AYERDHAL Balade choreïale

Le dossier du mois de juillet, et celui du mois d’août, sera exclusivement basé sur des ouvrages parus aux Éditions Au Diable Vauvert.

plus ou moins récents, ces ouvrages sont tous très différents. Vous allez donc découvrir l’univers de cette maison d’éditions originale.

Puisque c’est l’été et que notre activité nous le permet, nous revenons sur des livres acquis ici ou là, pas forcément d’actualité, mais qui nous ont plu, d’une façon ou d’une autre, tous styles confondus. Nous commençons cette sélection avec un ouvrage de science-fiction.

Paru en 2009 (alors qu’il avait déjà été publié en 1994), Balade Choreïale d’Ayerdhal nous raconte les jeux de pouvoir lors de la colonisation d’Azir, une planète étrangement ressemblante à la Terre, mais restée dans une sorte de Moyen-Âge technologique.

Nous y retrouvons la Chorê Nerbrune (un ou une Choré est le plus haut élu d’un territoire d’Azir), le Noble Donneur Garth (un voyageur spatial explorateur de formes de vies extra-humaines), la vice-consule de la délégation Yooman (humain anglicisé) Méline Devyr et son mari Thémys. Si nous rajoutons l’aziri Le Garim, nous avons à peu près tous les personnages principaux entrant dans ce manège infernal de pouvoir.

Les Yoomans ont découvert Azir, la première planète habitée découverte par l’humanité. Si, sur le papier et dans les actes, les intentions sont pacifiques, le but est de coloniser celle-ci et de piller ses richesses. La vice-Consule négocie avec Nerbrune afin que tout se fasse sans heurts, avec l’approbation des Aziris que les Yoomans achètent grâce à leur technologie (aussi bien médicale que matérielle, même si ce partage reste circonvenu). Mais Nerbrune est loin d’être stupide et, petit à petit, met un stratagème pour torpiller les entreprises Yoomans.

Bon, dis comme ça, ce roman ne semble pas plus original qu’un autre et pourrait être rebutant avec sa couverture définitivement laide. Pourtant, Ayerdhal nous propose des personnages attachants, un univers très particulier et une morale plutôt positive. Si les personnages sont aussi attachants, c’est parce qu’ils sont avant toute chose antagonistes, et qu’est-ce qui fonctionne mieux que les différences opposant les êtres ?

Nous retrouvons donc l’idéaliste qui se fond dans le peuple et qui s’intègre parfaitement, la personnalité politique humaine qui essaye de faire de son mieux tout en étant, au moins en partie, manipulée, il y a la cheffe autochtone intelligente, loin d’être naïve quant aux intentions humaines etc… Bien sûr, il y a le vrai méchant, fourbe, et la vraie gentille, intelligente, mais le tout reste finement sculpté, sans manichéisme.

Le monde décrit par l’auteur est lui aussi visuellement (mentalement) riche. Nous sommes sur un monde sans moyen de locomotion sur lequel les êtres se déplacent en courant, grâce à des chaussures amplifiant leur foulée. Courir un marathon ne leur prend qu’une heure. Nous imaginons facilement un tel environnement, pourtant assez différent de ce à quoi nous habituent les livres et films du genre.

Ici, l’envahisseur ne fait pas la guerre pour conquérir cet espace aux richesses convoitées ( en or notamment), mais il offre des savoirs, des technologies pour mieux asservir les Aziris, les rendre dépendant à sa bonne parole, misant sur la crédulité de ce peuple à priori arriéré, mais qui est finalement bien plus malin que ne le laisse entrevoir leur retard technologique.

Sans vouloir en dire trop sur ce roman assez captivant (nous avons du mal à quitter ces lieux une fois le bouquin terminé), nous dirons qu’il aurait très bien pu se passer sur Terre, au sein d’un parlement, tant les jeux de pouvoirs y sont décrits avec précision. Si des fois nous sommes un peu noyés par l’abondance de manipulations/contre manipulations (tout comme nous pouvons mettre un certain temps à percevoir ce monde inédit tel que l’imagine Ayerdhal), nous prenons vite le pli et essayons d’anticiper les actions des différents protagonistes.

Nous aurions aimé que l’auteur développe encore un peu plus le jeu des relations entre Aziris et Yomans, creusent leurs différences (autre de physiques) et leurs points communs, afin d’être encore plus accros à son histoire. Mais même sans cela, Balade Choreïale nous scotche par sa maîtrise évocatrice du refus à l’obéissance face à un envahisseur tout sourire.

Comme un chant révolutionnaire poing levé face à l’appât du gain.

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