[ ROMAN ] THOMAS DEGRÉ, Marie, 4 novembre 1943.

Chronique du roman Marie, 4 novembre 1943 de Thomas Degré (éditions ETT Dépendances).

Il y a des romans qui n’y paraissent pas, comme ça, de prime abord, mais qui dévoilent au fil de leur page une histoire qui aura un fort impact sur nous. Marie, 4 novembre 1943 de Thomas Degré est de ceux-là, de ceux qui nous touche profondément de façon indélébile. Il complète, de façon romancée cette fois-ci, le récit De Budapest à Paris relatant l’histoire de Thomas Degré, ou plus précisément de celle de son père Nicolas Degré.

L’histoire.

François est un homme de quarante ans qui, dès qu’il est amoureux, et que tout va bien sentimentalement dans sa vie, s’enfuit. Il a peur que ce bonheur le fui, alors il prend les devants. Ainsi, au cours d’une de ses « crises », il rompt avec Clara, sa petite amie. À la même période, son père subit un malaise qui oblige François à retourner chez lui, dans la Creuse. Là, dans une boîte à secret de son enfance, il retrouve une photo sur laquelle il figure avec 3 autres enfants dont il n’a aucun souvenir. Il ne tardera pas à découvrir qui ils sont et pourquoi il les avait banni de ses souvenirs.

Ce roman de Thomas Degré fait coïncider la petite histoire avec la grande, puisqu’il est ici question d’événements survenus durant la Seconde Guerre mondiale, dans la Creuse, ce département où la résistance était vive. Il met aux prises François avec son passé, expliquant pourquoi il fuit la femme de sa vie alors que tout semblait aller pour le mieux. Tout y est intimement lié par la force de l’écriture de Thomas Degré.

Déportation et amours enfantines.

Ils sont nombreux les livres s’étant inspiré de l’horreur de la Seconde Guerre mondiale, qu’il s’agisse des atrocités propres à toutes guerres, mais également à la barbarie nazie, notamment celle concernant les déportations et les exterminations de masse. Dans Marie, 4 novembre 1943, Thomas Degré relate, sur fond d’amours enfantines, le déchirement d’un enfant ayant perdu sa petite chérie de façon brutale et des implications de cette rupture contrainte sur les fondements de son existence de petit garçon, puis d’homme.

La plume de Thomas Degré paraît, à première vue, inoffensive, presque classique dans sa forme. Les descriptions y ont la vie belle, mais jamais au point de nous lasser. En effet, elles ont pour unique but de nous installer dans un environnement qui nous devient vite familier, notamment car Thomas Degré y dissémine noms de rues et de villages comme pour mieux nous implanter dans un territoire.

De la même façon, lorsqu’il il évoque les différents personnages, ceux-ci deviennent presque instantanément, pour nous, aussi proches que le sont nos voisins. Nous nous attachons à eux rapidement, à travers l’image qu’ils éveillent dans notre imaginaire. Le personnage principal nous est donc lui aussi très familier car nous n’avons aucun mal à nous identifier à lui. Cette trame familière est assez diabolique car, à la fin de l’histoire, l’émotion nous gagne de façon incoercible.

Entre empathie et révolte.

D’une part, nous entrons en empathie avec François et avec l’ensemble des acteurs (victimes) de cette époque plus que trouble, mais nous sommes aussi révoltés contre cette guerre à l’horreur indicible qui extermina un nombre incroyable d’êtres humains n’ayant rien demandé à quiconque. Certes, nous enfonçons des portes ouvertes mais, avec sa plume d’apparence anodine (ce qui démontre bien qu’elle ne l’est absolument pas), Thomas Degré réveille ce sentiment de dégout envers ces hommes et femmes qui participèrent à ces exterminations.

Ce réveil est d’autant plus fort qu’il entre étrangement en résonance avec les histoires d’aujourd’hui, celles, par exemple, de ces flux migratoires dont peu de nos politiques semblent se soucier à leur juste valeur. Aujourd’hui, comme en 1943, la bêtise humaine engrange des phénomènes inhumains comme celui qui nous pousse à faire comme si nous n’avions rien vu, à nous sentir indifférent alors que nous devrions tous nous révolter.

L’humanité qui coule de la plume de Thomas Degré nous heurte avec une violence non feinte, nous place un poids sur le cœur que seule l’innocence de nos enfants parvient à faire s’envoler. Marie, 4 novembre 1943, en plus d’être simple à lire, a le mérite de rappeler que tous les hommes naissent libres et égaux en droit, et qu’il ne faudrait jamais l’oublier.

marie 4 novembre 1943 Thomas degré

 

Retrouver le portrait de notre auteur du mois Thomas Degré ICI.

Retrouver l’extrait inédit Farçous, tripous et Marcillac de Thomas Degré ICI

Retrouver la chronique de De Budapest à Paris ICI

Podcast des deux émissions B.O.L consacrées au roman et au récit de Thomas Degré et diffusés sur Radio Activ ICI et ICI

 

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