique impressionnant. Ce quatrième opus, Léo et la méduse (de Joe Todd-Stanton, paru chez Sarbacane), nous fait découvrir le jeune Léo qui a vécu au temps de la Grèce antique. Cet amoureux des créatures fabuleuses n’a qu’un but dans la vie : préserver ces amis fantastiques. Hélas, la présence de ces êtres hors-norme, souvent bien encombrants pour le commun des mortels, pose un réel problème de cohabitation.
Léo va devoir déployer toute son ingéniosité pour permettre à ses insolites compagnons de continuer une existence paisible et satisfaire les exigences divines de la déesse Athéna, qui n’est pas connue pour sa clémence légendaire. Sur sa route, il rencontrera un bestiaire incroyable et une jeune fille sensible à la cause des légendaires. Léo réussira-t-il sa quête héroïque tout en conservant son intégrité morale ? Vous le découvrirez en vous jetant dans les méandres olympiens de cette BD jeunesse magnifique.
On ne bulle pas, on se bouge !
La disparition des bulles dans cette BD ne dérange nullement la lecture, puisque je ne le répéterai jamais assez dans mes chroniques : le neuvième art est divers. Tout est possible, tout est permis, inutile de suivre des règles étriquées, vive la liberté de créer sans limites, sans frontières et sans carcans !
Léo et la Méduse ne fait pas exception à ce courant qui souffle sur la BD mondiale. Ici, la mythologie est revisitée et saupoudrée de couleurs sublimes et de personnages traités avec douceur. Aucune scène agressive, aucun combat, juste une sphère de divertissement et de bonne humeur. Nous adhérons tout de suite à cet univers décalé, à cette uchronie (œuvre revisitant une époque historique) mythologique qui nous emmène sur une autre route que la route homérique maintes et maintes fois adaptée au cinéma, en bande dessinée ou en livres pour adolescents tels les Percy Jackson et comparses.
Message subligénial.
Nous sommes dans une BD jeunesse, nous nous amusons comme des petits fous, nous replongeons dans les mythes avec plaisir, mais nous ne nous endormons pas sur nos lauriers de divertissement. J’ai toujours eu une grande admiration pour les œuvres jeunesse, sans penser un seul instant qu’elles étaient de moindre importance, car destinées soi-disant aux enfants. Lorsqu’une autrice/un auteur écrit pour la jeunesse, elle/il s’adresse en réalité à tous les publics. Un enfant est une personne à part entière et l’on se doit de le respecter. Inutile donc de s’adresser aux jeunes en édulcorant les sujets que l’on souhaite traiter.
Joe Todd-Stanton, l’auteur de Léo et la Méduse respecte infiniment les enfants, parce qu’il livre un message universel et positif dans sa création. En effet, le jeune Léo doit exterminer des « monstres », mais ces créatures en sont-elles vraiment ? Ne sont-elles pas plutôt victimes de l’ignorance des gens qui rejettent et condamnent ceux qui diffèrent d’eux ? Or, la différence ne doit ni être condamnée ni provoquer la marginalisation de la personne qui n’est pas comme nous. En apprenant à connaître l’autre qui diffère de soi, ne devenons-nous pas plus riches au final ?
Pour conclure
Léo et la Méduse réunit tous les ingrédients d’une BD familiale qui pourra être l’occasion pour les parents et leur progéniture de discuter autour de la différence. La métaphore de ces créatures fabuleuses mises au ban de la société à cause de leurs étranges mœurs ne peut que toucher les adultes comme les jeunes qui sont de plus en plus confrontés à des phénomènes de harcèlement, à l’école, comme ailleurs et à des idées préconçues sur telle ou telle personne.
L’ignorance, le jugement rapide, la médisance et la diffusion de messages de haine sont à combattre avec force, et le neuvième art comme les autres arts monte au créneau pour dire haut et fort que la différence est une richesse. Je trouve que Léo et sa Méduse nous rejouent un peu la relation entre le Petit Prince et son renard.
« Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis, » écrivait Saint-Exupéry. Cette phrase émaillera toujours mes chroniques traitant de la tolérance. L’auteur de Léo et la Méduse témoigne de cet adage. Cette œuvre nous prouve bien que les créatifs et créatives sont connectés d’une manière ou d’une autre dans la galaxie imaginative qui croit de manière exponentielle, ce qui est bien rassurant par ces temps troublés.
Léo et la Méduse, de Joe Todd-Stanton, série La famille Vieillepierre, Éditions Sarbacane, 56 pages, octobre 2020
Une autre BD de cette maison d’édition : Chinese queer
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Florent Lucéa a rejoint l’équipe Litzic. Il chronique pour vous les BDs qui lui ont tapé au coeur et à l’oeil. Peintre, dessinateur et auteur protéiforme, il apporte son regard à la fois curieux et pertinent sur ce que l’on nomme communément le Neuvième art. Il a été notre auteur du mois en mai 2019.
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