ERWAN BARGAIN, Abécédaire irraisonné…
… du cinéma d’horreur et d’épouvante contemporain (aux éditions Ocrée)
Ce livre, cet Abécédaire irraisonné comme l’a nommé Erwan Bargain, revient sur les films d’horreur ou d’épouvante qui l’ont durablement marqué au fil des ans. Sans remonter jusqu’aux prémices du genre, il s’attarde sur le cinéma s’étendant des années 70 à aujourd’hui, pointant ici ou là quelques pépites peu connues, expliquant le succès de certains « blockbusters » du genre, toujours avec passion et discernement.
Pas besoin d’être un fin connaisseur du cinéma d’épouvante ou de l’horreur pour savourer cet abécédaire copieux et sources d’informations capitales, concernant notamment les analyses propres à chaque œuvre ou cinéaste. Car, si Erwan Bargain met l’accent sur les films, il n’en oublie jamais de parler de réalisateurs majeurs de ce genre bien moins vide, de sens que certains peuvent imaginer.
Critique de la société, engagements divers, politiques ou sociaux, les réalisateurs pointent toujours, avec leur œuvre, des dysfonctionnements dans l’air du temps. Ainsi, les fameux zombies chers à Romero décrivaient, par exemple, les dérives de la société de consommation américaine. Les exemples pleuvent et, suite à la lecture de l’ouvrage, nous ne voyons plus les tueurs en série sadiques de la même manière.
Analyse et passion.
Si les zombies sont peu mis en avant, comme l’explique l’auteur (qui a déjà écrit un ouvrage relativement complet sur la chose, chroniqués en nos pages), il ne fait pas l’impasse sur les chefs d’oeuvres du genre,par exemple en disséquant avec précision les films cultes de Tobe Hooper (Massacre à la tronçonneuse), William Friedkin (L’exorciste), Steven Spielberg (Les dents de la mer) et autres Wes Craven (récemment avec Scream mais à la carrière longue comme le bras), Brian De Palma (Carrie) ou Stanley Kubrick (Shinning).
Il pointe aussi du doigt des auteurs réalisateurs plus récents comme James Wan (Saw, Conjuring), Julia Ducorneau (Titane), ou d’autres plus obscurs comme Umberto Lenzi. Peu importe le degré de notoriété, chacun à droit à sa « biographie », souvent pleine d’anecdote et d’informations précieuses. Il en va de même pour les films qui obtiennent une véritable plaque signalétique précisant leur spécificité, leur particularité et leur prise de position, tant artistique que politique.
Instructif et divertissant.
Erwan Bargain s’y exprime de façon claire et surtout ne prône pas la posture de « celui qui sait et qui étale son savoir ». Au contraire, il prend le temps de parler autant aux connaisseurs, qui trouveront dans certains portraits des informations qu’ils ne connaissaient (peut-être) pas, ou d’autres angles de compréhension quant à certaines séquences et/ou histoires, qu’aux néophytes qui pourraient avoir envie de se plonger dans certaines œuvres qui sont ainsi démystifiées.
Pour prendre un exemple très personnel, nous nous sommes plongés après la lecture de l’abécédaire, dans la série Conjuring. Mais l’envie de voir Massacre à la tronçonneuse, ou Dawn of the dead, nous titille aussi. Certains des films cités et disséqués sont des chefs-d’oeuvre du septième art, et pas seulement du genre. On pense notamment aux fameuses Dents de la mer (le premier volet) ou Shining, mais d’autres peuvent tout aussi bien leur damer le pion. Quoi qu’il en soit, la passion de Bargain est dangereusement contagieuse puisque nous cédons à ses recommandations, tout en étant un peu plus critique sur certaines œuvres (critique n’est pas que négatif évidemment).
Fort de ses presque 440 pages de découverte, cet Abécédaire irraisonné du cinéma d’horreur et d’épouvante mérite de figurer dans toute bonne bibliothèque et/ou dvdthéque. Car il s’avère, nous le rabâchons, un pied d’entrée dans les codes de ce cinéma qui n’a rien de mineur, et de nous permettre de mieux en appréhender les tenants et aboutissants. Un incontournable, quel que soit son lectorat, avisé ou novice, pour tout amateur de frissons ou qui aspire à le devenir.
Patrick Béguinel
