chronique roman, nouvelles, récit
CLAIRE POIRSON, Le chemin des étoiles (paru aux éditions Ex Aequo)
Le chemin des étoiles, livre hybride.
C’est un bien étrange objet que ce livre de Claire Poirson. Il mêle poésie en rime, courts textes en prose, illustrations et bribes de textes théâtraux (ou du moins courts textes théâtraux). Le rendu est à la fois original, rafraichissant et très homogène, onirique et lyrique, et nous parle de l’immensité de ce sentiment que l’on nomme l’amour.
Mais quel est le rapport entre les étoiles et l’amour ? Sans doute que les amoureux se trouvent parmi des millions de personnes, comme deux étoiles scintillantes peuvent se reconnaitre dans l’immensité d’un ciel nocturne.
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Légèreté de l’âme.
Ici, tout est aérien. Oh, un aérien bien terrien, mais qui laisse place à l’infinité des perceptions des sens. Tout n’est ici que ressenti de l’autrice face à ce sentiment à la fois si simple et si complexe. Alors, Claire Poirson part en rêverie, décolle ses pieds du sol pour gravir les montagnes de quelques planètes perdues, là où la conduit finalement son cœur.
Elle tisse à travers ses textes une géographie stellaire de l’amour. Il y a l’amour fleur bleue, l’amour plus charnel, l’amour rêvé et l’amour vécu, l’amour inconditionnel, celui qui est inaccessible, bref, tous les amours se mélangent et se télescopent pour approcher une vérité que tous, enfin nous l’espérons, vivent ou vivront un jour.
Une pointe de mélancolie.
Forcément, le sentiment amoureux nous rend aussi indestructibles qu’il peut parfois nous rendre terriblement faibles. Sans forcer le trait, Claire Poirson mêle sentiment d’exaltation et sentiment plus craintif, presque triste, pour en parler. Il y a là de la pudeur, dite par des jeux de mots, par une langue habile et volatile.
Tout paraît sans gravité (terrestre, car l’amour, lui, est une chose grave qu’il convient d’aborder avec sérieux), mais tout n’est pas en apesanteur. Les tourments de l’âme se font ressentir, par le manque de l’autre, par son inaccessibilité. Mais quand les cœurs corps s’approchent se touchent se respirent, les danses des étoiles commence et ne s’arrête jamais.
Simplicité et musique des mots.
Tout apparaît simple sur Le chemin des étoiles. La voie est tracée, il suffit de la suivre, en confiance, sans se poser la moindre question. Faire le grand saut en somme, dans ce petit livre comme dans l’amour. Il faut accepter que les textes se suivent et se ressemblent sur le fond sans se ressembler sur la forme. Sensation de liberté pour celui qui lit comme pour celle qui a écrit, Le chemin des étoiles invite à se défaire des contingences terrestres, à voir plus loin que le bout d’une lunette astronomique ou que le nez fixé sur notre nombril pour tenter d’expliquer l’inexplicable qui nous lie à l’autre contre vents solaires et marées lunaires.
Il existe en ce livre quelque chose de vaste, qui recouvre tout, sans être pour autant exhaustif. Il n’est qu’un fragment personnel sur un sentiment universel. Chacun peut donc y voir un reflet de sa propre existence expérience, tout comme l’on peut y être hermétique, surtout si l’on vient de perdre sa moitié, pour quelque raison que ce soit.
Pas si spatial que nous pourrions croire.
Ce livre est finalement plus terre à terre que ce que son titre laisse suggérer. Car il n’est pas euphorique, tout comme il n’est pas mélancolique. Il ne tombe jamais dans un extrême, se contentant d’évoquer ce sentiment qui peut l’être tant il peut jouer les tortionnaires et pointer des antagonismes profonds en nous. Mais là n’est pas le propos de l’autrice.
En effet, Claire Poirson nous parle d’une évidence, d’un big-bang interne qui se déclenche lorsque l’autre capte notre regard, nous attire. Mais là non plus, ce n’est pas le coup de foudre qui est exprimé, c’est l’attirance de cet autre qui est à la fois ce que nous ne sommes pas et ce que nous désirons être, autrement cette personne qui nous complète et nous fait nous sentir un.
Aérien et gracieux, Le chemin des étoiles nous fait quitter Terre le temps de 111 pages. « J’ai fait le plus beau des rêves. Je me suis réveillée ; tu dormais à mes côtés. »