[ ALBUM ] DRUNK MEAT, Plus ça va, moins ça va

Découvrez Plus ça va moins ça va, l’album de Drunk Meat (autoproduction).

Avec un nom pareil, il fallait faire un disque qui claque. Drunk Meat réussi son pari avec Plus ça va moins ça va, disque crépusculaire, punk, tirant à boulets rouges sur l’état de décomposition avancé de notre société. Forcément, nous ne pouvons que nous dire qu’effectivement, plus ça va, moins ça va.

Drunk meat.

Faut-il vraiment vous traduire le nom du groupe ? Pour les non anglophiles, nous le faisons : Drunk meat signifie viande saoule. Et d’alcoolisme il est effectivement question dans cet album (mais pas que) paru il y a peu, en autoproduction. Le groupe, basé à Bordeaux, est un duo masculin féminin. Sur scène, il est au chant et à la guitare, elle est au synthé (elle y joue la basse) et en soutient voix. Ils jouent un post punk teinté no-wave, swamp rock, ténébreux, désespéré, au regard perçant sur les travers étant les nôtres.

L’impression qui s’empare de nous en entendant les premières mesures de Cinglée (qui ouvre les « réjouissances » ) est que nous allons pénétrer dans un univers relativement glauque. Les synthés oppressants, la batterie toute en tension (qui ne se libère jamais réellement) contribuent à rendre l’ambiance pesante. Les quelques notes de guitare, plutôt claires, légères, mais distordues apportent une teinte d’espoir (mais à peine). Le son est joliment crade, étouffé, mériterait peut-être un meilleur mastering, mais, dans l’ensemble, donne une couleur évidente à l’album.

Obsédant.

Bien sûr, nous ne parlons que de l’entame du disque. Par la suite, cette batterie reste toujours menaçante, tout comme les riffs tranchants de la guitare. Lorsque les voix apparaissent, elles se glissent dans l’atmosphère musicale avec pertinence. La voix masculine est traînante, presque parlée, blasée. Elle délivre ses constats d’une façon presque atone. La voix féminine apporte une couleur guère plus réjouissante, même si légèrement plus douce. L’ensemble procure un sentiment de danger, un rythme obsédant, une fin de non-recevoir permanente.

Les textes, en français, ne sont pas optimistes eux non plus. En fait, tout y est soit réaliste, soit pessimiste (à vous de choisir). Ils dénoncent une réalité tangible avec des mots justes, qui frappent par leur concision. Si l’espoir ne semble pas être une option, le désespoir n’y est pas non plus une fatalité. Enfin si, mais justement, en pointant ce qui ne va pas, le groupe nous amène devant les yeux une réalité qu’il nous faut à tout prix enrayer.

Tout y passe des thèmes sociétaux actuels, à ceux que nous décidons de ne plus remarquer (consciemment ou non), comme si nous étions aseptisés par un flux de données montrant paradoxalement à tout voir. En gros, Drunk Meat pointe les errances de notre société, et nous remet en face de nos propres manquements.

Dark dark dark.

Nous n’allons pas vous mentir, l’ambiance est ici très très sombre. Nous disions ténébreuse, crépusculaire, glauque, oppressante, nous ajoutons étouffante, sans vision sur un avenir plus ensoleillé. L’orage gronde un peu tout au long de l’album, sans pour autant véritablement crever l’abcès, nous laissant dans un état de fébrilité déconcertant, car nous restons sur les nerfs, sans exutoire à cette tension sourde et lancinante.

Le talent d’écriture du duo est bel et bien présent. Les textes ne manquent pas de relief, même si nous croyions lors de la première écoute qu’il enfonçait des portes ouvertes. Nous vous rassurons, ce n’est pas le cas. Pas de démagogie ici, juste une constatation simple, basique, que plus ça va, moins ça va. Et la boucle est bouclée.

LE titre de plus ça va moins ça va.

Pour nous le titre de Plus ça va moins ça va qui nous botte le plus, c’est Patron. Musicalement, c’est lourd, répétitif, éclairé d’un pont dramatique (la guitare y insuffle effectivement un sentiment de drame imminent), avec une batterie une nouvelle fois en tension, jamais libératrice. L’ambiance est (encore) une fois au pessimisme et déclare, en même temps que les paroles, la fin inéluctable d’une situation en entraînant une autre.

Il est ici question d’une sordide histoire de meurtre, de celle d’un patron, par sa collaboratrice. Trop de pression, promotion canapé, tout qui tend vers cette fin en apothéose, mais qui relève néanmoins d’une certaine vérité. Le sentiment désenchanté qui règne sur ce titre en particulier, mais sur l’album d’une façon plus générale, est évocatrice d’un mal être sociétal que nous avons pu ressentir lors des diverses manifestations de ces derniers mois (années?). Bref, Drunk Meat s’avère lucide sur Patron, comme sur l’ensemble de son disque, ce qui laisse peu de place aux réjouissances. Et c’est tant mieux, parce que ça nous amène à réfléchir sur le sens de tout ça.

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