PIERRE GISÈLE, Distorsion + avant-première Des diamants dans l’eau.

pierre gisèle distorsion Des diamants dans l’eau, single en avant-première de l’album Distorsion.

Une vidéo, c’est le moyen de faire pénétrer dans un univers (dans le cas présent, il annonce l’album Distorsion), d’esquisser les contours d’un disque sans en dévoiler toute la complexité, ni toutes les humeurs. Un clip, c’est également montrer un lien entre l’image et le son, dégager un moyen d’expression qui fait à la fois sens et qui montre une direction artistique.

Avec Des diamants dans l’eau, Pierre Gisèle nous montre tout cela, avec une poésie concrète, un langage presque naïf, avec trois bouts de ficelle et une âme généreuse. Elle nous dit, à mots presque feutrés, toujours tendres, la beauté en toute chose.

Il n’est pas besoin de faire de longs discours, tout comme il n’est pas besoin de faire de longues chansons. Quand tout est dit en à peine plus de 2 minutes, il est intelligent de ne pas forcer le trait, pour que la magie se disperse gentiment dans l’eau. Tout est ici parfaitement exposé pour nous donner envie d’entrer dans l’univers de Pierre Gisèle et de Distorsion (Chronique de l’album sous la vidéo).

Premier album solo sortie prévue le 28/01.

Une pochette naïve, esquissée avec une main faussement enfantine, donne le ton. L’album Distorsion est d’une poésie désarmante, touchante, nous évoquant ces sentiments que l’on ressent si fort qu’il en deviennent incontrôlables. Avec son premier EP en solo, Pierre Gisèle (Teeth) met de la lumière dans un quotidien tourmenté.

Tout est ici d’une simplicité magnifique, d’une douceur angélique et d’une sobriété parfois cinglante. Les angles saillants ont pourtant été gommés, laissant place à des mots sortis du fin fond de la tête de leur autrice et de son lexique enfantin. Elle puise dans ses souvenirs d’enfance, dans une poésie naïve, des mots d’une justesse limpide. Les images sont éloquentes, jamais niaises, mais au contraire d’un bon sens frisant, presque, l’insolence.

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Comme un bouchon de champagne qui fait « pop ».

La magie réside autant dans le choix des mots que dans celui des mélodies qui les mènent à nos oreilles. Reposant sur de simples arpèges, quelques accords délicatement posés sur des cordes, ou des touches de clavier, forcément sensibles, elles apportent une dimension presque onirique à l’ensemble. Le pouvoir combiné des mots et des thèmes musicaux possède cette grâce, à deux doigts d’être infernale, de ceux qui n’ont jamais renié leur part d’enfance, tout comme ils n’ont jamais oublié de s’extasier devant ce qui nous est devenu invisible (ou de se mettre en colère contre une violence institutionnalisée).

À force de vouloir faire comme les grands, à vouloir s’enrichir, à vouloir détenir les richesses vaines et matérielles qui soit-disant nous rendent heureux, nous avons oublié de contempler les diamants qui brillent dans l’eau, avons oublié le pouvoir de faire la bise, avons oublier que l’on peut simplement se sentir mieux en se débarrassant du poids de la société au profit des bienfaits du soleil, de la terre etc.

Avec sa base pop, Lo Fi comme du papier que l’on froisse ou déchire, comme cette joie simple du bruissement des feuilles mortes que l’on piétine dans un bois à l’automne venu, Distorsion se fout d’une quelconque surenchère, d’une quelconque idée de concurrence. Il représente juste un besoin d’expression naturel, mis en musique d’une manière qui l’est tout autant.

Dire les choses.

Car dire les choses, ce n’est pas les imposer. Pierre Gisèle se contente d’exprimer ce qu’elle a sur le cœur. Elle exprime ce qui lui pèse, cette douleur de ce monde d’aujourd’hui, masqué, qui fait peur comme le putain de monstre dans le placard, celui qui tue l’humanité de tout le monde, qui rend les gens bêtes et méchants. Nous sentons que le poids de la crise sanitaire l’a impacté, comme elle a impacté tout le monde et si Je vais mieux (feat. Teeth) le martèle, nous nous doutons bien qu’il a aussi plombé le moral de la musicienne.

La musique, aussi délicate que peut l’être le choix des mots, donne cette impression chancelante, de dentelle qu’on risque de déchirer à trop l’écouter. Elle est parfois psychédélique, tête qui tourne dans un manège essoreuse (La dame au balcon), nous fait quitter terre pour mieux la fouler à nouveau, avec une conscience nouvelle. Des fois, elle est aussi arme de dénonciation massive et brutale, comme le terrible Tous les policiers qui sur une ritournelle, sur le mode d’une comptine, expose simplement une réalité que nous avons aussi constatée (plus d’une fois hélas).

Plutôt que de rester dans un marasme complaisant, plutôt que de rester négative, elle pointe aussi du doigt ce qui va bien, ce qui ira bien, même si des pointes mélancoliques d’une beauté foudroyante (on pense à l’instrumental Bedbugs) viennent remplir notre cœur de larmes. Mais pleurer, c’est pas grave, on a le droit même si on est des grandes personnes, ça nettoie l’intérieur.

Distorsion est un album qui n’hésite pas à montrer la vulnérabilité de son autrice. Derrière des images simples, on y lit en creux une sensibilité exacerbée, de celle qui, bousculée, peut ravager leur hôte, en proie au doute, à la violence cyclique et permanente dévoilée par les informations, par des hommes qui ont peur. On a, c’est con à dire, envie de couver Pierre Gisèle, de la protéger de notre amour comme elle nous en offre par camion entier avec ce disque.

Amour toujours.

Car tout se joue dans l’amour ici. Amour d’un oiseau qui pénètre un peu par erreur dans une maison (L’oiseau blessé), amour de sauter à pieds joints dans des flaques d’eau, amour de son papa ou de sa maman, amour d’une pâtisserie (en opposition à toutes les privations imposées), amour d’une nature qu’on ne cesse de pulvériser dans des logiques productivistes en oubliant que c’est elle qui nous a fait naître.

De ce disque nous retiendrons la beauté première, celle d’un regard qui n’oublie pas de voir, d’oreilles qui n’oublient jamais d’entendre. Tant pis si le dernier titre nous arrache des larmes de colère, l’ensemble du disque fait naître des larmes de joie. Et de l’amour en veux-tu en voilà pour cette musicienne qui nous réveille de notre torpeur en nous balançant des images et des textes arc-en-ciel, fait pleuvoir des diamants, et nous rappelle simplement ce que c’est que d’être vivant.

Le titre de Distorsion

Pas de titre de l’album, ça serait contraire à l’essence de ce disque (et puis ils sont tous biens de toute façon).

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