Chronique musique

[ ALBUM ] PATRÓN, rock stoner, mais pas que.

Premier album de Patrón.

Nous pourrions rapprocher Patrón de la définition parfois galvaudée de super-groupe. Ici, en effet, nous avons vraiment affaire à un super-groupe, au propre et au figuré, dont l’identité est aussi forte que celle des individualités qui l’ont façonnées. Le frisson de plaisir qui nous parcourt l’échine en l’écoutant en est une indiscutable preuve.

Composition.

Passage incontournable lorsque nous parlons d’un super-groupe, celui de l’énumération de ses illustres membres. Patrón est avant tout le projet d’un homme, Lo, frontman du groupe Loading Data. Il s’est entouré, pour ce premier album, de pléthore d’excellents musiciens (et amis) ayant accroché avec ses démos. On retrouve donc sur l’album, les présences de Joey Castillo (Danzig, Queens of the Stone Age, The Bronx..), Nick Oliveri (Kyuss, Queens of the Stone Age, Mondo Generator), Barrett Martin (Mad Season, Screaming Trees, Tuatara…), Aurélien Barbolosi (Aston Villa), Monique St Walker (Blackbird Days) plus quelques autres.
La formule live, elle, est resserrée autour de Patrón, Aurélien Barbolosi, Rob « Bobby Yikes » Hudson et Simon Lemonnier. Vu l’effet que nous fait l’album, nous sommes impatients de découvrir la formule sur scène. Mais jusqu’à présent, on ne vous a pas dit grand-chose sur ce fameux album. Ça ne va pas tarder, nous vous précisons juste que les fameuses démos de Lo ne s’inscrivaient pas dans la démarche de son groupe, d’où sa recherche d’autres collaborateurs. Voilà, c’est fait, on y va !

 

Rock.

La tonalité de Patrón est évidemment rock (la guest list ne laisse aucun doute sur les intentions du groupe). En effet, nous avons affaire à un rock bien senti, s’approchant des standards stoner à certains moments, plus léger à d’autres, mais toujours ponctué par la voix caverneuse de Lo, indiscutablement l’un des points forts de ce disque. Elle guide le groupe sur des sentiers arides, très Américains, car nous bouffons de la poussière à chaque détour de cactus, quelque part dans l’Arizona, sans jamais sacrifier aux pouvoirs des mélodies. La musique de Patrón, dont le blues n’est jamais très loin, évoque en partie les abords du Mexique (et des desert session des Queens of the stone ages), sans sombrer dans des atours countrysants.

Nous pensons également à quelques bouges pas très loin de la Nouvelle-Orléans, ou bien encore aux abords de L.A, notamment parce que la production reste malgré tout « urbaine ». Elle est subtilement dosée, évoque un peu certaines productions des années quatre vingt dix, le clinquant en moins. Ça reste chaud, mais pas dégoulinant, et surtout jamais caricatural. Bons points. Les guitares sont très bien dosées, hargneuses quand il le faut, séduisantes également. Le groupe a également recours, de façon parcimonieuse, aux outils électroniques, ce qui le place dans une veine plutôt moderne, exploratrice, sans dénaturer son aspect rock.

Groove, séduction.

La paire rythmique fait des étincelles, en propulsant le groove sur orbite. Attention, il s’agit d’un groove ici très terrien, lourd, mais jamais pataud. Sans doute parce que la production le met en valeur par un son varié et par des tessitures originales. Mais surtout parce que les arrangements sont assez démoniaques, efficaces, et évitent une nouvelle fois la caricature. Autrement dit, le groupe reprend une formule qui marche, mais au lieu de suivre bêtement le troupeau, il n’hésite pas à s’en écarter en variant les plaisirs.

Cela nous amène à une seule conclusion, celle qui nous pousse à dire que c’est toujours épatant de voir des groupes faire du neuf avec de l’ancien, en respectant les codes mais en y apportant une touche très personnelle, moderne, qui permet également de relier divers styles musicaux, plus ou moins la même famille, pour en faire une entité distincte forte et nouvelle.

Et puis…

Bon, nous avons déjà dit que la voix de Patrón est son point fort. C’est sûr. Cette voix qui va à merveille au rock le plus lourd est un sérieux avantage. Surtout quand elle est capable de nuances, de jouer la puissance avec un coffre qui en impose tout comme la balade « épurée ». Mais sans lignes de chant digne de ce nom, vous sombrez dans le tout venant. Fort heureusement, il n’en est rien ici (mais vous l’aviez déjà deviné !).

Mais l’autre point fort, en plus des mélodies bien troussées, est celui des choeurs. Même s’ils restent évidemment derrière la voix lead, nous ne pouvons qu’apprécier leur pertinence. Parfois évocateurs de pow wow autour du feu (The maker), les choeurs sont aussi purement rock, voir légèrement « pop » par moments (quand ils doublent la voix lead en particulier). Toujours justement dosés, ils apportent une réelle dimension collective à ce super groupe. Ce qui ne peut que nous conduire à dire que ce premier album nous donne déjà envie qu’il ne reste pas sans suite !

LE titre de Patrón.

Le morceau qui ouvre l’album (Room with a view) est excellent. IL nous met directement les pieds dans le plat et annonce la couleur globale de l’album. Very Bad Boy, nous fait également forte impression, par son groove tellurique, puissant, imparable. Mais le morceau qui nous plaît le plus est Seventeen, car complètement « hors sujet ».

C’est le morceau le plus calme de l’album. Qui repose sur un certain minimalisme. Arpèges de guitare électrique, banjo, une rythmique presque chaloupée, il dénote du reste de l’album. Judicieusement placé en septième position (sur onze), il donne un second souffle à l’album qui, sans lui, se serait peut-être (un peu) répété. La voix sépulcrale de Lo couvre cette déambulation blues vaudou avec une présence dingue et inquiétante en nous narrant le parcours d’un jeune homme s’amusant un peu trop avec une arme à feu.

Patrón

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On pense à Mark Lanegan

Comments (2)

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    Quentin

    Et Alain Johannes alors ? Vous l’avez zappé ? Il produit l’album, l’enregistre dans son studio, fait venir ses amis… Bref, sans lui, pas de Patrón !

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      Patrick Beguinel

      Bonjour et merci pour le commentaire. Ca fait toujours plaisir, même si c’est pour se faire enguirlander (je plaisante). En effet, je n’a pas cité Alain Johannes qui a une influence importante sur le disque. J’aurai dû le faire car il est évident qu’il fait partie du groupe de façon indéniable. Je ne l’ai pas fait car il y a déjà un name-dropping important, cela dit un de plus dans la liste n’aurait pas aggravé l’affaire non plus. Bonne journée 🙂

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