[ ALBUM ] NTOUMOS, Back to the roots, aux sources
Back to the roots, nouvel album de Ntoumos (déjà disponible)
Un homme, de profil, face à l’étendue de l’océan, une trompette à la main, à bout de bras. Un symbole, peut-être. Avec Back to the roots, son sixième album, Dominic Ntoumos nous propulse avec élégance, il n’y a pas d’autres mots pour le décrire, dans un univers world jazz métissé, avec une réussite insolente.
Trompette.
Forcément, lorsque nous parlons de trompette, il n’est pas facile de ne pas évoquer celui qui en est aujourd’hui l’un des plus médiatiques représentant, à savoir Ibrahim Maalouf. Et si nous n’y prenions pas garde, nous pourrions penser que Ntoumos n’en est qu’une copie, certes flamboyante, mais une copie tout de même. Pourtant, avec Back to the roots, le musicien nous prouve qu’il n’a rien d’une copie, bien au contraire.
La première chose qui nous frappe, c’est cet habile mélange de jazz, de rock et d’instruments folkloriques évoquant la Grèce et/ou les balkans. Le jazz arrive par ses sonorités de trompette, expressives, portant un feu sacré, parfois gorgé d’une sourde mélancolie. Elles sont l’instrument autour duquel s’articulent les 9 titres du disque.
Bouzoukis.
Le côté world music provient lui de l’utilisation, dans la totalité de l’album, par l’intervention d’un bouzouki (et par les thèmes mêmes des morceaux). Ses sonorités évoquent la Grèce et toute une région du monde placée entre ce pays, les terres turques et les pays du Maghreb (on pense au Maroc notamment). Il joue un rôle prépondérant dans les parties rythmiques, lance certains titres avec une efficacité « orientale » séduisante.
L’aspect world est renforcé par les parties chantées. Peu nombreuses car elles ne s’invitent que sur deux titres seulement (Vre mánges dio sti filaki et Mon ipan na min bagapo), elles nous propulsent elles aussi en Grèce. Si nous ne comprenons pas ce qu’elles racontent (nos compétences dans cette langue approchent le zéro absolu), l’impact que ces morceaux nous procurent est celui d’air de fêtes, néanmoins imprégnés d’histoire et de sens. L’émotion qui se dégage de la voix de Sotiris Papatragiannis ne nous laisse absolument pas indifférents.
Orient occident.
Mais ce qui fonctionne à merveille sur Back to the roots, c’est ce mélange entre occident et orient. Un orient pas très lointain mais habité par des aspects traditionnels forts. Nous sentons cependant qu’ils sont chargés de modernité et qu’ils s’intègrent à la perfection dans des schémas plus occidentaux, à savoir des rythmiques plus rocks. En effet, si le bouzouki et la trompette transportent dans leur sillage un peu de l’histoire des pays des balkans, la triplette guitare basse batterie, elle, est totalement orientée vers les pays anglo-saxons.
La triplette se place souvent en arrière plan, car mixée un peu en retrait. Attention, ne pas comprendre par là qu’elle est étouffée. Non, elle est juste un peu en retrait, porte le rythme sans nous détourner des atours séduisants des instruments traditionnels et de l’esprit jazz premier de l’album. Néanmoins, elle est absolument nécessaire, et haute en couleur. C’est-à-dire que, lorsque nus y prêtons plus attention, cette triplette dévoile un savoir-faire immense, notamment la batterie qui est un mélange de groove et d’efficacité martiale.
L’occident évanescent.
La basse fait également un travail remarquable, même si plus délicat à déceler. En revanche, la guitare, elle, est plus audible. Elle nous fait par moments penser à Santana (période Caravanserai) avec juste ce qu’il faut de distorsion pour accroître la tension émotionnelle. Celle-ci n’est jamais plombante. Au contraire, elle transcende l’album, le porte parfois aux frontières d’un onirisme poétique, tout comme elle ramène parfois Back to the roots sur terre, sans détours.
Mélancolie, tristesse, joie, fête se bousculent sur ce trop court disque (il ne dure que 34 minutes et des poussières) qui nous procure un indicible plaisir et qui révèle, à chaque nouvelle écoute, un peu plus de son âme. Si, comme son nom l’indique, il est synonyme de retour aux sources pour Ntoumos, il est également bien plus que cela : il est un album qui apporte énormément de plaisir et surtout une âme généreuse, pleine de tolérance et de fraternité.
LE titre de Back to the roots.
Avec son introduction évoquant les standards du jazz (on pense à Miles Davis), Annastacia développe très vite une double personnalité, voire une triple.Elle marie à la fois tradition, modernité et réinterprétation. Si, comme l’ensemble des titres de l’album, elle est issue de morceaux traditionnels datant des années 1920 à 1040, il n’y paraît rien ici.
Les guitares y sont en effet très rock, tandis que la trompette, au départ très jazz, retrouve le chemin des pays de l’est de l’Europe. Le rythme s’installe sans y paraître et déploie très vite une envergure à la fois dansante et chargée d’histoire. Cette dualité, loin d’être rebutante, nous entraîne au contraire dans une forme de lâcher prise et d’acceptation du métissage. Annastacia représente donc pour nous l’essence de ce disque, ouvert sur le monde et sur toutes les cultures.
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On pense à Ibrahim Maalouf