Sélection d’EPs : Neist Season, Jindoss, Fleur Bleu.e
Neist Season, Morning Stars
Commençons cette sélection d’EPs par la formation briochine Neist Season. Ce premier EP, écrit en solo par Kévin Bédard (aujourd’hui accompagné par un batteur), date d’il y a déjà deux ans, mais si nous vous en parlons, c’est parce que le duo sortira prochainement son nouvel opus. Ici, nous sommes en présence d’une pop nous rappelant autant Alt-J qu’une certaine vision post punk. Cette dernière se révèle par des sonorités souvent synthétiques, tandis que l’autre se concrétise par une certaine luminosité mélodique vaguement mélancolique.
L’équilibre entre analogique et numérique est simplement parfait, au point que l’on se demande s’il s’agit d’une vraie batterie ou d’une boîte à rythmes. Le chant, passé à travers divers effets nous évoque fortement le groupe britannique cité plus haut, sans pour autant le plagier. L’ambiance générale de l’EP navigue entre passages atmosphériques et empreintes plus marquées et dansantes lors des moments les plus rythmés. Composé de 5 titres, ce premier EP s’avère une excellente découverte, à la fois bien écrite et bien produite, dégageant une certaine originalité dans le fait que l’on sent une linéarité progressive dans chacun des morceaux.
Il nous tarde dès lors de découvrir le deuxième effort plus en profondeur, deuxième EP en duo cette fois-ci, dont la sortie devrait tomber en mai. Nous avons déjà eu le bonheur de découvrir la teneur de ce disque, et l’on peut vous dire que l’on en reparlera à coup sûr dans quelques semaines.
Jindoss, La cité des anges
Nous avions découvert Jindoss il y a quelques mois avec son premier EP Rendez-vous. Si celui-ci s’avérait majoritairement instrumental (la voix n’y était que murmures, répétitions, ce qui renforçait l’impact hypnotique des compositions électrorock psychédélique mis en place par l’artiste), La cité des anges développe une esthétique qui a pas mal évolué.
Nous retrouvons cette même unité sonore sur le disque, à savoir celui d’un rock électronique légèrement « acide » dont les motifs sont autant de paysages à explorer. Mais la nouveauté principale réside dans le fait que Jindoss a fait appel à des collaborateurs extérieurs pour poser textes et voix. Ainsi, elle a fait appel à votre hôte pour écrire quelques textes et poser sa voix sur 2 titres (Walk around the night et L.A). Sur Je t’imagine, elle a convié Nathalie Pillet à ce même exercice, pour un rendu à la fois vaporeux mais empli d’une sensualité bien incarnée. Enfin, c’est Jindoss elle-même qui termine l’EP avec Dreaming now.
Musicalement, la formule reste presque la même, c’est-à-dire que l’ensemble repose sur des boucles évolutives, lysergiques car noyées d’effets, mais peut-être légèrement moins psychédélique que par le passé. Les textes évoquent quant à eux une histoire de rupture, une fuite, des pensées qui se croisent, s’envolent, et d’une guérison ou d’un abandon de chacun des deux protagonistes. La route de Jindoss se trace donc petit à petit, évolue, mais garde néanmoins bien ancré en elle son esprit initial ainsi que son parti pris artistique.
Fleur Bleu.e, Stars
On retrouve les amis de Fleur Bleu.e avec ce premier EP au charme totalement vénéneux. Avec Les étoiles, qui ouvre le disque, nous nous retrouvons projetés quelque part dans une faille spatio-temporelle dans laquelle se croiserait un peu de l’esprit des années 60 de la chanson française, un soupçon de yéyé, mais également une touche de dreampop totalement années 2020. En français, ce texte nous transporte dans un univers ouaté, romantique, aux effets réussis (on a parfois l’impression de partager le rêve de la chanteuse). Cette mise en bouche, parfaitement dosée, donne inévitablement envie de découvrir la suite de ce quatre titre qui, disons-le tout de suite, ne nous fait jamais de vaines promesses.
Pyjama Princess s’avère plus dreampop mais dégage également un certain esthétisme psychédélique. En anglais, il nous transporte un peu plus dans son univers de coton. Chanté par le deuxième membre du duo, soit un homme, le titre s’avère magnétique, porté par une ligne de chant efficace et une mélodie addictive (ces deux éléments sont une constante sur l’ensemble du disque). Taste of my world et Son visage complètent la donne, en alternant toujours français et anglais. Si l’on peut sentir une légère pointe d’amertume ou de mélancolie sur Taste of my world, celle-ci sait cependant rester légère et lumineuse. L’EP ne sombre donc jamais dans l’apitoiement mais reste au contraire empreint d’une certaine positivité.
Musicalement, le duo fait des étincelles et maitrise son propos avec maestria. Aérien, mélodique, rêveur mais bien ancré dans une réalité, peut-être fantasmée, Stars nous conduit toujours un peu plus prés des étoiles. Il est en ce sens très intéressant de suivre de près la trajectoire de cette comète qui, nous l’espérons, ne sera pas éphémère dans le paysage pop/rock français tant leur musique, simplement, nous fait du bien. Le morceau de fin s’avère en ce sens d’une douceur toute particulière, d’un romantisme presque naïf qui réchauffe le cœur. Un groupe qu’on aime très fort sur Litzic.
Patrick Béguinel