[ EP ] PÂLE REGARD, Terrain vague (et vague à l’âme).

Sortie aujour’hui de l’EP Terrain Vague de Pâle Regard (chez Dirty Melody Records).

Il y a quelque chose d’inévitable dans Terrain Vague, le nouvel EP (le deuxième) de Pâle Regard. Inévitable car nous regardons ces vignettes dans le blanc des yeux, nous nous y perdons, comme pour mieux nous retrouver. Entre douceur et mélancolie, Pâle Regard nous propose une pop reflétant leur vague à l’âme, sans surjouer la corde sensible.

Évidence mélodique.

Le groupe nous offre donc une pop, chantée en français, aux lignes de chant affûtées par une voix féminine qui porte à bout de cordes (vocales) un spleen indéfectible. Celle-ci nous rassure par sa douceur, par sa maîtrise également. Pas de dérapages incontrôlés, tout comme il n’y a pas de manque d’inspiration. Elle se fond à merveille dans l’univers sonore du groupe, dont les instruments subissent peu ou prou le même traitement, à savoir celui d’une bedroom pop raffinée (Pâle Regard parle de Lo-Fi junk pop, ce qui n’est pas mal trouvé), légèrement voilée de reverb’. L’atmosphère y est donc souvent brumeuse, masque les contours nets pour mieux nous installer dans une ambiance particulière, où tout reste à définir.

Les claviers tissent des nappes lumineuses, contrastant avec des paroles souvent ténébreuses, appuyant, comme pour mieux l’enfoncer, une sensibilité exacerbée. Les arpèges de guitares, eux aussi « brouillardisés » dégagent une petite note spectrale, évoquant à nos souvenirs ces instants passés d’innocence perdue à tout jamais. Le tout, y compris ces rythmiques qui renforcent la donne, dégage une évidence mélodique qui nous permet de pénétrer dans l’univers de Pâle Regard avec une facilité déconcertante, intimiste et (presque) familière.

Constats des villes sans structures émotionnelles.

Un terrain vague, au cœur d’une ville, est un lieux de vie. Si des enfants ne l’investissent pas, ce sont des laissés-pour-compte qui le font. Dans un cas comme dans l’autre, la vie y est riche. Peut-être pas de la façon dont les autorités l’entendraient, mais la vie y est présente. C’est un peu le contraire de ce qu’évoque dans ses textes le quintet. Il y parle de fantômes, de ceux, anonymes, de ces villes sans âmes, où chacun court derrière le temps, derrière soi-même, derrière les amitiés, sans toutefois les trouver (ou les retrouver) toujours.

Cette vision n’est ni pessimiste, ni optimiste, elle est juste réaliste (de notre point de vue), pragmatique. Elle est un constat de nos vies toujours plus pressées. Mais, par sa musique, Pâle Regard indique un moyen de sortir de cette spirale d’effacement de l’être humain au profit de l’entité urbaine dévorante. En effet, si les paroles sombrent dans une mélancolie parfois désespérée, la musique éclaire notre chemin par des parties plus tranchantes, comme autant de rébellion, ou par des parties enjouées comme si un soleil trouait le voile de pollution obscurcissant le ciel).

Tout n’est pas perdu donc…

Un espoir, donc, subsiste, celui que ce soleil entraperçu crève une bonne foi pour toute la bulle , parfois imaginaire, que l’on bâtit autour de nos solitudes. Avec Pâle Regard, le constat est souvent amer, mais n’est jamais gravé dans le marbre. Toutes les fins sont envisageables, même les plus radieuses. Nous suivrons avec attention l’évolution de ce groupe qui nous paraît tenir là quelque chose de fort. En attendant, nous retournons à notre terrain vague pour y retrouver un peu de vie.

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Le groupe nous évoque Marble Arch

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