[MINI ALBUM] LUMER, The disappearing act //Désastre imminent.
Disponible le 02/04 chez Beast Records.
Ce debut EP, que nous préférons qualifier ici de mini-album puisqu’il est fort de 7 titres, insuffle, en 23 minutes un parfum violent d’urgence. The disappearing act, de Lumer, groupe post punk en provenance de Hull, dans le Yorkshire, nous met une bonne claque derrière les oreilles. Sans doute parce qu’il éveille, au-delà du sens des paroles qu’il véhicule, tous ces sentiments qui se nichent en nous à propos de la société dans laquelle nous vivons actuellement.
Un peu à la manière des écrivains, Lumer s’inscrit dans la démonstration de ce qui l’entoure. Et comme les écrivains, le groupe met en forme son propos dans un écrin qui laisse peu de doute quant à son implication, en tant qu’observateur mais aussi en tant qu’acteur, de ce quotidien dans lequel il ne se sent pas à sa place. Nul besoin pour cela de comprendre l’anglais pour saisir la nuance sociale du groupe. Tout transparaît à la fois de sa musique, toute en tension, et dans la voix du chanteur, Alex Evans, à la fois habitée et romantique à l’excès.
Ne pas se faire bourrer le mou.
Plutôt que de croire bêtement que tout est rose dans la société qui est la notre aujourd’hui, que nous soyons du bon ou du mauvais côté du Brexit, Lumer décide de mettre les pieds dans le plat en évoquant la pression des réseaux sociaux, la corruption des grands leaders mondiaux et, plus largement, la vacuité de l’existence que nous vivons, privée de sens et d’horizon.
Il convenait de mettre cela en forme avec un post punk tendance garage, évoquant, forcément, un peu, beaucoup, à la folie, Fontaines D.C ou, dans une certaine moindre mesure Squid. Ici, le son est massif, parfois abrupte, parfois dépouillé (comme sur le premier titre She’s innocent, très rock finalement). On y ressent aussi un blues terrible, celui qui chante les pleurs, les maux de l’existence (en partie sur White Tsar ou sur le magnifique Another day at the zoo qui se passe de commentaire). Tout est produit avec une certaine retenue, un côté froid, chromé, qui parfois nous aveugle quand le soleil vient à se refléter dessus. Pas de gros effet, mais une efficacité jamais démentie. Un léger écho sur la voix nous rappelle un peu l’esprit cold wave, mais Lumer s’en démarque très rapidement par le côté abrasif de ses compositions qui viennent râper nos os, titiller nos nerfs comme pour nous sortir de notre torpeur.
Scansion.
La voix est ici scandée, aboyée, comme si une douleur viscérale habitait Evans. L’urgence est là, nichée au creux d’une conscience refusant de se laisser bercer d’illusions. Pas de compromis. Le rythme rentre en nous, comme le foret d’une perceuse dans un mur de beurre. La déflagration propulse son électricité dans nos membres engourdis, dans notre tête rendue trop malléable par la consommation indécente d’écrans. Comme une douche froide, l’uppercut Lumer vient nous surprendre, alors que nous pensions que plus rien ne pouvait le faire.
Il n’y a pas de gros effets sur The disappearing act. Les mélodies vont au plus efficace, sans jamais sombrer dans une quelconque facilité/passivité. Les motifs restent logés dans notre cortex, ressurgissent violemment quand nous regardons, par exemple les infos et que l’incongruité de celles-ci nous prend à la gorge et en vient à nous rendre à la fois véhéments et dégoûtés de tant d’aberrations. Vous l’aurez compris, ce groupe est totalement en prise avec son époque, et, nous ne savons pas pourquoi, nous pensons que cela ne le ravit pas plus que cela. Parce que, n’en déplaise à certains, la musique n’est pas simplement faite pour être jolie à l’oreille. Elle est là pour faire changer le monde. The disappearing act est une pièce supplémentaire à cet édifice de déconstruction d’une société malade. Et forcément, on valide.
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