DEATH BY SELFIE, Réalité augmentée, EP virtuel ?
1 er déjà disponible.
La quête de technologie, encore et toujours, nous engage à repousser les limites physiques telles que nous les concevons d’ordinaire. Au réel se supplante la réalité augmentée, celle qui fait apparaître des motifs irréels, virtuels, dans des décors étant totalement réels. Alors, en créant ce premier EP (au terme d’une collaboration d’une vingtaine d’années), Death by selfie nous propose une électro forcément rétro futuriste.
Le voyage est spatial. Si, par exemple, le Moon Safari d’Air nous propulsait quelque part aux confins d’une galaxie improbable, Death by selfie nous entraine au cœur de la machine. La matrice quoi, enfin à peu de chose près. Tout y passe, la frénésie des réseaux sociaux, les vocoders, les aspects plus pop culture aussi, dans un EP 6 titres explorant diverses pistes, assez hétérogènes les uns des autres, mais homogène néanmoins dans la teneur du message délivré.
Machines et instruments.
Tout est une histoire d’équilibre. Il faut, pour donner un caractère concret à un tel disque, faire la balance entre ce qui évoque la technologie, sans pourtant perdre en intimité. Ainsi, le duo opte pour une bonne dose de machine, mais également d’instruments plus traditionnels. Comme notre auteur du mois nous le dit dans son interview « le fantastique, c’est l’irruption de l’irréel dans le réel. Il faut construire un cadre crédible avant de le mettre à l’épreuve de l’irrationnel ». Il en va de même pour ce disque. En effet, dans Réalité augmentée, il y a réalité. Le cadre crédible se base donc sur des éléments concrets, guitare, claviers, voix naturelles, que le duo mélange ici aux machines et aux voix vocodées. L’effet est plutôt réussi et développe un univers contrasté, plutôt doux, ou en tout cas pas agressif.
En fait, l’ensemble est étrangement intimiste (le côté rétro futuriste aurait pu avoir tendance à rendre la chose moins « humaine »), Death by selfie optant pour le regard lucide sur le monde actuel. La plus violente diatribe concerne certainement We are (what VR) qui épingle, dans le texte et de façon plutôt subtile, les travers de la virtualité des réseaux sociaux, thème régulièrement mis, et de plus en plus, en avant par les artistes (avec des résultats assez fluctuants nous devons tout de même le souligner). Ici, nous sommes dans une belle démonstration d’écriture, simple, pas intellectualisée à outrance, qui vise l’émotion plutôt que la démonstration. Et ça fonctionne.
Entre pop et électro.
Si les bases musicales font la part belle à l’électronique, nous restons néanmoins dans le giron de la pop. Sans doute grâce aux paroles qui le plus souvent sont chantées. Quand elles sont vocodées, elles le sont de façon flagrante, c’est-à-dire que l’effet n’est pas là pour combler une déficience de technique vocale, mais vraiment pour jouer sur l’effet droïde. À noter quand même, puisque nous évoquons l’autothune ou le vocoder, que la groupe aurait pu masquer des approximations de chant (sur le même We are (what VR), ou sur Gravité zéro) en les utilisant. Death by selfie démontre donc une rigueur artistique qu’on peut presque qualifier d’incorruptible à ce niveau-là.
Le côté pop s’exprime donc par une belle recherche mélodique qui n’est pas écrasée par les apports électro. Au contraire, les deux se complètent de façon efficace, renforçant des effets, contournant certains aspects téléphonés. Bref, bien joué sur ce coup puisque les bonnes surprises pleuvent, au contraire d’une lassitude qui ne pointe jamais le bout de son nez (ce qui, bien souvent, est le cas des musiques électro qui peuvent être particulièrement redondantes).
Vers l’infini et au-delà !
Ce mini album de 6 titres s’avère donc être une belle découverte, avec un réel parti pris, dégageant, même si aucun titre ne se ressemble, une unité de ton solide. C’est un peu comme si nous lisions un recueil de nouvelles fantastiques d’un même auteur. Chaque texte serait différent dans son fond, mais l’écriture reste la même, on reconnaît la patte de l’auteur. Il en est de même dans Réalité augmentée.
Ainsi, nous parcourons cette histoire, perdons parfois nos repères spatiaux, et émotionnels, pour nous laisser embarquer dans ce monde pas tout à fait réel, pas tout à fait irréel, le tout dégageant, nous le répétons, une aura intimiste qui fait que nous nous identifions à ce qui est ici conté. Ce qui n’est pas négligeable. Bref, Réalité augmentée est une chouette découverte.
Nous retrouver sur FB, instagram, twitter
On pense à Brise lame