[RETOUR SUR] La double vie de Pete Townshend, Christophe Sainzelle.

Petit come back sur le premier roman de Christophe Sainzelle, La double vie de Pete Townshend paru chez ETT éditions.

Nous avions chroniqué, lors de sa sortie et sur un autre site, ce roman de Christophe Sainzelle. Nous vous remettons cette chronique en bas d’article, mais nous vous proposons une plongée dans notre mémoire, pour voir ce que La Double vie de Pete Townshend a laissé de marquant dans nos souvenirs.

Réveiller les souvenirs.

Pour nous, La double vie de Pete Townshend se passe dans les années quatre vingt, au début ou à la moitié. Les couleurs sont celles de ceux de l’appartement de notre grand-père, dans un camaïeu de crème, café et du marron de ce canapé en velours dans lequel nous adorions nous vautrer. Les odeurs sont assez neutres pour tout dire, relatives à celle d’un gigot préparé dans la cuisine. Nous voyons les parents, vêtus de vêtements assez ternes, loin des couleurs éclatantes de la fin de ces mêmes années 80. Et puis, je me vois, l’allure déguindée, à cet âge dit ingrat, où je voulais tout envoyer valser, y compris ce père qui ne comprenait rien à la vie, rien à qui j’étais.

Alors, je m’imaginais un vrai père (celui qui était à la maison n’était qu’un subterfuge grossier pour me masquer la rock n’rollesque vérité). Ma mère n’avait pu tomber amoureuse d’un type comme ça ! C’était un mariage de convenance parce que, figurez-vous, ma mère était enceinte avant le mariage, et c’était mal accepté. Alors mon « père », ce subterfuge, l’a épousé, et m’a adopté en même temps. C’était prévu dans le package.

La double vie de Pete Townshend.

Mais alors, qui avait fait ce bébé à ma mère ? Impossible de savoir.

Mais voilà qu’un jour un pote à moi m’a fait découvrir un groupe, anglais, génial. Ce groupe, il me remua tout entier, des pieds à la tête, éveilla chez moi une curiosité de tous les diables. Il s’agissait des who. Les qui ? Les who ! (ah ah quelle bonne blague, on se poil). J’adorais ce son qui me mettait en transe comme ça, ce déferlement de batterie de Keith Moon, les riffs assassins, les sensations qui me sautaient à la gorge. Le pied !!!

Et puis je n’en savais rien, mais ce Pete Townshend, je trouvais qu’il ressemblait un peu. Non ? Enfin, n’était-ce pas plutôt moi qui lui ressemblais ? Ce nez, ce visage, cette dégaine, c’était du moi tout craché ! Naaaan je rêvais ! Moi, le fils de Pete Townshend !! Bon, je devais tout vérifier, les dates des concerts du groupe lors de l’une de leurs tournées françaises, les lieux et… mince, ça concordait ! Les Who, le plus génial des groupes de rock, étaient passés donner un concert dans les années 70, pas très loin de l’endroit où j’habitais avec ma mère et mon pseudo père ! La révélation, le choc total : j’étais le fils caché de Pete Townshend.

Forcément…

les conflits commencèrent. Forcément, je ne pouvais plus supporter la mascarade de couple que formaient ma mère et ce clown ! Fallait que je parte de cet appartement de banlieue, que j’aille en Angleterre pour enfin rencontrer mon vrai père ! Mais ça ne pouvait aller aussi simplement et les disputes jaillirent bientôt, violentes, cinglantes. On peut dire qu’on se frittait à la maison. Au point que ma mère se retrouva à l’hosto… J’étais dégoutté de tout, même des Who, c’est dire !

Mais bon, les événements finiraient par reprendre le cours de leur existence sans éclat. Mais j’en garde un souvenir indélébile. N’est-ce pas ainsi que l’on apprend ce que c’est de grandir

Voilà en peu de mots ce que cette histoire a laissé dans nos souvenirs. Un rythme, des couleurs, une musique, tout en relation avec la plume de Christophe Sainzelle qui dépeignait les relations familiales avec une lucidité géniale. Cette lecture douce amère nous replongeait avec un réalisme certain dans nos propres souvenirs d’adolescence, et ce n’était pas rien de faire mouche comme ça. Depuis, Christophe Sainzelle a publié Le non-partant, avec la même réussite, bien que sur un thème différent.

Mais ça, c’est une autre histoire !

la double vie de pete townshend christophe sainzelle

Les romans de Christophe Sainzelle sont à retrouver ICI

La chronique d’il y a longtemps !

(et c’est étonnant de la redécouvrir après tout ce temps)

« Salut. Je vous ai dit que je suis le fils de Pete Townshend ? Nan, sans dec ! J’suis sérieux ! Faut pas croire que le type plus âgé qui se dit être mon père l’est réellement. Bien trop plouc ! En fait, ma mère, avant, quand elle était jeune et qu’elle n’essayait pas de se foutre en l’air, était femme de ménage dans un hôtel. Un soir, Pete Townshend, en tournée dans le coin s’y est arrêté pour la nuit et il se trouve que par la magie d’un instant éphémère, par une attirance mutuelle inexplicable, par un alignement stellaire ou par l’absorption massive d’alcool, il et elle ont… ‘fin bref vous pigez le topo.

Bon, le truc, c’est que Pete, il n’est jamais revenu dans le coin. Il a juste fait son affaire et on ne l’a jamais revu. Il me connait même pas ! Mais vous pouvez pas dire qu’avec le tarin que je me paye je ne suis pas son fils ! Depuis que j’ai découvert un disque des Who, par l’entremise de mon pote Alain, celui qui fait craquer toutes les nanas, ma vie s’est transformée.

Grâce au Who, je me sors enfin de la ploucquitude qu’ont décidé pour moi mes parents. J’arrive même à affronter ma daronne. Qu’elle crève vu qu’elle y tient tant ! J’ai le droit de rien, pas même celui d’écouter mes disques. Ils, elle et celui qui se dit mon père, les planquent en douce dès que je vais au collège. Si j’y vais, au collège, c’est juste pour Erika. J’ai mis au point un stratagème pour la rendre folle de moi. Dommage que j’ai ce putain de blouson d’astronaute sur le dos ! Je ressemble à rien avec ça, et surtout pas à papa, le vrai, Pete Townshend. »

La plume de Sainzelle

Christophe Sainzelle nous replonge dans l’adolescence avec humour et avec cette petite pointe de désespérance que nous avons tous un jour rencontrée. Son roman, La Double Vie De Pete Townshend (éditions ett/dépendances) nous raconte la vie de David Barrette, gamin comme tant d’autres, qui s’éveille à la vie après avoir découvert un album des Who. Un peu comme nous, quoi, quand, par hasard nous avons découvert ce groupe qui aujourd’hui encore nous accompagne et qui nous a fait nous dire, à un moment donné : rien à foutre de qui je suis, de ce à quoi je ressemble, du moment que je ne sois pas comme eux.

La vie de cet ado est romanesque, rocambolesque, terrible aussi parfois, mais elle entre parfaitement en résonance avec les souvenirs que nous pouvons avoir de cette période de notre vie. Nos parents étaient nuls, le collège était nul, la vie était nulle (ouais en fait tout était nul). Et puis en grandissant, nous nous sommes aperçus d’une part que nos souvenirs étaient faussés par notre mauvaise foi d’alors, et d’autre part que tout n’était pas si pourri que ce que nous voulions bien imaginer.

Doux amer

Nous reste ce groupe qui n’a jamais cessé de nous accompagner, même si, avec le recul qui est le nôtre, nous nous apercevons que tout n’était pas si bon dans sa discographie, voire même qu’il pondait des chansons franchement mauvaises. Grâce à ce groupe, nous avons voulu faire de la gratte, de la batterie, du pipeau ou du triangle, grâce à lui nous nous sommes construit comme s’il avait été un père accessible et toujours présent, ce qui n’était pas forcément le cas du nôtre, du vrai, qui était pris par le boulot et dont le manque de communication était aussi un peu de notre faute.

Christophe Sainzelle remet tout cela à plat, nous rappelle ce que c’est d’être un enfant, ce que cela signifie de grandir, mais il le fait sans prise de tête, avec un humour jouissif, assez anglais dans le fond, ce qui ne fait que rendre plus attachant son personnage principal.

Un roman initiatique, à la fois tendre et lucide, sur l’acquisition de la maturité quoi.

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christophe sainzelle le malheur des uns partie 1

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Pour acquérir les romans de Christophe Sainzelle La double vie de Pete Townshend et Le non partant, direction les Éditions ETT

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