CYRIL CYRIL Certaine ruines
Le passé et le présent n’ont de cesse de s’entrecroiser, de se mélanger, de s’inventer un futur commun. Cela est vrai dans pas mal de domaines (mode, design etc…) mais c’est également très visible dans l’univers musical, qu’il soit hexagonal ou pas. Ce mélange provient d’une envie de retour aux sources, tant sur le plan des sonorités que sur l’éthique du « pourquoi faire de la musique ? » Pour changer le monde, bien évidemment, comme le pensaient les jeunes des années 60. Aujourd’hui, nous retrouvons cet esprit dans Certaine Ruines (Bongo Joe Records) de Cyril Cyril.
Ce disque est un retour à l’époque où le cynisme n’avait pas encore gagné, où l’âme des chanteurs/groupes n’avait pas capitulé au profit du profit, justement. Certes, tout le monde ne cède pas aux avances du grand capital, mais force est d’admettre que certains s’y fourvoient. Ce n’est absolument pas le cas de Cyril Cyril que nous croyons réchappé de cette époque bénie où faire une chanson avait le pouvoir de faire bouger les choses.
Cyril Cyril a-t-il été découvert dans un glacier, puis, réchauffé à l’aide de sèche-cheveux, a repris vie à notre époque ? Absolument pas. Si leur musique laisse la part belle aux tambourins, claviers vintages et aux guitares (folks, électriques avec ses sonorités si chaudes qu’elles feraient fondre la banquise, ce qui n’est absolument pas dans leurs envies, nous le sentons), bref, à tout un courant analogique digne des vertes années 60-70, il ne délaisse pas pour autant tous les bienfaits de la modernité, que nous retrouvons dans les arrangements (qui font que Certaine ruines ne sent absolument pas la naphtaline) et dans les textes, conscients, responsables, inhérents à notre présent de 2018.
Bien évidemment, nous imaginons tous ceux qui ne jurent que par les grosses batteries que ce mélange de folk/pop/rock manque de nerf et nous leur rétorquerons que là n’est pas l’important, que l’esprit véhiculé est sain, fait d’amour et de fraternité. Qu’il n’y a là aucune notion de compétition, juste un « faire ensemble » une action pour que le monde et les hommes tournent plus rond. Et puis, ils auront tort. Certaines ruines ne castagne pas, certes, mais ne manque aucunement de nerf, s’avère trippant, dansant, parce que se débarrassant de pas mal de superflu pour ne garder qu’une base essentielle, à savoir un rythme, parfois tribal, une mélodie, et le tour est joué.
Bien sûr, nous n’avons pas affaire ici à des hommes de Cro-magnon tapant sur des pierres sans aucune finesse, non ! Les morceaux sont subtils, les arrangements sont efficaces, la production est soignée, avec ce grain un peu daté de tout ce qui est analogique. Les morceaux ne se ressemblent pas, une fois que l’album est bien en tête. Des gimmicks pertinents ne cessent de traverser cet opus, et nous amènent à des réflexions d’ordre philosophique, ne serait-ce qu’une simple phrase comme : « je ne fais que passer n’est ce pas… derrière moi les ruines, devant moi les ruines »… Non, vous ne voyez pas ? Nous, nous voyons parfaitement le message.
Avec cet album, leur premier, Cyril Cyril nous fait retourner à l’époque de Siddhartha , des périples à Katmandou, au flower power avec une forme d’innocence plus que nécessaire et salvatrice.
Et finalement nous nous disons que rien n’est perdu d’avance, qu’une chanson peut effectivement changer le monde, ne serait-ce que celui que nous portons en nous.
Retrouvez la vidéo Colosse de Rhodes ICI