FLORENT LUCÉA 3 poèmes (J’exhale, La poupée, Si j’étais une dame)

florent lucéa luxis luceartist 3 poèmesNotre auteur du mois Florent Lucéa possède de nombreux talents qu’il convient de découvrir au mieux. Ainsi, avec la générosité qui le caractérise, il nous offre des fragment de ses facettes poétiques. Nous vous invitons à les découvrir sans tarder.

J’exhale.

J’exhale l’exil expéditif, j’expire l’empire exténuant des sens qui me tourneboule, et m’environne. L’anicroche s’effiloche sur les roots expiatoires de mes racines expérimentées. Écheveaux de liens disparates qui tracent les sillons d’une bienveillante satiété.

J’exhale l’exil expectatif par tous les pores au long cours, sur les berges qui divergent, les vagues mutiques qui divaguent et dilapident mes épîtres sanctifiées, censurées, sanskrites comme autant d’oripeaux malhabiles, volubiles, volumineux, votifs. Valeurs émérites, guérites érigées, efficaces, fugaces comme des rapaces royaux s’élevant dans les nuées de la déraison, de leur société normative, sclérosée, dentelée comme une lame crantée s’enfonçant dans ma peau de miel.

J’exhale la soif inextinguible, la faim qui tiraille, les entrailles sous la mitraille, la violence de leurs mots diffamatoires. Moi, le reliquat, l’être érodé échoué sur des rives normatives, je me bats pour exister dans ce monde exténué. À bout de souffle, je me boursouffle, je suis poussif, putride et éreinté, sans doute exproprié de mon propre corps.

J’exhale l’exil circonflexe, parce que d’étroites pensées bienséantes voudraient nous ranger dans des cases. Des cages me dégagent, dévalent les valeurs, m’emballent de mirages, démantibulent mes mandibules et je reste bouche bée. Béantes lèvres barrées d’une plaie irradiée, irrémédiablement irrésistible, mais aussi si fébrile, comme une faribole fabuleuse.

J’exhale l’exil, J’expulse les images médiocres qu’on nous colle sur le dos, j’exècre les insultes dont on nous agonit et j’exulte tel un Arlequin chamarré. Dodelinant de la caboche, cahotant, chahutant comme un chat-huant, je chuchote les mots pour guérir mes maux. Les miens comme les vôtres. Je lutte dans ma cahute de pyrex, j’ai échappé à la chute, parce que j’ai trouvé des piliers de silex pour redresser la barre dans ce tintamarre convexe, ce tumulte, ce cafard né homme.

Je lutte donc je suis.

La poupée

Une petite poupée poussive est pelotonnée au sein d’un consortium de pelotes pâlottes sans patience dans un placard de brouillard. Perdue dans un bric-à-brac de babioles qui s’étiolent dans la poussière, les toiles d’arachnides patentées, elle panse ses plaies parsemant sa peau, façon constellation rapiécée.

Le pauvre pantin chiffonné peaufine ses plans d’évasion possibles, en réalité improbables, car elle ne peut s’extirper de ce fatras de piètres jouets piétinés, de parchemins parcheminés et de provisions périmées. Impuissante poupée pensive poussant un soupir d’exaspération attend une paluche propice à mettre fin à son supplice.

Une lueur d’espoir chétif, quand un homme, arborant un uniforme difforme dans cette nuit d’encre, ancrée à des ports impalpables, la saisit sans ménagement pour la sortir de sa pénombre et la bombarder avec sa lampe torche.

Le militaire examine le vestige d’une enfance brisée, chargé de l’amour d’une petite fille dont l’écho des rires peine à hanter encore cette maison désertée précipitamment. Des volutes de fumée emplissent l’air chargé de l’odeur âcre de la terreur.

L’individu divisé renonce à emporter la chiffonnée. Il la jette par terre et la piétine en insistant lourdement sur son étoile jaune.

Si j’étais une dame

Si j’étais une dame, fière serait mon âme,
malgré les mains baladeuses, les sifflets dans les rues venteuses, les insultes du genre « allumeuse », les quolibets sur mon allure aventureuse, les bien-pensants et leurs phrases fallacieuses.

Si j’étais une dame, une somme de drames,
de mandales pour une froide baveuse, de tromperies avec de pauvres gueuses, de vacheries sur mon corps d’amoureuse, de preuves vaines d’amours vaseuses pour endormir ma bravoure fiévreuse.

Si j’étais une dame, une victime d’une débile lame,
mon pauvre cœur de danseuse abriterait des rancœurs haineuses pour l’irrespect de porteurs de valseuses, oubliant qu’une rivière onéreuse de diamants n’excuse pas les gifles désastreuses.

Si j’étais une dame, je jouerais une gamme
sans inégalités, droite dans ma vareuse, sans oppression de la société belliqueuse, sans le sentiment d’être une brebis galeuse, en gommant toutes les marques honteuses assaillant ma forteresse victorieuse.

 

Vous pouvez retrouver deux autres poèmes de Florent Lucéa ICI

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Ce texte est publié avec l’aimable autorisation de Florent Lucéa.
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