14-23, d’Alex Nauva à Aimé Wilde
ALEX NAUVA, Fever part I
Mettre de la vie dans les machines. Y mettre de l’espoir, de la liberté, un sentiment d’exaltation aussi. Si le pari est risqué, Alex Nauva possède un savoir-faire incroyable qui permet de le concrétiser de main de maitre. On pense, vite fait, à un groupe comme LCD Soundsystem, pour l’usage de cette électronique vivante, à Depeche Mode pour le caractère ardent de la voix, ou bien encore à un groupe comme PVT pour le mélange des deux. Fever Part I nous attire comme un aimant duquel nous n’avons absolument aucune envie de nous défaire. Le titre nous embarque dans son univers et nous en maintient captifs volontaires tant il réveille notre imaginaire. À ne surtout pas bouder !
TENTATIVE, j’ai plein de trucs à faire
Prendre des codes post punk et les détourner en les ancrant simplement dans les questions éphémères de l’existence, laquelle existence est un reflet de celle de notre société actuelle, toujours sollicitée par des injonctions diverses et variées. En spoken word désabusé, Tentative (Charlie Perillat) impose une machinerie disco punk qui ne laisse aucun répit. Derrière sa rythmique électro, une guitare vrombit, apportant une urgence que l’énumération laconique ne laisse pas présumer. Le paradoxe fonctionne à 100 % et nous ravit.
FLO ASSY, Face à moi-même
Craquement de vinyle de bon goût pour lancer Face à moi-même de Flo Assy. Une voix qui rappelle celle de Benjamin Epps, un texte qui évite les clichés, un flow qui s’avère aérien, Flo Assy impose sa patte old school avec précision. Le sample, teinté de spleen, se trouve conforté par les paroles du texte. Une sensibilité d’écorché en émerge, celle d’un homme perdu dans son propre miroir. On aime cette phrase,qui résume à elle seule le titre : « Après tout j’suis qu’un artiste donc j’suis seul face à moi-même ». Le tout s’avère élégant, sobre et dégage un art bien posé du bon texte sur la bonne musique. Flo Assy a tout pour séduire.
ARI KALI, The storm
Entre pop, soul et trip-hop, Ari Kali nous offre un moment en suspension avec The storm. Les sonorités, chaudes, sont immersives. La ligne de chant est elle envoutante. Si du trip-hop nous gardons une certaine pulsation, le jeu de percussions apporte une imagerie un peu world music du plus bel effet, et surtout très pertinente. Reste cette voix qui, peut-être, aurait pu gagner un peu en ampleur et en « velouté » pour rendre ce morceau encore plus magique. Qu’importe, le pari est réussi et Ari Kali nous charme par la délicatesse de sa musique. À suivre de très près.
SIR EDWARD, Session live Afterschool
Rock, et pop, frénétique et psychédélique. Motifs qui rentrent en forant le tympan, tout en le caressant dans le sens du poil, ces titres nous électrisent tout en nous évoquant un peu l’esprit et le son d’Altin Gun ou Derya Yildirim et celui d’une Anatolie fantasmée. Pourtant, on reste véritablement dans notre hémisphère européen, avec une musique directe, intense et instantanée à l’écoute qui ne peut que nous entraîner à danser et à célébrer la vie. Bref, une musique éclatante, dans tous les sens du terme (et pas besoin de drogue pour décoller totalement).
FEN, Proud
Se faire et nous faire du bien. Tel semble être le parti pris de Fen qui nous enchante avec son titre Proud. Ici, nulle grimace à l’écoute de ce morceau funky et léger, bien fichu et qui donne irrémédiablement le sourire. C’est si rare en ce moment qu’il nous paraissait impossible de passer à côté de ce titre plein de soleil, excellent booster d’endorphine, euphorisant mais jamais creux ni aseptisé. Bref, le morceau feel good de la semaine, voire du mois !
AIMÉ WILDE
Le projet d’Aimé Wilde est de mettre en musique des sensations. Articulé autour de l’eau comme en témoignent les titres des deux singles que l’on vous fait découvrir aujourd’hui, à savoir La bête est née (niveau 1 – 5000 mètres) et Ton nom (niveau 2 -4000 mètres), le projet aborde des sujets « comme l’hyperacousie et les acouphènes, la rupture avec l’autre et les retrouvailles avec soi, dans une ambiance jeu vidéo. » Le travail sur les sonorités, proche de celles des disques immersifs du genre de ceux qui exposent ce qu’entend le bébé dans le ventre de sa mère, éveille la curiosité et s’avère très souvent saisissant. A mi-chemin entre pop et électronique, l’équilibre reste bien dosé et nous plonge dans le monde du silence, qui ne l’est finalement pas tant que ça. On apprécie cette exploration pleine de sensibilité et d’originalité, qui méritait donc un petit relai de notre part. Un 4 titres nommé Ploc Ploc sortira très prochainement, tandis qu’un album 10 titres verra le jour dans les mois à venir (il est actuellement en cours de finition).
Patrick Béguinel