[RETOUR SUR…] La route du rock, jeudi 15/08/2019 par Étienne Pierron
Retour Route du Rock 2019.
Étienne Pierron est un fidèle lecteur de Litzic que nous avons pu rencontrer en chair et en os après le set de Fountaines D.C. (tiens tiens) lors de l’édition 2019 du festival Art Rock. Il nous offre son point de vue sur la soirée du jeudi 15 août de La route du rock (Saint-Malo, 35) et des prestations de Fontaines D.C., Idles, Tame Impala et Black Midi. Vous pourrez découvrir tout ceci juste en dessous. Nous vous reparlerons très prochainement d’ Étienne qui est également auteur d’une nouvelle et qu’un projet se trame autour de celle-ci. En attendant, découvrez son report !
Jeudi 15/08/2019
1ere rapide constatation : il y a du monde à la route du rock! Beaucoup de monde. Il fallait arriver tôt dans l’après-midi pour être aux 1ers rangs du concert de POND. Il fallait anticiper les longues queues, d’abord de voitures pour arriver sur le site, puis de festivaliers pour valider son entrée et prendre son bracelet et enfin pour entrer. En tout, prêt d’une heure d’attente. Autant vous dire, qu’en spécialiste du juste à temps, il a donc fallu courir pour arriver pile à l’heure du concert de Fontaines D.C. .
Le public est bien présent pour voir les nouveaux héros dublinois dont le 1er album « Dogrel » a confirmé toute la vivacité d’une scène rock (post-punk, punk rock …) anglo-saxonne dont les formidables Idles sont, d’une certaine façon, la figure de proue. L’attente est palpable et les ayant déjà vus à la Passerelle (Festival Art Rock) quelques semaines auparavant dans une ambiance survoltée, je m’étais fait l’idée que nous allions vivre un grand moment.
1ere interrogation : Pourquoi diable programmer Fontaines D.C. et Idles si tôt ? La réponse est simple : en bonne tête d’affiche, il fallait caser Tame Impala à une heure lui permettant de réunir le plus grand nombre… La question demeure cependant : 19h15 était-ce vraiment le bon choix ? On y reviendra, car la suite de la soirée me confirmera mon sentiment.
Fontaines D.C.
1ere confirmation : Le set est imparable et efficace, les morceaux incisifs de Dogrel sont joués tambour battant mais sans réelle surprise. L’énergie est présente mais ne semble pas partagée entre tous les membres du groupe. Fatigue d’une tournée éreintante peut-être. Et puis, il y les questionnements. Grian Chatten dont certains comparent logiquement la gestuelle névrotique à celle de Ian Curtis, ne surjoue-t-il pas un peu trop ? Chez le leader de Joy Division, il n’y avait aucune pose, aucun calcul, sa transe étant souvent par ailleurs accentuée par sa maladie. Grian Chatten paraît alors en faire des tonnes. Et puis, je suis tombé sur une interview donnée au journal Le Monde dans lequel il déclarait : « J’essaie de me remettre dans les mêmes conditions de colère, de peur, de dépression que quand j’ai écrit les textes. C’est facile de retrouver ces sentiments, entouré de la musique composée pour capturer cela à l’origine ». On comprend et on accepte mieux la proposition.
Malheureusement pour nous, le set s’arrête au bout de 30-35 petites minutes (NDLR : contre 40 minutes à Art Rock). Tellement court à mon goût d’autant plus que le public était conquis et que l’ambiance montait crescendo.
Idles
1ere déflagration : l’attente pour Idles commence à La route du rock . Le public devient plus important et plus compact. La tension est palpable et chaque minute qui passe confirme une chose : la fan base d’Idles est prête à en découdre, prête à mordre la poussière (au propre comme au figuré) sous les assauts frénétiques et engagés de Joe Talbot. Ces derniers mois et la parution de « Joy as an Act of Resistance» ont confirmé tous les espoirs que nous avions mis en Idles : punk, rock, engagés, intègres. En concert, les albums prennent encore une autre dimension. Les liens avec le public sont resserrés, la communion est parfaite et nous avons hâte enfin de vivre ça.
Dès les premières secondes du concert, sous les riffs incandescents de Heal, on sent tout le groupe impliqué physiquement et musicalement, généreux dans le don de soi, dans la transmission et le partage. Ces qualités font qu’Idles surclasse la majorité des autres groupes. Les textes politiquement engagés ne sont pas de simples incantations. Ils prennent vie en concert et nourrissent la prestation du groupe. Idles a construit une communauté de partage avec son public et est en parfaite osmose avec celui-ci. Il n’y a qu’à participer aux multiples pogos pour comprendre que les fans présents sont là pour hurler les textes de Joe Talbot.
Communion
Quand sur Samaritans des centaines de fans reprennent « (..) this is why you never see your father cry » tout en jouant des coudes, des genoux et des torses bombés, c’est une totale catharsis collective qui s’exécute en temps réel. Un exutoire de nos rages intimes, racine de nos indignations contemporaines.
Idles jouera plus d’une heure des titres de ses deux albums. Intenses, furieux, physiques, engagés, tolérants, généreux. Un dernier morceau (Rottweiller démentiel !) en compagnie des Fontaines D.C. clôture ce concert épique et on finit logiquement sur les genoux, plein de poussière et le Fort Saint-Père (et La route du rock) aura donc tremblé. Un grand moment, épique, dont on se souviendra.
Après un tel show, un temps de repos et aussi de restauration s’impose ! C’est le retour des queues interminables pour une pinte et pour un Fish and chips (plutôt bon, au demeurant). Le temps de se remettre de nos émotions, et d’attendre la tête d’affiche Tame Impala, c’est Stereolab qui, malheureusement fera les frais du déferlement Idles.
Tame Impala
La foule était conséquente pour les Australiens. Leur présence avait été, il est vrai, vendue comme un événement, d’autant plus que le dernier album (Currents, 2015) avait connu un relatif succès et qu’un futur nouvel album est annoncé. C’est donc avec une réelle envie que nous abordions ce concert.
1ere réponse à la 1ere interrogation (NDLR : voir en tête d’article) : déception à la hauteur de nos attentes. Plusieurs raisons à cela . Tout d’abord l’horaire de programmation n’a pas contribué à rendre honneur à l’ambiance et l’émotion portées par le groupe. Pour moi la musique de Tame Impala s’apprécie d’autant plus en début de soirée, au soleil couchant, en pause zen. Ensuite fallait-il à ce point un décorum festif, suranné et un peu ridicule (confettis, laser et « vidéos psyché ») pour compenser le fait que 23h n’est pas un bon horaire pour cette musique. Certes aucune mauvaise surprise, les morceaux de Currents sont à l’identique de l’album, manquant cruellement de surprise à mon goût. Finalement nous nous sommes retrouvés au coin des ennuyés attendant patiemment le concert de Black Midi.
Black Midi
Le buzz ayant joué son rôle c’est en mode interrogatif que j’appréhendais la prestation du groupe londonien. Je n’avais pas été particulièrement convaincu par l’album et j’avoue ne pas trop comprendre l’engouement autour de ce groupe… Néanmoins, j’espérais être contredit et assister à une vraie révélation. Malheureusement, après 20 mn de concert mon constat est le même : trop hermétique pour moi actuellement. J’entends les louanges de mes proches et des critiques. Pour moi aujourd’hui cela ne passe pas, leur musique ne me parle pas.
La première soirée (au Fort de Saint-Père) de cette nouvelle édition de La route du rock se terminera sur le set magnifique de Jon Hopkins entre ambiant et techno apaisée parfait pour rejoindre les bras de morphée.
Je retiendrai donc de cette soirée la prestation puissante d’Idles et celle, un peu moins convaincante, de Fontaine D.C., le reste me laissant un goût plutôt mitigé.