DOUG TUTTLE, Pinecone, euphorique mélancolie

doug tuttle pineconeNouvel EP disponible le 09/07 chez Wild honey records.

Nous sommes instantanément projetés dans l’univers de Doug Tuttle, dès les premières mesures de Bruised and Bothered, morceau d’ouverture de Pinecone, son nouvel EP. La recette miracle tient dans quelques mots : pop, folk, esprit Lo Fi, répétition, mantra. Ce disque est une réponse à ce que son auteur à ressenti face à la pandémie et à ses aspects terrifiants. Nostalgique, légèrement mélancolique, il y évoque les moments passés, insouciants, vu à travers le regard de celui qui ne sait pas quoi attendre du lendemain.

Forcément, quelques noms vont surgir comme références. Nous pensons pour notre part un peu à l’esprit d’Elliott Smith, à la musique de Seawolf, à tout un courant nord-américain indé qui prend le temps de produire des musiques profondes, s’attaquant plus à l’émotion ressentie qu’au « spectacle » d’une musique business. Autrement dit, ici, c’est du côté d’une intimité dévoilée, d’une mise à nu sans prétention que lorgne Pinecone.

Guitare et voix.

Les atours folk sont les premiers à nous sauter aux oreilles. Même s’il s’agit de pop, l’esprit reste boisé, de ceux qui invitent à se poser sur le perron de la maison et à contempler la nature qui s’étale devant nous.

Nous imaginons un chalet au bord d’un lac, enveloppé dans le silence d’une forêt trépidante de vie. Nous nous plaçons d’emblée en spectateur muet de cette scène solitaire. De notre poste d’observation, nous voyons un homme sortir de son habitation. L’air grave, il prend de profondes inspirations, qu’il expire de manière tout autant profondes, tremblant comme si de violentes décharges électriques parcouraient sa colonne vertébrale. Ces respirations ont pourtant sur lui un effet positif, elles agissent sur lui comme une libération qui l’amènerait à tenter de retrouver une sérénité à jamais perdue.

Puis il se mettrait à marcher sur une pelouse parfaitement entretenue pour gagner les abords du terrain en pente douce vers l’eau placide d’une vaste étendue semblable à un miroir naturel. Le décor s’y réfléchit, laisse dériver dans ses reflets des nuages cotonneux. Un léger vent gonfle ses vêtements, autant que ses poumons. L’anxiété, le stress, peu à peu le quittent. Nous le voyons s’assoir sur un rocher, à quelques centimètres de l’eau limpide du lac et s’oublier dans une contemplation imperturbable.

Ses émotions sont encore vives. Il repense à l’avant, a du mal à se projeter dans l’après, mais il sait qu’il n’a pas le choix, que la vie est ce perpétuel mouvement qui nous pousse à avancer, quoi qu’il arrive. Il sort un carnet, se met à écrire. Les mots coulent, peut-être aussi ses larmes. L’un comme l’autre lui font du bien. Son sac se vide un peu, la mélancolie qui empoignait son cœur relâche un peu de son étreinte, il se sent plus léger.

Pureté mélodique.

Tous ces éléments sont audibles dans Pinecone. La nostalgie pleine d’un d’espoir indéboulonnable se ressent dans les quatre premiers morceaux, tandis que le dernier sonne comme le pas vers un nouveau monde. Les guitares dont la base est acoustique, réveillent les douleurs intimes sur leurs parties électrifiées. Usant de répétition de certains de ses thèmes, qui expriment une presque forme de rumination face à l’incompréhension de ce monde détraqué, Doug Tuttle appuie son propos, sans pour autant manquer de tact. Nous ne nous sentons jamais acculés dans une pensée mortifère, mais au contraire dans un mouvement porté par une foi en la vie.

Quelques claviers appuient les mélodies, qu’elles soient instrumentales ou chantées. Les lignes de chant sont rassurantes, rendues lumineuses par la voix douce du musicien. Elle nous dirait que même si tout semble aller mal, tout ne s’achèvera pas de façon dramatique, qu’un happy end reste toujours possible. Weak ends, avec son introduction lumineuse, semble abonder dans ce sens. Ce cinquième et dernier titre délaisse la mélancolie pour une base plus « joyeuse », même si toujours enrobée d’une gravité, ici solaire.

Pinecone parvient à rendre des sentiments ayant plutôt une connotation pessimiste, grisants, presque euphoriques. Les rythmiques, plus légères que les sonorités présentent sur l’EP, jouent en effet le contraste et nous réconfortent face à la peur de lendemains difficiles. Ce disque s’avère en ce sens un excellent remède au marasme, à écouter quand tout paraît s’écrouler autour de nous.

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