JACKIE MOONTAN, The longest sunday in history

jackie moontan the longest sunday in history

crédits : Lynn Theisen copyright5

EP disponible le 15/10.

Voici un objet plutôt surprenant et rafraîchissant. Se situant à la croisée de la soul, du funk, de la pop, le « crooner » Jackie Moontan ne choisit pas la facilité pour nous séduire. Pourtant, à l’écoute de ces quatre titres colorés, relatant The longest sunday in history (le dimanche le plus long de l’histoire, référence au confinement de 2020), c’est bien ce qu’il réussit à faire avec sa musique.

Impossible de résister, l’EP dégage trop de charme, trop d’inventivité pour que nous restions de marbre. On pense par moments à Frank Zappa, à Snoop Dog, à Prince, rien que ça, même si ces associations peuvent paraître contre nature. Pourtant, de l’un on retrouve des compositions explosives et un humour potache (nous rappelant la fameuse citation de Zappa Does humour belong in music?), de l’autre le flow unique, du dernier un sex-appeal incroyable. Bref, l’automne s’annonce chaud avec Jackie Moontan.

En formule « groupe ».

Pour la première fois, Jackie Moontan s’est entouré de musiciens (sans doute le confinement lui a un peu pesé sur les épaules), soit Pol ‘Bootsy’ Belardi à la basse et Jérome ‘Little Jay’ Klein, pour un solo de synthé électrique. Grand bien lui a pris car nous sentons un dynamisme singulier nous sauter aux oreilles sur l’ensemble des morceaux. Mais il faut dire que le « crooner » possède un truc que les autres n’ont pas : un charisme totalement hors norme.

Celui-ci se traduit par l’alter ego qu’est Jackie Moontan. En effet, ce poète absurde prétend être un homme de la lune. Jouant de l’autodérision comme on joue aux cartes, il avance parmi les hommes, en observateur discret malgré ses costumes aux matières et couleurs scintillantes. The longest sunday in history relate ce qu’il a entrevu lors du confinement.

Et alors ?

Il décide de tenter, malgré les conditions d’enfermement, de garder à l’esprit qu’il faut toujours et encore offrir du rêve, et des paillettes. Alors, malgré cette nouvelle existence monotone, il entreprend de montrer que la vie ne s’arrête pas, même si elle prend parfois des tournures chelous, réveille des faces sombres, des perversions innommables (l’enfermement n’a pas fait que du bien). Parmi celles-ci, la gourmandise sur Butter, puisqu’il faut sortir acheter à manger et ainsi risquer sa vie face au virus meurtrier, la surconsommation en achetant un téléphone hors de prix, qu’il n’a pas les moyens de s’offrir, mais qu’il le fait quand même (Louis V Telephone).

Enfin, quand chacune de ses mauvaises manies s’accouple à la luxure, parce que être seul ça va bien deux minutes, et qu’il brave les interdictions pour rejoindre sa plus belle histoire d’instagram (Crystal roof), Jackie Moontan s’en donne à cœur joie, pour notre plus grand plaisir (qu’on pourrait croire coupable, mais pas du tout).

Musicalement, ça donne quoi ?

Cela nous donne un mélange détonant. Avec un premier titre très conceptuel, Wishbone, nous place face à un ovni. Début d’une lenteur lascive, symbolisant la monotonie, sur un spoken world et quelques touches d’orgue, quelques percussions, et des vocalises sexy, nous ne sentons pas du tout venir les cassures, à la fois rythmiques et stylistiques. En effet, à 1’18 s’annonce, avec des handclaps et un effet chant collectif, un funk sexy, puissant. Le rythme s’emballe, les claviers s’éclatent, le tout dans un groove dansant. Puis, boum, retour à une période calme. Les couleurs disparaissent, le morceau semble fini. Néanmoins, les couleurs que nous pensions disparues réapparaissent modifiées, genre conte de fées, avant de repartir de plus belle pour un final funky que n’aurait pas renié Prince.

Butter, lui, s’avère plus « classique », soul. Langoureux, à la basse roulante, il nous évoque le zappa de Bobby Brown goes down avec ce second degré dans les paroles (néanmoins moins sarcastique que chez Zappa). Musicalement, le synthé étincelle, la voix se fait dévastatrice. On aimerait danser avec l’être aimé, et manger ce fameux pudding dont il est ici question.

Ça continu.

Place à un presque hip-hop sur l’introduction de Louis V telephone. Snoop Dog n’est pas loin, même si l’entame du titre, à base d’une fausse conversation téléphonique nous place sur une fausse piste. Mais très vite, l’esprit ouest coast s’impose avec une basse, toujours funky, mais un flow qui a du chien dévaste tout. Toujours avec ce jeu sur les voix trafiquées, le morceau nous rétame quand il quitte la Californie pour retourner vers une soul écrasante de chaleur.

Crystal roof achève la démonstration qui n’en est pas une (trop d’humour et un presque kitsch assumé pour être prétentieux). Commençant comme une bluette 70’s à base de flonflons synthétiques le côté crooner ressurgit avec tact. Les choeurs sont en fusion, le rythme suave et les démangeaisons au niveau de l’entrejambe se font ressentir instantanément. Sexy en diable, encore une fois.

Cet EP, qui pourrait à tout moment sombrer dans le ringard nec plus ultra, impose pourtant son style et nous ravit au plus haut point. Ne ressemblant pas à grand-chose de connu en reprenant des éléments bien connus par contre, en les restituant à sa sauce mi-piquante mi-moqueuse mi-sérieuse, Jackie Moontan nous rend dépendants à sa flamboyance. Rien que ça.

soutenir litzic

Nous retrouver sur FB, instagram, twitter

On pense à Yes basketball

Ajoutez un commentaire