[ALBUM] LAURA PERRUDIN, Perspectives et avatars.

Perspectives et avatars, troisième album de Laura Perrudin (déjà disponible).

Cet album, nous pouvons dire qu’il a tourné dans la platine, un nombre incalculable de fois. Parce qu’il est riche, parce qu’il aventureux, parce qu’il ose. Enfin, le voilà chroniqué, ce qui nous paraît à la fois logique et mérité car Perspectives et avatars est un disque de pop comme on n’en fait pas.

Nous sommes un peu déçus, nous devons l’avouer, car Laura Perrudin est passée en concert chez les amis de Bonjour Minuit, à un moment où les confinements étaient pour l’un fini, pour l’autre pas entamé. À en croire notre collègue de Concert Monkey, qui a été plus malin que nous et qui a assisté au show (lire son report ), la dame possède de sérieux arguments à faire valoir sur scène. Nous n’en doutons pas une seconde à l’écoute de cet album incroyable.

Harpiste.

Il faut d’abord savoir que Laura Perrudin est harpiste, et que, pour jouer sa pop hybride, elle a créée son propre instrument. Ne cherchez donc pas, si vous maîtrisez cet instrument complexe et imposant, à reproduire ses sonorités, vous n’y parviendrez simplement pas. Celles-ci sont indéniablement le point fort du son de la dame, car elles se démarquent de l’électricité d’une guitare, se rapprochant parfois de celle d’un violon (toujours électrique), mais avec une palette encore plus vaste, à la fois douce et, parfois aussi, indomptable.

La maîtrise instrumentale flirt avec le sans faute d’un bout à l’autre de l’album, notamment parce que la production est au diapason de l’exigence de la harpe. Autrement dit, il s’agit, dans le cas de Perspectives & avatars d’un tout formé par l’instrument et la façon dont il est mis en avant. Comme pour jouer le contrepoint, la voix de Perrudin, souvent accompagnée de guest haut de gamme (on pense à Emel Mathlouthi que nous aimons beaucoup par ici, ou à Mélissa Laveau par exemple), apporte une douceur au côté rugueux et abrasif de l’instrument (lorsqu’il est distordu à l’extrême).

Univers parallèles.

Nous naviguons donc en territoire pop, même si celui-ci sait saisir les chemins de traverse qui s’offrent à lui pour aller s’acoquiner à des aspérités plus urbaines. Nous avons donc parfois affaire à des incursions hip-hop (Game over), ou à d’autres, plus électro. Celles-ci permettent à la musicienne de proposer un éventail de possibilités que nous n’entrevoyions pas à un instrument tel que la harpe. Les basses peuvent se faire puissantes, telluriques, loin de l’aspect souvent « féérisé » et très stéréotypé, à tort, de celle-ci.

Au contraire, elles nous placent dans un terreau sombre, presque violent, en tout cas qui engage le corps dans un combat dont nous ne savons pas, au final, qui sort vainqueur. Il faut donc avouer que nous ressortons lessivés de l’écoute de Perspectives et avatars qui demande une attention de tous les instants pour ne pas nous perdre dans ce qui est son point fort, à savoir nous offrir une relecture à la fois puissante et sensuelle de la pop.

Des compositions fortes.

Ajoutez à cela des compositions fortes, qui reviennent sans cesse en tête et vous obtenez une équation résolue entre exigence artistique et accroche du public. Les lignes de chant sont limpides, plus classiques que les instrumentations, souvent expérimentales et exigeantes. Le mariage s’effectue pourtant dans une sorte de grâce « extraterrestre », entre groove sensuel et « froideur » inventive tous azimuts.

Il est important de noter que Laura Perrudin maîtrise son sujet du début à la fin. La tracklist est savamment étudiée, possède des points de relance pertinents et alterne moments d’accalmie avec morceaux plus virulents avec dextérité. Nous obtenons donc au final un disque qui tient admirablement la route, même si nous devons pointer un petit point faible, à savoir qu’il traine peut-être un peu en longueur (le prix de l’expérimentation est qu’elle lessive par l’attention qu’elle demande). Pour le reste, nous sommes en droit de dire et de penser que Laura Perrudin est un futur grand nom de la scène française (même si elle chante principalement en anglais).

A découvrir sans tarder !

Le titre de Perspectives et avatars.

Parce qu’il est le seul en français (hormis les quelques mots de Philippe Katerine en guest sur Push me), ce qui justement modifie les perspectives de Laura Perrduin, nous citerons Le refuge de la couleur (feat Morgane Houdemont). Bon, il faut aussi avouer qu’il est aussi très impactant émotionnellement. La harpe fait ici des étincelles et nous propose une alternative pop baroque/aspect world music assez réjouissante. Nous décelons dans ce titre une qualité d’écriture réelle qui nous fait nous dire que potentiellement, Laura Perrudin a encore plein de possibilités à étudier, autant musicalement que textuellement. Bref, c’est un grand morceau, à la fois étrange et sensuel qu’il faut écouter fort et dans le noir pour en percevoir toutes les nuances, toutes les perspectives (et de potentiels avatars invisibles jusqu’alors).

laura perrudin perspectives et avatarsRevoir The W world.

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