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ELIANE SALIBA GARILLON, Lorsque le ciel s’en mêle
Roman paru aux éditions Fdeville.
Un homme, se croyant responsable d’un accident ayant plongé une fillette dans le coma retourne sur les terres familiales. Suite à une étrange rencontre, il se retrouve chargé d’une mission que certains qualifieraient de divine. Mais pourquoi lui ? Et la fillette sortira-t-elle du coma pour autant ? Dans Lorsque le ciel s’en mêle, roman qui entremêlent plusieurs histoires, Eliane Saliba Garillon nous plonge dans les interrogations d’un homme en proie au doute. Mais au-delà de ce simple postulat, elle nous interroge sur nos responsabilités, quelles qu’elles soient.
Alors qu’il attend la réponse imminente lui indiquant s’il hérite d’un prestigieux contrat, Jonathan se promène dans les rues de New York. Son téléphone sonne, la réponse est positive. Fou de joie, il fait tourner sa veste, mouvement qui surprend une jeune fille qui lâche le ballon qu’elle tenait à la main. Échappant à la vigilance de sa mère, elle se précipite vers son ballon. Un taxi passe à cet instant. Le choc est inévitable : la fillette, gravement blessée, sombre dans le coma.
Responsable ?
Jonathan est détruit par cet accident. Il se sent responsable, et qu’importent les mots de son collègue, de sa grand-mère qui vit en Italie, il ne remonte pas la pente. Pour s’aider dans cette entreprise, il rejoint sa celle-ci à Locorotondo. Là, il y fait la rencontre de ce qu’il croit être une SDF qui va, dans une »prophétie » , lui révéler que dans 7 signes la fillette se réveillera. Le prenant pour un illuminé, Jonathan ne prête pas véritablement attention aux propos du clochard. Il rejoint alors les États-Unis mais, sans bonnes nouvelles de l’hôpital où est hospitalisée la fillette, il quitte son emploi et la ville pour s’installer à Naples, pas loin de Miami. Il va y rencontrer 7 personnes et/ou couples aux histoires de vie complexes et malheureuses.
L’écriture d’Eliane Saliba Garillon est saisissante d’aise. Nous plongeons instantanément dans cette histoire pour le moins improbable. L’accident survient dans les premières lignes du livre, tout s’enchaine, pour le lecteur comme pour Jonathan. Nous sommes partis prenante de ce type qui se trouve détruit par le poids d’une culpabilité qu’il n’a pas à endosser. Avec lui, nous découvrons ces facéties du ciel, ce message « divin » à travers 7 histoires (plus une) et nous plongeons dans les affres du destin.
Tout est-il déjà tracé ?
Ce roman nous interroge donc sur le poids de la culpabilité, mais aussi et surtout sur ce thème important qui est celui de la responsabilité qui incombe à chacun d’entre nous d’adopter face à nos propres actes. Toutes les histoires possèdent ce point commun : celui d’une responsabilité non admise mettant d’autres personnes dans une situation inextricable, mais eux aussi potentiellement responsables du pire.
Tous les chapitres concernant ces 7 histoires se décomposent de la façon suivante : la rencontre avec Jonathan à Naples, un contact brûlant, l’histoire d’une personne révélée, la chute, puis le compte rendu de Jonathan à sa grand-mère. Le rythme y est enlevé et en quelques mots bien choisis seulement, Eliane Saliba Garillon nous place au cœur de vies brisées. Aisément, nous nous identifions aux victimes, même si nous parvenons aussi à comprendre les coupables. D’ailleurs, la frontière est mince, notamment concernant l’histoire du courtier en bourse.
Peut-être que le portrait de Jonathan aurait pu être plus fouillé du point de vue de sa psychologie, de façon à ce qu’on s’attache encore davantage à ce personnage profondément humain, mais cela ne gâche pour autant pas l’histoire invraisemblable (de notre point de vue cartésien, hermétique au fantastique dans la vie de tous les jours) qui est la sienne. Le talent de l’autrice parvient effectivement à rendre cela dans l’ordre des choses, ce qui n’est pas peu faire.
Dent pour dent.
Car ce qui apparaît derrière la célèbre loi du talion « œil pour œil, dent pour dent » trouve ici une résonance particulièrement juste, de ceux qui, laissés seuls, entendent se faire justice coûte que coûte. Le sentiment d’injustice les conduits aux plus noirs desseins, mais finalement moins que la huitième histoire sans qui tout ce livre ne tiendrait pas debout de façon aussi magistrale. Car si tout cela arrive à Jonathan, ce n’est absolument pas par hasard. Alors, tout est-il déjà tracé, le destin existe-t-il ? Cela, c’est à chacun d’entre nous d’y donner une réponse une fois le livre terminé.
En un peu plus de 280 pages, Eliane Saliba Garillon nous montre que chacun de nos actes à une conséquence. Qu’il ne faut jamais oublier, non plus, d’être humain. Que seule notre humanité, comme celle de Jonathan, peut changer le cours des choses. Une fois encore, les éditions Fdeville mettent l’humain en priorité dans un de leurs livres et montrent l’homogénéité de leur catalogue que nous ne vous conseillerons jamais assez de découvrir pour ses qualités à la fois d’écriture et d’humanité, mais également, malgré tout ce sérieux des thèmes abordés, pour leur côté divertissant.