GIZELLE SMITH, Revealing, le feu sacré de la soul
Nouvel album disponible chez Jalapeno records.
Nous n’allons pas nous perdre dans des méandres incompréhensibles pour vous parler de Revealing, de Gizelle Smith. Il est simplement un album d’une très grande richesse, porté par une voix magique et des arrangements superbes, de quoi continuer à alimenter le brasier soul de la plus efficace des manières.
En effet, cet album est une pure réussite. Soul, certes, mais incluant aussi pas mal d’éléments rock dans sa musique pour la transcender et la rendre attractive au-delà des fans de la musique de l’âme. Moderne, inspirée, mais également respectueuse des aîné(e)s, Gizelle Smith nous fait une impression dont le moins que nous puissions dire est qu’elle est monstrueuse.
Pas une débutante.
Cette chanteuse, dont nous vous avouons que nous ignorions jusqu’à l’existence, n’est pourtant pas une débutante puisqu’elle arpente les scènes depuis une dizaine d’années. Revealing est son 3 LP et nous la révèle dans toute la force de sa générosité. Le terme n’est pas usurpé car nous sentons que la chanteuse nous donne ici tout ce que son cœur renferme, sans fausse pudeur, sans exhibitionnisme pour autant.
Autant le dire tout de suite, nous ne ressortons pas indemne de l’énergie déployée sur Revealing. Cette énergie n’est pas de celle qui se traduit par une férocité quelconque, ni par une débauche de rythmiques toutes plus entrainantes les unes que les autres, mais par un juste milieu entre intensité vocale, science du groove, alternance de climats et surtout sincérité dans l’expression de ce que la chanteuse délivre.
Nous dépassons ici le simple contexte de la soul, même si tout, dans la technique de chant de Gizelle Smith nous y propulse. Sa voix, chaude, puissante, caressante, expressive sans lorgner le déballage de technique, véhicule en effet ce que de grandes dames du genre (on pense à Diana Ross) dégageaient, à savoir cette chaleur inhérente au genre.
Apports pop/rock.
Mais Revealing ne reste pas cantonné à ce registre. Nous sentons que Smith a élargi son spectre musical afin de trouver dans ces nouvelles bases tout l’espace nécessaire pour aller au fond des choses. Et c’est ce qu’elle fait de façon absolument brillante. Elle s’arroge le droit de nous proposer une musique métissée, mais à même de ravir les mordus de soul, de funk, en ralliant à leur cause amateur de rock et de pop et/ou rnb. Cela ne dessert pas l’album qui reste totalement cohérent, homogène, varié. Grâce à une production incroyable, l’ensemble ne part pas dans toutes les directions malgré justement cette ouverture vers d’autres styles musicaux.
Coup de génie ? Peut-être bien, car si l’album ratisse large, on sent que cela ne répond à aucun plan marketing. Nous ne pourrions remettre l’intégrité artistique de Gizelle Smith en doute tant tout ici sert le propos de l’autrice.
Puissance émotionnelle.
Impossible de rester de marbre l’écoute de Revealing. Tout est fait pour nous impliquer émotionnellement, sans pour autant que cela ne devienne pesant ou lourd à supporter. Les titres les plus rythmés sont imparables, nous entrainent à leur suite sur la piste de danse, notamment en nous proposant des lignes de basse hallucinantes. La batterie la complète avec tact, parfois douce, parfois puissante, jouant des nuances comme la chanteuse modère son chant pour lui conférer la juste mesure de dramaturgie ou de fièvre.
Tout n’est pas que déballage de technique, puisque nous restons dans une volonté de transmettre la juste émotion, au bon moment. Le travail de production aide en cela, notamment en proposant des arrangements et des bidouilles sur la voix (elle est souvent doublée, voire triplée, donnant l’impression de choeurs alors que seule la chanteuse est présente). Ces effets sont réussis, donnent de l’ampleur au propos, sans perdre en intensité.
Les instrumentations sont analogiques, avec une mention très bien pour les claviers. Quelques effets électroniques surviennent parfois mais ne dénaturent pas la musique de Revealing qui reste toujours d’une justesse irréprochable. Une écoute au casque s’impose pour cet album. Ainsi, vous saisirez toutes les infimes nuances, forcément cruciales, qu’il renferme. En tout cas, pour nous, il s’avère déjà que Revealing est une pièce majeure de neo soul. À découvrir absolument !
LE titre de Revealing.
Pour nous, parce que nous ne nous refaisons pas, jamais, le titre de l’album est The girl who cried slow puisqu’il est sans aucun doute le morceau le plus rock des 9 présents ici. C’est aussi à notre sens le morceau où Gizelle Smith se met le plus à nu. Très peu d’effets dessus, si ce n’est en arrière-plan, comme pour lui conférer une atmosphère un peu plus sombre que sur les autres titres.
La voix est irréprochable, la musique nous évoque certains morceaux trip hop (on pense à Portishead), tout en restant baigné d’une aura rock. Les guitares y aident pour beaucoup, mais c’est l’intensité brûlante de la voix qui nous touche au cœur. Puissante, mais possédant un petit côté vulnérable, de celui de celle qui se livre entièrement, quitte à en souffrir. La structure alterne apaisement et tension, calme et tempête, et s’avère un classique instantané.