Chronique livre Dossier essais/biographies/témoignages
BRUNO GENESTE & PAUL SANDA, Un siècle d’écrivains…
…à Pont-Aven et ses environs (Editions des montagnes noires)
Nous entamons un petit cycle consacré à Bruno Geneste et Paul Sanda, deux amoureux de la Bretagne et de la poésie. Nous commençons l’exploration de leur plume par ce très beau et instructif Un siècle d’écrivains à Pont-Aven et ses environs. Alors pour les ignares, Pont-Aven est une commune située dans le Finistère, pays d’abers et de rias (on vous laisse chercher sur le net ce que signifient ces termes). En une cent cinquantaine de pages, le duo nous propose un voyage géographique, dans le temps et la poésie autour de ce village qui a su canaliser des artistes et les rallier à la beauté des lieux.
Nous n’allons pas vous faire un name dropping imbuvable juste pour vous donner envie de lire ce recueil de portraits. Nous n’évoquerons que quelques noms, non par ordre d’apparition, mais par les petits frissons qui nous ont accompagnés lors de la lecture des quelques pages leur étant octroyées (aux alentours de 6, pour tous les portraits). Ici, nous croisons André Breton, Xavier Grall, André Gide, Théodore Hersart de La Villemarqué, Alain, Jackez Riou et quelques autres, tous aussi importants et essentiels à la compréhension de l’attraction magnétique des lieux, de l’hospitalité qui y régnait, et des vertus créatives qui régnaient sous le bleu ciel breton.
Un lieu unique.
La lecture de ce livre nous démontre un village unique au monde, capable d’inspirer tous les amoureux de la beauté. La preuve, c’est que Gauguin n’était pas insensible à celle qui régnait en ces lieux (avant son départ pour les îles). Il n’est cependant pas le seul à avoir trouvé matière à nourrir son imaginaire. Car s’il peignait avec un pinceau et une palette de couleurs, les poètes peignaient eux avec les mots et les images de leurs ressentis. Après avoir séjourné en divers endroits stratégiques, comme le fameux Hôtel de la Poste ou L’Auberge de la Mère Bacon, tous ont nourri, grâce à la douceur de vivre de la ville, leur imaginaire, leur fougue littéraire.
Les rencontres y aidaient, c’est vrai. Celle des pêcheurs du coin, celle des hôtes, celles des artistes qui s’y donnaient rendez-vous, tout concordait à stimuler les amitiés et les échanges. En naquirent des poèmes que les auteurs ont eu le bon goût de glisser (tout ou partie) dans quasiment tous les portraits. Mais tels des poètes historiens, passionnés il va sans dire, le duo nous propose plus que cela.
Une restitution « magique ».
En effet, par le choix des angles choisis pour évoquer les différents fantômes qui peuplent ces pages, Paul Sanda et Bruno Geneste nous transportent dans un ailleurs en partie fantasmé (car eux-mêmes étaient loin d’être vivant à l’époque d’un Auguste Brizeux par exemple). Ainsi, en partie fondé sur leur culture, sur leur recherche, mais aussi sur leur inventivité, ils nous écrivent la vie en ces latitudes avec un verbe haut, fort, riche, qui ne peut que nous ravir. Ils évitent ainsi le recueil purement historique, laissant leur propre poésie investir les lieux, pour notre plus grand plaisir.
Le voyage spatio-temporel dégage alors d’exquises saveurs. De celles du savoir et de l’amour, pour ses hommes (pas de femmes citées, ou très peu) et leur art. Leur œil d’esthète retransmet à merveille l’univers, entre terre et mer, de Pont-Aven, de Moëelan sur Mer, avec, malgré l’emphase, une certaine sobriété empreinte de respect et d’admiration. Cela donne une âme très particulière à cet ouvrage étrangement ensorcelant, jamais mélancolique, mais vibrant au contraire d’une joie intense, que nous pouvons peut-être ramener à celle de la découverte, de la connaissance et du partage.
Un beau livre.
Dès la couverture, nous sentons que nous allons découvrir un univers où la beauté règne. Peut-être pas sur la photo qui y figure (un noir et blanc où figurent Xavier Grall, Georges Perros et Nicole Cornelleau, patronne de l’Hôtel de la poste de la ville, une amoureuse des artistes comme il en existe trop peu) mais par les couleurs qu’elle porte, couleurs douces, nostalgiques, un peu, mais aussi pleines d’un dynamisme lumineux. Comme si tout était encore en mouvement, comme si la poésie n’était pas snobée par une large part de la population qui, sous prétexte de ne pas la comprendre préfère s’avilir devant les écrans.
Mais la beauté, outre le niveau d’érudition des deux compères, outre la pureté de leur langage, réside avant tout dans cette vénération de cette côte à nulle autre pareille. Que nous soyons Breton ou pas, une seule chose est sûre : nous avons envie d’envahir Pont-Aven, avec nos carnets, nos crayons, nos aquarelles, nos appareils photo, nos dictaphones etc. pour capturer la magie des lieux, son atmosphère, et garder soigneusement le tout en nous, ou le partageant avec le plus grand nombre. C’est ce que parviennent à faire, avec une grande classe, Bruno Geneste, Paul Sanda, et un siècle d’écrivains…
Dans les prochains jours/semaines, nous vous dévoilerons deux autres écrits du duo Geneste Sanda avec Les surréalistes et la Bretagne et Révélation sur la magie et la sagesse des druides.
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