[Autobiographie] GILLES CUZINIER, Les graviers rouges.

Les graviers rouges, de Gilles Cuzinier, aux Éditions Maïa.

Les graviers rouges de Gilles Cuzinier nous plongent dans ses souvenirs d’enfance, et dans les nôtres. L’enfance, cet âge ou la personnalité de tout homme et de toute femme se forge et pose les fondations de l’adulte qu’il ou qu’elle deviendra. Avec nostalgie, tendresse aussi, Gilles Cuzinier nous propulse dans le Montpellier de ses souvenirs avec une plume honnête.

Un passé plein de jeux.

Pourquoi utilisons-nous le terme « honnête » ? Il n’est pas ici utilisé pour évoquer sa plume en tant que telle. Elle est attractive, vivante, même si de petites imperfections la peuplent. Celles-ci sont touchantes car elles semblent avoir été écrites par l’enfant qu’était Gilles Cuzinier, ou plutôt par l’adulte retombant en enfance par le jeu de la nostalgie. Non, nous utilisons le terme honnête car l’auteur ne magnifie pas son passé, ou du moins y pose certaines balises, conscient que les souvenirs de sa petite (voire très petite) enfance sont peut-être, ou totalement, induits par les mots de son entourage.

Cet ouvrage remonte donc le fil du temps pour s’arrêter en très grande partie sur la partie précédant l’adolescence. Il y est donc principalement question de jeux d’enfants, de découverte de la vie, des premières peines, de l’acquisition de la morale. Ces écrits nous dépeignent également une société (qui a depuis bien changé), mais sans le côté réactionnaire de celui qui pense qu’avant, c’était mieux. Même si, nostalgie aidant, nous sentons poindre chez l’auteur cette petite pointe d’amertume quant aux dérives de la société,

Des rires et des pleurs.

Nous découvrons une famille dont le père, dans les premières années de l’auteur, est absent. Seul « homme » au milieu des femmes (mère et soeurs), il est chouchouté et porte une admiration sans bornes à celle qui lui a donné la vie. Lorsque son père revient d’Afrique, il doit partager sa place, perd un peu de son aura, mais ne renie pas ce sentiment profond d’amour pour sa mère. Cet amour est d’une force peu commune et perdure à l’heure actuelle (nous l’espérons). Il nous a énormément touchés en fin de livre.

Sa vie n’est pas extraordinaire, à une ou deux exceptions près, notamment celle concernant Huguette, sa sœur gravement malade. Pour le reste, il vit une vie tranquille, faite de ses expériences, de ses amitiés, que tout le monde a (ou devrait) vivre. Son but n’est pas ici de tirer des larmes faciles. Il n’est pas non plus d’enjoliver la (ou sa) vérité. L’honnêteté, encore elle, prime. Bien évidemment, le ton est parfois un peu romancé, mais cela reste discret. Cela ne permet qu’à son histoire intime de revêtir la panoplie de l’universalité de ce qu’il a vécu.

Attentif, curieux.

Le jeune Gilles (ou Gilou) possède déjà un sens aigu de l’observation, celui qui parle à l’écrivain. Des détails qui peuvent paraître anodins surgissent ici et là pour apporter du concret à son récit. Les livraisons de produits de première nécessité (le lait par exemple), les premiers souvenirs liés à l’amour ou aux émois enfantins plein de timidité, le premier chapardage qui agit sur la conscience, tout y est relaté. Le « personnage » de Gilou nous paraît étrangement sage d’ailleurs, et nous pensons que Gilles Cuzinier ne nous dit pas tout. Nous en sourions, car le but, une nouvelle fois, n’est pas de dépeindre un être humain mais ce qui façonne sa personnalité.

Nous ne sommes pas en présence d’un gamin espiègle et roublard comme Le Petit Nicolas de Sempé et Gosciny, même si, comme ce petit héros, Gilles Cuzinier, avec sa bande de copains, s’imaginait des mondes, des jeux, des défis à relever. Ces facettes multiples nous rappellent le jeune garçon que nous étions à l’époque (et nous étions très sages aussi, oui oui). Il est évident que les femmes ou jeunes filles ne s’y retrouveront pas forcément, malgré tout, cette histoire saura parvenir à les toucher par l’espèce d’aura sépia qui la nimbe.

Cette autobiographie d’un « anonyme »possède donc cette force, pleine de simplicité, qui donne au quotidien des allures d’extraordinaire !

gilles cuzinier les graviers rouges

Une autre autobiographie ? Cerrone.

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