NLC – THE GOLDEN AGE (OF NOTHING)

nlc the golden age of nothingSorti du silence.

Quand on pense que cet homme est resté muet durant quatorze ans… Depuis son retour aux affaires en janvier 2021, Julien Ash, grand gourou des Nouvelles Lectures Cosmopolites, a livré pas moins de vingt et un albums ! Le vingt-deuxième, qui nous occupe aujourd’hui le voit ici revenir en formation élargie avec un « Golden Age (Of Nothing) » protéiforme et passionnant.

Pour autant, ce n’est pas en terrain totalement inconnu que nous abordons cette dernière livraison. En effet, le noyau dur de ces NLC nouvelle mouture, constitué de Julien Ash et Aloïs L., lui, ne change pas. Le père et le fils restent aux commandes du vaisseau amiral et impriment fortement leur marque sur cet opus (on y reviendra). Mais avec Christian Gonzalez (Grosso Gadgetto) aux beats et synthétiseurs, Pierre-Yves Lebeau à la voix et aux guitares et Liesbeth Houdijk aux voix, c’est quasiment un super groupe dans la plus grande tradition des Blind Faith ou Traveling Wilburys auquel nous avons affaire ici. Que l’on se rassure : contrairement aux projets précités, la montagne n’accouchera pas d’une souris.

En outre, il est important de préciser qu’il n’y a rien de passéiste ici, mais un mélange d’expérimentations et de classicisme pour un résultat… très pop.

Comme un air de Bowie.

En effet, dès « Learning to fly (cloudy mix)« , le ton est donné : basse synthétique obsédante, arpeggiators glacés, boucles rythmiques, le tout au service d’une composition où la mélodie prime sur les expérimentations ; on est plus près du Bowie de « Scary Monsters » ou d' »Earthling » que des drones lancinants de « Cave Crawlers » ou du plus récent « Per Ore« . Les instrumentaux « Show me the way » et « Epsylon » participent également de cette veine mélodique.

« Ebsidion« , le premier sommet de l’album, accentue encore cette impression. Pure pop song aux arrangements classieux portés par la voix de Pierre-Yves Lebeau et les choeurs de Liesbeth Houdijk, ce morceau évoque le meilleur de la musique anglaise. Le violon d’Aloïs L. y fait merveille, aussi bien dans ses excursions solitaires que dans les subtils pizzicatos qui viennent ponctuer le morceau.

La rythmique claque -mais sans lourdeur- et l’économie de mots nous emmène loin. NLC s’autorise là quelques digressions floydiennes, sans pour sombrer dans le bavardage inutile. « Vertigo« , autre sommet de l’album, emploie les mêmes ingrédients auxquels viennent s’ajouter quelques déflagrations franchement rock et un riff de guitare entêtant qui aurait toute sa place sur le « Station To Station » du Thin White Duke. Guitare, voix : Pierre-Yves Lebeau donne sur ce titre toute la mesure de sa palette vocale et de son talent, s’autorisant des envolées du plus bel effet.

Derrière, Julien Ash et Aloïs L. lâchent les chevaux et leurs beats qui tabassent. Surprise, le morceau s’achève en forme de ballade gothique cold à la Dead Can Dance. Ces gens-là savent tout faire. Sceptique(s) ? Les deux versions de « Tangentielles » et « Esquive la collision » achèveront de vous convaincre : ces morceaux réussissent haut la main l’examen de passage de la langue de Shakespeare à celle de Molière.

Une pièce maitresse.

Le cas de « Tangentielles » est, à ce titre, extrêmement intéressant. Il expose à lui seul toute l’étendue du talent du groupe. Si la première version prend son temps et se développe sur sept minutes sans que le moindre ennui ne vienne poindre, « Tangentielles » (silence minéral) joue, elle, la carte de la miniature épurée à la mélodie sublime et aux arrangements exquis. Le texte onirique de Pierre-Yves Lebeau, tout en association d’idées, flirte avec le surréalisme. Dans les deux morceaux, l’équilibre est parfait ; impossible de les départager. Paire d’as.

Et Julien Ash dans tout cela ? Que l’on se rassure, le Grand Timonier des NLC, s’il semble se mettre en retrait avec une élégance qui l’honore, apparaît finalement comme le véritable maître d’œuvre du projet. Ses machines forment l’architecture souterraine de l’ensemble, soutenant les compositions et apportant ce liant qui donne son unité à l’album. Nappes sépulcrales et bidouillages bruitistes à la Jim O’Rourke sur « Esquive la collision », piano et field recordings sur l’ouverture néoclassique « Show me the way« , drones ambient et expérimentations sur « The Invisible Path Of Golden Age« , Ash est partout, narrateur omniscient de son oeuvre, metteur en scène s’effaçant derrière une création pour mieux en habiter chaque mouvement.

Un chef d’oeuvre.

Ne lésinons pas sur les mots : « The Golden Age (Of Nothing) » est un chef-d’œuvre. Pas moins. De la trempe d’un Bowie, avec lequel il partage cette subtile balance d’expérimentation et d’accessibilité, cet album dissimule toutefois, derrière une apparente immédiateté, une complexité (et donc une richesse) que l’on ne saisit qu’après plusieurs écoutes. Celles-ci seront donc hautement recommandées. Pourquoi pas en CD ? « The Golden Age (Of Nothing) » est paru le 4 novembre sur ce support sur la page Bandcamp du groupe et chez les Allemands d’Attenuation Circuit.

Découvrir le disque : https://emerge.bandcamp.com/album/the-golden-age-of-nothing

BenBEN

Frontman de Wolf City, impliqué dans des projets aussi divers que The Truth Revealed ou La Vérité Avant-Dernière, Ben a grandi dans le culte d’Elvis Presley, des Kinks et du psychédélisme sixties. Par ailleurs grand amateur de littérature, il voit sa vie bouleversée par l’écoute d’ « A Thousand Leaves » de Sonic Youth qui lui ouvre les portes des musiques avant-gardistes et expérimentales pour lesquelles il se passionne. Ancien rédacteur au sein du webzine montréalais Mes Enceintes Font Défaut, il intègre l’équipe de Litzic en janvier 2022.

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