MÔ’TI TËI, Well dressed exite : second humming

mô'ti tëi well dressed exite : second hummingPremier album déjà disponible.

Revisiter le blues, en y incorporant ses racines noires américaines, mais également un peu de l’âme de tous les déplacés du monde, tel semble être le parti pris de Mô’Ti Tëi qui nous régale avec son premier album Well dressed exite ; second humming.

Il y a ici une guitare, inspirée, oscillant entre ses aspects folks et ses griffures électriques. Elle taille des compositions qui vont au cœur des choses, dégage des mélodies toutes droites sorties du delta du Mississipi comme elles pourraient provenir du delta du Nil. La géographie n’a pas d’importance puisque, aujourd’hui, la mondialisation a rendu obsolète toutes les frontières. Si, dans la vie de tous les jours cela ne va pas sans sérieux inconvénients, dans le cadre de la musique, nous ne pouvons que constater que ça la porte vers des rivages toujours plus colorés et enchanteurs.

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One man band.

Mô’Ti Tëi l’a bien compris. Avec un plaisir malin, il incorpore dans son blues un peu de l’âme de toutes les populations déplacées ou ayant migré. Nous sentons dans ses compositions un peu de ce mal du pays qui nous assaille tous à un moment donné de notre vie. Les racines de sa musique semblent donc arriver de quelques pays de sable, de poussière, de fleuve aussi. Un endroit où il ne fait pas forcément bon vivre, mais qui est, un peu, toujours, le nôtre.

Comme ces hobos traversant un pays d’est en ouest, muni de leur guitare, Mô’Ti Tëi n’hésite jamais à faire naître dans notre imaginaire un pays aux vastes étendues sauvages avec lesquelles notre âme, par l’amplification de la musique du rennais, se fond. Nous ressentons la terre sous nos pieds, les odeurs transportées par le vent, une misère aussi qui trouve un exutoire dans le chant, dans la joie qui irradie de la pratique de l’instrument.

Si l’auteur-compositeur-interprète (Antoine Bencharif de son vrai nom) est un habitué des seuls en scène, ce disque le voit se démultiplier. Guitare, chant, banjo, percussions, choeurs (overdubs bien souvent). Mais qu’à cela ne tienne, nous savons que le garçon saura restituer sur scène la même fièvre qui l’habite ici.

Possession.

La musique de Well dressed exite : second humming est de celle qui pénètre vos épidermes à la première écoute. Porté par une voix possédée, contenant ce qu’il faut d’âme pour venir aiguiser la vôtre, elle s’offre à nous sans résistance. Non pas qu’elle soit aguicheuse, racoleuse, c’est plutôt qu’avec une pudeur dévoilée au grand jour, Mô’Ti Têi nous indique la voie à emprunter pour se débarrasser du superflu et se concentrer sur l’essentiel, sur ce qui existe au creux de notre ventre et qui, bien trop souvent, y reste bloqué sans jamais être exposé au grand jour.

Mise à nu sublime, elle est amplifiée par une mélancolie lumineuse. Nous sentons une tension, c’est évident, mais également un esprit combatif qui refuse une quelconque fatalité. La musique ici est engagée, son dynamisme le prouve. Sans répéter les codes du blues, Mô’Ti Tëi les réinvente au contraire, en y intégrant de ses origines, de ses rencontres et découvertes, de son humanité, de son regard sur ce qui l’entoure.

Un disque solaire.

Well dressed exite : second humming n’est donc pas un disque qui laisse de marbre. Dès la première impression, visuelle, nous sentons que nous avons affaire à un disque à part. L’artwork signé Thibault Balahy est superbe, nous dit que cet album va compter, d’une façon ou d’une autre. Et il ne nous trompe pas puisque, dès Leopard’s roam, nous sommes saisis par l’incandescence du chanteur, par cette passion qui l’habite.

Celle-ci, loin de s’étioler au fur et à mesure des 8 titres de l’opus, se trouve démultipliée, modulée, explorée sous toutes ses coutures. En optant pour des titres relativement longs (la moitié des titres font plus de 5 minutes), qui prennent le temps de raconter leur histoire, Mô’Ti Tëi parvient à nuancer son propos, y apportant douceur, force, noirceur puis lumière aveuglante. Et toujours cet élément vibrant qui nous maintient captifs de l’univers du musicien.

Si la personnalité de l’artiste transparait sur chaque morceau, dans ce profond respect qui semble l’habiter à l’égard des aînés, elle sait se mettre à notre niveau, nous invitant à l’accompagner sur le chemin de terre qu’est l’existence. Dormir à la belle étoile, manger au coin du feu, se raconter la vie, ses peines, ses joies, rien de tout cela n’est vain. Avec son talent de conteur, Mô’Ti Tëi parvient à nous embarquer dans son blues, sans spleen, et à illuminer notre journée. Un disque plein de vie, superbement réalisé, qui nous donne absolument envie de suivre ce chanteur tout au long de son périple.

LE titre de Well dressed exite : second humming.

Nous avons une pensée émue à l’écoute de Travel Through Ecuador. Pourquoi ce titre et pas un autre ? Sans doute parce que nous sentons un sentiment brûlant sur une partie de l’album, transpirant à la fois de la voix et d’arrangements vibrants, nous impliquant émotionnellement (les deux premiers titres du LP sont très impactants, qu’il s’agisse de Leaopard’s roam ou Distant Madness). A contrario, Travel Trhough Ecuador termine l’album sur une forme d’apaisement, comme si le voyage touchait à sa fin, comme si le premier chapitre de l’histoire se terminait.

Possédant un petit peu de l’âme latine de cette Amérique centrale qui parfois nous fait fantasmer, le blues du rennais est on ne peut plus aérien. Les arpèges sont d’eau, la voix d’air, le chant de soleil. Il est le dernier titre de l’album et il pourrait très bien annoncer un deuxième opus plus « roots ». Peut-être aussi que ce titre est le plus optimiste de l’album, comme s’il marquait l’apaisement de son auteur. En tout cas, si l’album est si beau, c’est sans doute qu’il est bouclé comme il se doit, débutant par une énergie folle, s’achevant dans une énergie plus douce, sans pour autant perdre en cohérence. Le voyage est total et nous n’avons qu’une envie, remercier Mô’Ti Tëi pour l’odyssée.

Interview Mô’Ti Tëi !

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