MARIANNE DESROZIERS Fantasmagories

marianne desroziers fantasmagories

Recueil de nouvelles, Fantasmagories par Marianne Desroziers

Définition Larousse 2015 : Fantasmagorie : n.f ( du gr. Phantasma, apparition, et du fr. allégorie). 1. Spectacle matérialisant des visions fantastiques ou oniriques. 2.littér. Présence, dans une œuvre, de nombreux thèmes et motifs fantastiques propres à créer une atmosphère surnaturelle.

Le décor est planté. Nous pouvons désormais commencer la chronique du recueil Fantasmagories, contes noirs et flamboyants de Marianne Desroziers, paru aux Editions de l’abat-jour. Comme le décrit la définition du dictionnaire, nous avons ici l’occasion de découvrir 15 textes dans lesquels le surnaturel prend le pas sur le naturel. Mais est-ce aussi simple que cela ?

Naturel

Toutes ces histoires commencent comme tant d’autres. Une situation initiale, ordinaire, banale, qui petit à petit se transforme en une histoire plus extraordinaire. Cela se fait d’une façon si naturelle que nous pourrions croire cela normal, mais ce n’est pas le cas. Une petite fille qui se transforme en flaque d’eau puis se coule entre les lattes du plancher avant de s’engouffrer dans les canalisations et remonter le temps pour découvrir sa mère enfant, non, ce n’est pas normal. Cette disparition d’un jeune garçon, à l’opéra, ne l’est pas plus. Ici, la magie, souvent inquiétante, nous prend à revers, nous surprend et nous interroge.

La plume de Marianne Desroziers est ici diaboliquement efficace. Outre sa fluidité et sa capacité à nous embarquer dans un univers surréaliste combien même nous pourrions y être réfractaires, c’est les interrogations qu’elle suscite qui nous remue les tripes. Si le côté irréel est évidemment de mise, il prend ses racines dans des faits beaucoup plus rationnels.

Enfants

Dans fantasmagories, tout, ou presque, est vu au travers du prisme du regard d’enfants. Celui-ci tente d’expliquer l’inexplicable, comme la mort d’une mère suivie du suicide du père, avec toute la naïveté d’un raisonnement enfantin, plein de candeur mais jamais idiot. Oui, ce n’est forcément pas naturel tout ça, de perdre ses parents quand on est à peine adolescent. Alors avoir un pressentiment alors que son père va se pendre, ou croire voir un esprit rôder autour de sa maison, voilà qui explique cette horreur.

De la même façon, comment expliquer que nous détestons notre mère, détestons la passivité du père, et s’imaginer se transformer en flaque et remonter le temps pour se rendre compte que cette mère a elle-même eut une mère castratrice, n’est-ce pas là le moyen d’expliquer ce que nous avons entendu à demi-mot, captant ici où là les paroles d’adultes qui ne se rendaient pas compte de notre présence ?

Parce que le point fort de ces petits contes cruels, c’est bel et bien cette plume adulte qui se souvient de ce qu’un enfant peut penser. Tout lui est permis, à l’enfant, sa vie n’est pas toute tracée, il peut échapper à sa condition, devenir animal pour refuser les coups, ou bien dompter la nature islandaise s’il le désire, mais il reste un enfant, créant des univers pour échapper à une réalité sordide, ou inquiétante, surtout à la nuit tombée.

Poésie fantastique

S’il est peu question de beauté ici (du moins de la façon classique qui la définit), par le biais des fantasmagoriques imaginations de Marianne Desroziers la poésie surgit, de façon presque violente parfois, pour nous dire que tout peut arriver, que rien n’est figé. Il vaut dès lors mieux garder en nous un peu de cette part d’enfant que nous essayons pourtant de faire taire par tous les moyens possibles, sans doute parce que nous avons peur de perdre le contrôle de nos vies si nous n’arrivons pas à tout expliquer.

La magie existe pourtant, et les mots de Marianne nous le rappellent. Ne pas tout expliquer, ressentir, laisser parler nos émotions, voilà un peu de la morale de ces histoires frappantes qu’il convient de savourer en ouvrant grand notre esprit.

Parce qu’on ne sait jamais, il se pourrait bien que quelque chose de fantasmagorique nous surprenne au détour de notre chemin.

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