LA SUPER CATHÉDRALE, une entame concluante.

Premier report de l’édition 2022.

Jeudi 21/07 avait lieu la première journée de la Super Cathédrale. Comme toute première journée d’un festival, il convient de prendre ses marques, de se familiariser avec l’environnement. Mais le moins que nous puissions dire, c’est que l’entame concluante de l’événement laisse présager une suite tout aussi enthousiasmante.

Pour arriver sur le site, nous avons opté pour le parking sur le port de Binic. Pour accéder à La Rognousse, pointe sur laquelle sont installés la Grande Scène, le Chapiteau de la Petite Scène et un autre chapiteau pour le merchandising (sans compter les bars, à bière et vins, et les food truck, nous prenons le chemin des douaniers nous offrant une vue splendide sur la baie de Saint-Brieuc. La vue, une fois sur site, confère à ce dernier une dimension un peu particulière, comme si nous nous trouvions face à un inconnu baigné de soleil, un inconnu pouvant nous conduire jusqu’au bout du monde.

Ça tombe plutôt bien car le monde, nous l’avons visité avec les 6 groupes du soir.

Tramhaus.

Ils ont eu la lourde et délicate tâche d’ouvrir les festivités. Le chanteur/leader se fendra même d’un « merci d’être venu si tôt pour nous voir, cela nous touche particulièrement ». Il faut dire qu’il ne fallait pas louper le show des Néerlandais, mélange de post punk tendu et d’expérimentations dissonantes. Mixte et presque paritaire (Tramhaus est un quintet comportant 3 hommes, au chant, a la guitare et à la batterie, et deux femmes, guitare/choeurs et basse), le groupe ne se ménage pas pour essayer d’embarquer le public dans son univers assez oppressant.

La voix y est scandée, les atmosphères parfois inquiétantes (les fameuses dissonances donnent des nuances assez folles d’un climat anxiogène auquel il n’est pas trop dur de s’identifier). Le leader s’avère assez charismatique malgré un jeu de scène assez minimaliste. Bon point, il réussit à instaurer une certaine convivialité avec le public, avec quelques mots bien sentis. La parlotte n’est pas leur fort, mais le peu qu’ils font parvient à nous les rendre sympathiques. Même si leur musique s’avère intense, nerveuse, sur le fil du rasoir, le groupe réussit le pari de lancer cette édition 2022, avec bien plus que les honneurs !

tramhaus entame concluante

Reptiles.

Nous quittons la Grande Scène pour le chapiteau. Le temps de remonter la pente (au sens propre, la grande scène étant installée légèrement en contrebas d’une pente assez douce, comme au figuré) et le groupe balance ses premiers accords. Malgré une balance vite expédiée (comme nous le confirmera un peu plus tard Sylvain Arnaux), le groupe impose son ambiance sépulcrale et sa voix d’outre-tombe, rocailleuse, pleine d’une souffrance longtemps tue mais qui s’exprime par le biais d’une minuscule ouverture. Le rock teinté de post punk de Reptiles prend aux tripes, directement, sans vous laisser le temps de bien comprendre ce qui vous arrive.

Il faut dire que Sylvain Arnaux (que nous n’imaginions pas du tout tel qu’il est, mais plutôt un grand brun ténébreux au regard noir et à la barbe fournie…nous avions tout faux) dégage un charisme magnétique. Toutes proportions gardées, il nous a rappelé celui d’un certain Daniel Darc, avec cette fêlure, cette blessure qui n’a jamais été cicatrisée mais qui trouve par la musique son exutoire. Ses textes véhiculent ce même mal être, mais, contrairement à ce que nous aurions pu croire, le show s’avère chaud, enveloppant. Pas toujours réconfortant néanmoins car il nous bouscule dans nos propres retranchements. Si on excepte quelques pains (confirmés une nouvelle fois par Sylvain, mais sans gravité, ni même ne desservant le show), la présence de Reptiles aura échauffé les esprits et les âmes.

Malgré l’heure de son passage, Reptiles aura donc su rassembler autour de sa musique. Et entamer le mouvement vers une suite de soirée démentielle.

reptiles entame concluante

Vulk.

Sur le papier, le chant en basque de Vulk aurait pu paraître un choix osé (et potentiellement casse gueule). C’est pourtant une très très bonne surprise que ce groupe avec deux showmans aux antipodes l’un de l’autre mais qui, curieusement, fonctionnent à la perfection ensemble. D’un côté, un bouillonnant bassiste, véritable sensation, qui se contorsionne, bouge dans tous les sens, souffle comme s’il allait éclater, balance des regards de fous, yeux révulsés et autres facéties corporelles, de l’autre un chanteur aux yeux flamboyants, à la gouaille punk et au jeu de scène minimaliste, pieds plantés dans la scène, imposant toute sa hauteur (somme toute raisonnable, mais qui paraît deux fois plus imposante que celle des autres musiciens).

Musicalement, la formule rock/punk rock du quatuor a de quoi séduire : structures alambiquées, scansions révolutionnaires, impact rythmique fort, un certain minimalisme inspiré, tout concours à nous faire perdre pied. Vulk déjoue nos attentes, nos certitudes, mais balance l’air de rien des mélodies venues de nulle part. Pas du tout communicatif, le groupe annonce juste son dernier titre, il embrase cependant la foule. Magnétique, intense, fort, Vulk est pour nous la très bonne surprise de ce premier jour, d’autant plus que basque ou pas, la barrière de la langue est insignifiante par rapport à l’intention artistique du groupe. Bref, excellent !

vulk entame concluante

Crack Cloud.

Très belle surprise également, au coude à coude avec Vulk, Crack cloud impose son style avec une intensité rare. Mais avant même de jouer, la mise en scène a de quoi surprendre : 5 musiciens de front, 4 micros, plus un musicien (le bassiste) en retrait sur une estrade. La batterie, quant à elle, se trouve bel et bien au premier plan, plein axe. Il faut dire que le batteur/chanteur lead dégage quelque chose de puissamment animal et un charisme fou qu’il démontre parfois en poussant des râles bestiaux surprenants (mais toujours à propos).

Plus qu’à un simple concert, nous avons eu l’impression d’assister à un spectacle parfaitement chorégraphié, une sorte de comédie musicale rock/jazz/punk très visuelle, même si, à l’exception du clavier, peu de déplacements scéniques sont à dénombrer (malgré le fait que le batteur soit parti en coulisses à un moment, pour renforcer la dramaturgie du show). Cette approche scénique est véritablement captivante, intense, et l’on sent irrémédiablement que ces gars-là ont un sens développé de l’image qu’ils veulent projeter.

Musicalement, un peu comme Vulk, le combo prend plaisir à nous entrainer sur des fausses pistes, comme pour mieux nous cueillir et nous faucher au détour d’un virage. L’ensemble s’avère nerveux, viscéral, avec un véritable engagement de corps, une tension toujours sur le point d’exploser mais qui reste finalement contenue. Comme si Crack Cloud jouait avec nos frustrations en somme. On vous conseille de voir le groupe sur scène car sa scénographie, son implication méritent largement le détour. Et qu’elle ne se raconte pas vraiment. Elle se vit !

crack cloud entame concluante

Lumer.

Retour sous le chapiteau pour assister à la performance de Lumer. Là où les autres groupes s’avèrent peu bavards, Lumer aime à discuter avec le public (et quelques mots en français s’il vous plait). Il a d’ailleurs la classe, le leader du groupe, en pantalon et veste de costume et chemise. Pourtant, derrière ses airs de gendre idéal, il s’avère un bad boy bien comme il faut. Chant parlé engagé, gestuelle assumée, il fait parler son charisme du début à la fin du set. Le post punk du groupe nous évoque un peu les Clash, et aussi pas mal d’autres groupes anglais (le groupe est lui-même anglais). La musique s’avère abrasive, gêne un peu aux entournures avec son aspect direct, frontal. Si le chanteur officie d’abord au chant seul, puis au chant clavier, il passe rapidement au chant guitare, apportant une touche supplémentaire de rage à la musique du groupe.

On sent un fort impact de l’histoire sociale sur ce groupe qui mouille la chemise pour nous embarquer dans son univers. Univers que nous rejoignons sans grande peine tant il nous parle profondément. Si vous les avez manqués hier, sachez qu’ils seront également à l’honneur aujourd’hui. A ne pas manquer.

lumer entame concluante

The Bobby Lees.

Pour clore cette entame de festival, place aux Américains de The Bobby Lees. Ce groupe, on le suit depuis quelque temps, et nous avions fort envie de nous frotter au rock du quatuor protégé de Jon Spencer (du Blues explosion). Verdict ? Peu de mots pour décrire ce qui nous est arrivé. Le groupe possède une chanteuse absolument démoniaque, qui happe littéralement le regard par sa présence. Elle éructe des propos la ramenant à ses jeunes années, rit dans les paroles, comme si elle se parlait à elle-même (ce qu’elle ne fait pas), scande un certain mal-être, gratte fiévreusement sa guitare, occupe l’espace, mouille le maillot. Bref, une show-woman comme nous en voyons peu.

Avec elle, une bassiste qui ne s’économise pas une seule seconde. Si elle joue au médiator, elle y met tant d’énergie que nous sommes étonnés que son instrument, par jeu de frottements, ne s’enflamme pas. Le guitariste, plus mesuré dans sa gestuelle (mais cela reste relatif), dispense quelques accords de blues bien sentis, des solos secs et claquants comme des coups de fouet (tout aussi brefs que cinglants). Le batteur, monter sur piles atomiques, dévaste tout par ses rythmiques au diapason de sa collègue bassiste.

Assister à un concert de The Bobby Lees, c’est se prendre un train lancé à pleine vitesse en pleine gueule. C’est intense, direct, plus nuancé qu’il y paraît, et surtout, malgré leur jeune âge, incroyablement mature et bien pensé. Un futur très grand groupe (mais il l’est déjà). A voir absolument !

the bobby lees

Les réjouissances du vendredi

17h15 : Lumer (Grande Scène)
18h15 : Howlin’grassman vs Stompin Bigfoot (Chapiteau)
19h00 : Joseba Irazoki (Grande Scène)
21h15 : Kelley Stoltz (Grande Scène)
22h15 : Chocolat Billy (Chapiteau)
23h00 : Warmduscher (Grande Scène)

soutenir litzic

Pour faire en sorte que litzic reste gratuit et puisse continuer à soutenir la culture

Nous retrouver sur FB, instagram, twitter

Ajoutez un commentaire