3-23, de Pavel à Poil Ueda (+ bonus)

Nouvelle sélection musicale du vendredi 20 janvier.

Une playlist 3-23 qui ose, à une exception près, s’aventurer sur des chemins expérimentaux, avant-gardistes, conceptuels, forts, troublants. D’ailleurs, même cette exception est pleine de sensibilité, point de convergence des différents projets dévoilés aujourd’hui.

PAVEL, Un Peu Plus Tard

Folk minimaliste, voix douce et légèrement rauque. Rien de nouveau sous le soleil de ce genre musical, si ce n’est ce nouveau nom, Pavel, à retenir. Parce que l’émotion est là, émane autant de cette voix que de paroles qui viennent du dedans, dégageant pourtant ce sentiment d’universalité. Rien n’est chargé, ostentatoire, tout est question de pudeur, de don de soi, comme pour mieux nous permettre de comprendre que nous sommes.

Une histoire de passion, une envie de liberté, un besoin d’aller vers ce que, peut-être, Pavel est fait depuis toujours, à savoir (se)raconter la vie, celle qui vaut la peine d’être vécue mais dont le chemin sinueux est parfois dur à emprunter, car trop « évident ». Alors, il s’est abîmé, avant de trouver sa foi, et elle irradie sur ce titre intimiste et précieux comme un grain de sable dans le Sahara (parce que ce grain de sable en particulier est finalement unique).

LE GRAND MAL, Éclairée par un appareil.

Projet atypique mêlant musique et cinéma, Le Grand Mal déboule avec son électro-pop, vaguement soul, vaguement trip-hop, et nous charme par ses choix artistiques. Forcément, une relation image/son se fait, mais c’est surtout une exploration de la psyché de l’autrice qui surgit ici, entre pudeur et sensibilité, malgré une musique qui se veut plus expérimentale et qui marque au fer rouge le propos.

Car il se trouve que Julia Lopez, de son vrai nom, a été hospitalisée en établissement psychiatrique pour trouble de la dissociation (son psychiatre apparaît d’ailleurs dans le film qui réunit clips musicaux et fiction). En résulte une expérience surréaliste et intime, sensible car osant aller au bout des choses. La musique, si elle ne peut changer le monde, peut encore et toujours changer notre planète interne. Ce que démontre à merveille Le Grand Mal.

Première du film : le 17/02/2023 dans la salle « Le Hang’Art » à Marseille. L’album, Boule à facettes, sortira simultanément à la projection du film

TOMBOUCTOU, Claps on wave.

Parcours chaotique, math rock, à la voix engagée, aussi douce que vénère, qui nous transporte à l’orée d’un rock sans concession, légèrement angoissant, oppressant. Les aspects lo-fi nous sautent à la gorge, en même temps qu’une beauté viscérale. Si les contours s’avèrent formés d’arêtes tranchantes, d’angles aigus, une certaine douceur émerge malgré tout de la mélodie.

Certes, Tombouctou ne nous brosse pas le poil dans le sens qu’on attend, mais cela ne fait que renforcer l’emprise de Claps on wave sur nous. Il nous maintient gentiment captif, happe notre attention pour ne pas la relâcher, même une fois la dernière note évaporée dans l’air froid de ce 20 janvier hivernal. Preuve, s’il en est, que cette formation possède un certain magnétisme. L’album Tricky Floors sortie le 3 février chez Hidden Bay Records.

LEATHERETTE, Thin Ice

Étrange clip pour une chanson qui ne manque pas, elle non plus, de surprendre. Thin Ice, extrait du premier album de Leatherette, flirt avec un rock incandescent et la pop, tout en proposant des sonorités relativement surprenantes du fait de l’ajout d’un saxophone. On sent poindre un soupçon de frustration, un caractère légèrement désabusé, mais aussi une sorte de férocité prête à jaillir à n’importe quel moment.

La composition détonne par des climats variés, semble se diriger vers un point de fuite qui change en permanence et cette instabilité, loin de nous perdre, attise notre curiosité. Celle-ci étant désormais acquise, il ne nous reste plus qu’à nous précipiter sur l’album Fiesta, déjà disponible chez Bronson recordings.

Poil Ueda, Dan no ura

Pièce jazz rock, Dan No Ura de Poil Ueda s’avère réjouissante et intrigante. Entre instruments acoustiques traditionnels et caractère abrasif électrique, le morceau s’écartèle dans une forme de colère rentrée, volcanique. Nous sommes, nous aussi, sur un siège éjectable, ballotté entre nos repères jazz et rock, voire électro, avant-gardiste à 100 %, jamais sûrs de ce qui pourrait advenir dans la seconde à venir.

La narration du morceau s’avère captivante, se situant quelque part dans une tradition là aussi, celle des conteurs itinérants qui venaient capter l’attention du public de villages isolés, et la véritable chanson made in soleil levant. Dans tous les cas, Poil Ueda donne envie de se pencher sur sa discographie et notamment sur l’album à venir, lequel éclora en mars prochain.

BONUS. Debbie Sparrow, Sans soutif

Allez, pour la forme, et parce que c’est plutôt bien fait, laissant passer une lueur d’humour dans un thème d’actualité, Sans Soutif est une chanson féministe sur fond de punk rock à l’américaine, mais en français dans le texte. Que dire de plus, si ce n’est que Debbie Sparrow a également sorti un autre titre, tout péter, qu’on vous invite gentiment à chercher sur youtube.

BONUS 2 : TE/AZ, Fall (intro)

Nous avions aimé son précédent EP, on vous annonce donc que, durant 2023, TE/AZ sortira plusieurs clips et autres live pour évoquer la sortie de son nouvel EP, Fall, dont voici d’ores et déjà une mise en bouche qui nous laisse en suspens, entre frustration et expectative quant à cette électro organique, minérale et liquide. On a hâte d’en découvrir plus tant cette intro nous laisse sur notre faim. Mais comme dit l’adage, qui vivra verra.

Patrick Béguinel

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