[EP] IOIO, Inflorescence // Comme la fleur.
Premier EP de Ioio, disponible le 12/03.
Savez-vous ce qu’est l’inflorescence ? Il s’agit de la manière dont les fleurs sont disposées sur la tige d’une plante. Autrement dit, cet EP, portant ce nom, ne s’est pas fait au hasard, et ses 7 titres ne sont pas disposés n’importe comment non plus. Ne serait-ce que le nom des titres ouvrant et refermant l’objet nous le disent : Eve at dawn, Eve at dusk (Eve à l’aurore, Eve au crépuscule). Ainsi, c’est un voyage en un peu plus de 30 minutes que nous propose Ioio, voyage en terre pop, électro, poésie aérienne et danse communicative.
Tout d’abord, les deux premiers morceaux nous font penser à un groupe dont nous vous avions parlé l’an dernier, à savoir Ultraísta. En commun, ces deux entités musicales ont en commun un travail de fond sur les sonorités électroniques et leur agencement dans les morceaux qui les renferment. Ainsi, nous ressentons, à l’écoute d’Inflorescence, l’impression de ne pas être en territoire électronique à proprement parler, mais plutôt dans un univers électro-organique. Les basses sont profondes, les sonorités de clavier possèdent du corps, presque une âme. Qu’ils soutiennent la voix ou lui donne du souffle, ils ne font qu’un avec elle.
Anglais et Français.
Le mini album ne tranche jamais entre le français et l’anglais (3 titres dans chaque langue, plus un instrumental). Et c’est très bien comme ça. Les deux premiers titres, dans la langue de Shakespeare, dégagent une attractivité magique, où la musicalité est reine, toute en courbe, en invitation à une danse sensuelle, parfois lascive parfois tribale. Les deux titres qui suivent sont en français. Les mots, caressant, dégagent un parfum d’amour, d’intimité dévoilée. Celle-ci est renforcée, notamment dans le superbe Domino Tatami, par un groove presque subliminal. La tête nous tourne, nous perdons nos repères et sombrons dans l’univers de Ioio, pour notre plus grand plaisir.
S’en suit un instrumental qui telle une vis sans fin semble ne jamais vouloir s’arrêter de nous pousser dans nos retranchements. Il est le morceau le plus électronique (et le plus long) du disque, le plus dansant, à la construction répétitive, obsédante, mais également terriblement séduisant, électrisante. Des fragments de chants, de cris, de vocalises, zèbrent cette composition, à la manière des étoiles filantes sur le fond d’un ciel noir d’été. Le côté électronique ne perd pour autant pas ses charmes organiques puisque sa pulsation semble être celle de la terre. Ici, ni Anglais, ni Français, mais l’universalité de la musique pour nous convaincre de la vacuité des mots, parfois.
De la douceur.
Ce disque dégage une intensité brûlante, mais aussi pleine de douceur. Elle transparaît des textes qui, derrière des atours dansants, dégagent un sentiment très intimiste. Comme quelqu’un qui vous chuchoterait des mots à voix basse en pleine fête, en plein brouhaha. La douceur émane des mots, du timbre de voix de Ioio, des superpositions/décalages de la voix. Les compositions, très pop, si elles nous font penser à Ultraísta, nous évoquent aussi la créativité débordante de Björk, et le caractère satiné d’une certaine nouvelle scène française (Agar Agar, L’Impératrice).
Pourtant, la personnalité de Ioio ne saurait s’arrêter à ces comparaisons. Elle possède une finesse qui n’appartient qu’à elle, un art de la composition qui fait mouche et qui ramène l’intime sur le devant des émotions, sans que cela ne soit jamais racoleur ou putassier. On aime beaucoup cette façon de faire, à la fois libérée et pleine de pudeur. Bref, rien n’a été fait par hasard dans Inflorescence, comme pour la fleur.