WATINE, Errances fractales (déjà disponible)

watine errances fractales
C’est un album concept que nous donne à découvrir Watine. EN 14 titres, la musicienne nous invite dans son intimité avec Errances Fractales , celle de la nostalgie lumineuse de ces petits riens qui pourtant nous sont indispensables, comme faisant partie intégrante de nous et de notre histoire.

Ici, le piano, le violon, mais aussi quelques guitares dispensant une électricité fantomatique, sont de la fête et nous proposent des vignettes d’un temps arrêté qui, jadis, fut plein de vie. Évitant le piège facile de la mélancolie lacrymale, tout comme en évitant celui d’une expérimentation absconse, Watine se livre avec une pudeur majestueuse.

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L’enregistrement.

Le premier élément surprenant, l’enregistrement, semble avoir été fait en partie « à l’air libre », dans une pièce où trône un piano à queue. On y entend le parquet qui grince, le mécanisme d’une pendule à balancier, le bruit de la circulation de l’autre côté de la fenêtre. On y entend presque la poussière se déposer, dans un léger chuintement, sur les meubles figés dans l’immobilité de la vie ayant déserté les lieux.

L’effet est saisissant, nous place dans un décor à la fois feutré, aux teintes sombres, celle des vieux intérieurs de grand-mère, mais pas inquiétantes parce que familiers. Nous pourrions presque entendre les cris du passé résonner entre les quatre murs de ce lieu inconnu que, par la grâce de sa musique, Watine nous rend instantanément intime. Ce partage d’intimité nimbe l’album d’une aura toute particulière, renforcée encore par des effets sonores nous rappelant ici une boîte à musique ancienne, là les cliquetis de vieilles machines aimées pour leur valeur sentimentale plus que leur valeur marchande.

Classique, rock, et expérimental.

L’univers déployé sur Errances fractales s’étend de la musique classique (le jeu de piano, les apparitions de violon) à l’expérimental (toutes les bidouilles sonores), en passant par le post rock (les ambiances crépusculaires notamment) ou la musique de film (l’aspect visuel de la musique). Dans un incroyable tour de passe-passe, l’artiste les lie d’une façon toute personnelle, s’y livre corps et âme et remporte notre adhésion sans aucune retenue. Les accords de pianos, ses arpèges, dégagent le côté précieux du classique, mais pas précieux prétentieux, précieux romantique, un peu à la manière d’un Chopin qui peignait des toiles avec ses touches noires et blanches.

Le côté expérimental apparaît lui par le jeu des collages, des juxtapositions d’idées, par les effets apportés aux quelques voix, parfois presque passées sous la moulinette de l’autothune, parfois simplement déclamées comme une poésie, donc légèrement théâtralisée. Le plus souvent, elles sont samplées et passées au travers de filtres « vieillissants ». Les superpositions rendent les morceaux verticaux, imposants certes mais pas impressionnant pour autant puisque s’étendant aux simples contours de cette fameuse pièce virtuelle où tout se passe.

Les errances surviennent par ces jeux de clair obscur, de fondu enchaîné entre parties « électroniques », ou du moins plus numériques, et les aspects plus organiques (voix, violon, piano, et grésillements divers). Elles surviennent également par les poussées émotionnelles qui nous submergent parfois. Des fois, nous avons le cœur lourd suite à un motif mélancolique, des fois il se fait plus léger par la grâce de deux trois arrangements plus joyeux. Même si la tonalité globale reste relativement nostalgique, nous ressentons fréquemment, tout au long du disque, l’émerveillement d’un enfant devant une première découverte.

Revoir la vidéo de Less is more (dans notre sélection musicale)

Le parfum de l’inédit.

Et cela n’a pas de prix. Nous retrouvons effectivement ce parfum d’inédit, ce sourire involontaire qui irradie sur notre visage à l’évocation d’un souvenir suggéré par une suite d’accords. Toute l’âme de Watine apparaît ici, fractalisée aux quatre vents des 7 notes qui composent la musique. Et elle entre en communion avec la nôtre, avec notre vécu, notre histoire, nos passions aussi. Si le disque possède un côté parfois sombre, c’est son côté lumineux qui ressurgit après l’écoute, puisqu’il nous transporte dans un état proche d’une légère euphorie.

Homogène, véritable voyage sensoriel, faisant naître un millier de films qui recollerait les morceaux de tout ce que nous avons vécu pour en faire un patchwork de sensations hybrides, n’en excluant aucune tout comme n’en mettant jamais l’une trop en avant, Errances Fractales est un disque qui vient du cœur pour prendre racine dans le nôtre. Ce la n’a pas de prix, si ce n’est celui de nous rendre infiniment heureux.

LE titre d’Errances Fractales

Nous choisissons Sad Lies. Parce que c’est l’un des rares morceaux où figure le chant, un spoken word en français, mêlé à un chant jazzy en anglais, et à la poésie touchante, même si un peu crépusculaire « les risques de la nuit/ sont qu’on ne voit pas les jours/ce qui ressemblait/la nuit/à de l’amour/à de l’amour/nous fûmes fulgurants objets de nos désirs/mais ton futur n’est pas présent/dans mon avenir ». Le choix de Watine de juxtaposer des univers n’ayant rien à voir l’un avec l’autre paye à 100 % et délivre un titre à la fois triste et joyeux, refermé sur lui-même et tourné vers l’extérieur. Il représente, à notre avis, assez bien la teneur de cet album inclassable et simplement beau.

Découvrir l’album sur Bandcamp (et surtout l’acquérir, y compris en format vinyle !)

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