[EP] TRAFALGAR, Paressence // Oser le français
En totale indépendance.
Trafalgar a sorti son premier EP, Paressence, totalement en français, et en solo, mi-décembre dernier. Et c’est en totale indépendance qu’il se propose à nous, à la croisée du rock, de la chanson, de la pop. Avec ses 5 titres, Trafalgar nous décrit un univers poétique, impliqué, mélancolique, combatif, aussi.
Tout n’était pas gagné d’avance. Le premier titre de l’EP nous laisse un peu dubitatifs. Il faut dire que nous ne nous attendons pas à un tel choix artistique. En effet, la voix semble poussée dans les derniers retranchements des cordes vocales, et de son souffle. Totalement nue, elle se pose sur une musique folk, puis pop qui prend bien vite son rythme, ses couleurs. Cette esthétique globale, qui fonctionne à 100%, confirme le côté « fait seul à la maison » de Trafalgar. Ne pas nous faire dire ce que nous n’avons pas dit, tout est soigné, il manque peut-être simplement, au niveau de la production, un petit plus qui donne de l’ampleur. Mais cela reste très subjectif puisque le son que nous retrouvons sur Là-haut se propage avec réussite sur le reste de l’EP et définit sa personnalité.
Ce qui nous déroute un peu plus, c’est la teneur des paroles. Là-haut s’adresse en effet au soleil, métaphore d’une relation amoureuse pour celui qui cherche sa moitié. Titre le plus axé « chanson française », jusqu’à un changement de paradigme survenant à 3 minutes 20, lui donnant une « agressivité » rock qui nous parle tout de suite plus, nous dirons simplement qu’il ne s’agit pas de notre morceau préféré de cet EP qui prend définitivement ses ailes à la fin du deuxième titre, À l’aphonie.
Une personnalité qui s’assume.
Ce titre prend la forme d’un slow qui tue, à l’ancienne, sur une base de claviers aux sonorités vintages et au choeurs « guimauve ». Néanmoins, ce morceau s’avère très réussi, nous plonge dans une nostalgie digne des booms de notre adolescence. Romantique, un peu à l’extrême, ce morceau nous transporte dans un imaginaire 60’s (sur sonorités 80’s) lors des premiers émois amoureux. Les paroles renforcent cet effet. Ce morceau, s’il déroute lui aussi un peu, s’avère vite très attachant, mais c’est à partir de Pan que l’EP se place définitivement sur orbite.
Ici, nous retrouvons notre compte sur les paroles et la musique. Et cela ne nous quittera plus jusqu’à la fin de Paressence. Nous sentons, sur les 3 morceaux, Pan, Sisyphe et Enfer, que la personnalité de Trafalgar se montre la plus forte. C’est un mélange de mélancolie romantique, porté par une voix qui dévoile sa puissance narrative, et sur lequel le musicien semble le plus à l’aise. Musicalement, sa musique se pare d’oripeaux électrorock très bien sentis. L’ampleur manquant en début d’EP semble ici s’épanouir totalement. Un peu comme si, sur les deux premiers titres, le puzzle était éclaté et qu’il trouvait sur Pan tout son sens, une unité forte entre chant/musique/production. Ce morceau est un peu magique, en tout cas, il nous fait forte impression.
Un EP qui marque.
Sisyphe confirme et entérine la donne. L’émotion dégagée par Pan se trouve magnifiée sur ce morceau à fleur de peau où Trafalgar apporte une touche de trompette qui nous fait dresser les poils sur les avant-bras. L’impression lointaine de cet instrument, comme s’il venait du fond de la salle, apporte une tension dramatique à ce titre presque hispanisant. Les lignes de chant, déjà efficaces depuis l’entame de l’EP, prouvent toute leur pertinence. Les mélodies sont saisissantes et nous montrent que l’artiste en a sous la semelle, qu’il a des choses à dire, et qu’il le fait de façon plus que convaincante.
Enfer, que vous aviez pu découvrir dans notre playlist, referme l’EP de façon une nouvelle fois romantique, avec ce choix de sonorités bien marqué. Nous sommes déçus que l’EP s’arrête déjà, tant ces 3 derniers morceaux nous placent dans un univers fort, personnel, déjouant les pronostics lancés en début de disque. Mais surtout, le talent d’écriture de Trafalgar nous laisse entrevoir des possibilités folles, de celles que nous retrouvons chez les artistes anglo-saxons capables de mettre de l’épique dans le banal. Paressence est donc une très belle promesse pour la suite du parcours de ce musicien hélas trop peu médiatisé.
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