ANAËL CASTELEIN, Deum Deum (délire poétique)

anaël castelein deum deum

Poésie long format déjà disponible (éditions Ni fait ni à faire).

S’agit-il d’une nouvelle, d’une poésie ? Nous placerions Deum Deum d’Anaël Castelein au rang des objets littéraires mal identifiés, ce qui fait que son charme n’en est que décuplé. Nous qualifierions ce livre comme une nouvelle poétique au long cours, une histoire avec un début un milieu une fin, le tout étant légèrement dérangé et d’une redoutable acuité sur le monde qui est le nôtre, en particulier celui de l’entreprise.

Il est assez dur de résumer en quelques mots ce livre. Deum Deum, c’est le surnom de Vincent Deumelemester, décrit en ces mots :
« Plus fort qu’un éléphant qu’un hippopotame
qu’un éléphant qui s’associe à un hippopotame
à dix hippopotames
c’est toi
c’est toi Deum Deum
le D du poing américain mâchoire à caillasse
le casse-biDoche le Détronche
du viDe-Douille de la Drille-Décapeuse
plus fort que ça c’est toi »

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Accrochez-vous bien.

Ici, comme nulle part ailleurs, les idées fusent, de tous côtés, dans tous les sens. Associations d’idées, bons mots, jeux de mots pourris (aussi, mais c’est indispensable), la vitesse d’écriture d’Anaël Castelein peine à suivre la vitesse de son cerveau, de ses connexions inter-neurones à haute vélocité. Nous n’avons dès lors pas d’autre choix que de lire le livre d’une seule traite, de nous laisser emporter par ce tourbillon insatiable qui ne manque jamais d’égratigner celui qui s’y frotte s’y pique qu’il le veuille ou non.

Nous suivons donc la déambulation de Deum Deum, auprès de son cousin, auprès d’un vendeur sous cellophane, auprès d’un chef d’une start-up open space dont les employés « on dirait qu’on leur a greffé/un coussin péteur/ à la place du cerveau ».

C’est drôle et drôlement pertinent, c’est fun et c’est sidérant. Ça dénonce, par l’absurde, l’absurde qu’on ne dénonce plus, par habitude, par lassitude, parce que nous, on ne s’appelle pas Deum Deum. Oui, c’est un fait. Il y a une forme d’indignation, forte d’un vécu au plus près. Nous retrouvons un peu de Deum Deum dans son auteur, dans chacun de nous. Oui, c’est ça, c’est un fait, nous sommes tous Deum Deum, à plus ou moins grande échelle.

Critique ?

Mine de rien, ce poème est une virulente critique de la vie. De cette vie qu’on nous vend comme étant LA vie. Sans dévier vers un trip moralisateur, Deum Deum égraine des vérités qu’il faudrait faire pénétrer de force dans certaines caboches bien mal carrossées. Des petites valeurs, mine de rien, humanistes. C’est vrai, Deum Deum a beau être plus fort que « Poutine qui affronte un ours », il n’en reste pas moins un philosophe de l’existence.

« Alors Deum Deum se lance dans une grande tirade pour
attendrir son cousin au moyen de mots comme ils sortent de
son cœur tout guimauve antalgique
il a envie de lui expliquer que le monde ce n’est pas un tuyau
rose qui emporte les gens
et que se déguiser en dinosaure n’est pas une solution à tous
les problèmes »

Alors c’est quoi la vie ?

La vie, c’est une succession de moment, une accumulation de références, et tout ressort ici, mélangé à un bloubiboulga d’humour, de bon sens, d’observation et d’une imagination tout sauf bridée. C’est une histoire folle, de celle que l’on vit sous drogue mais qui serait clean. C’est un monde flashy ludique comme pour cacher sa propre misère. C’est le monde d’hier comme celui de demain, bref celui d’aujourd’hui. Un monde tape à l’oeil pixelisé à l’image de la couverture patchwork signalétique de l’objet qui en dit déjà long sur ce que renferme son intérieur (soit des tripes en noir sur blanc, formant des lignes à lire, et non à sniffer).

Voyage sensationnel au milieu d’un réel détraqué, Deum Deum nous fait autant rire que réfléchir. Nous fait penser quoi, chose qui s’avère être un danger pour ceux qui s’efforcent de tout nous mastiquer, de nous donner la becquée, pour qu’on suive le mouvement. Preuve que le rire, l’imaginaire, l’absurde sont encore et toujours des armes de destruction massive, celles des idées préconçues et des œillères que nous portons tous.

Essentiel.

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