MILD ORANGE, Looking for space (3e album)
Du sens.
Looking for space, chercher de l’espace, tel semble être le pari de Mild Orange, groupe néo-zélandais composé de 4 potes qui, malgré le fait d’habiter un coin paumé, réussit à convertir la planète à son indie rock, lequel n’étant pas sans nous rappeler, dans une certaine mesure, celui de The Besnard Lake.
Avec ce nouvel album, Mehrtens (chanteur, guitariste, auteur, compositeur et producteur), Josh Reid (lead guitare), Tom Kelk (basse) et Jack Ferguson (batterie) proposent leur vision d’un rock qui nous emmène très loin, face à inconnu s’étendant à perte de vue, où le vent, le sable, la mer, ou pourquoi pas des montagnes morcelant l’horizon, nous inspire une sensation d’espace sauvage, mais pas effrayant pour autant.
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Contours rassurants.
Les compositions de Mild orange nous sont presque immédiatement familières. La formation, classique, aide à nous projeter dans la musique du combo, mais sa production également. Elle possède ce côté brillant, légèrement gazeux, nous rappelant un état de rêverie, de flottement, entre l’éveil et le sommeil. Elles dégagent aussi, ces compositions, un sentiment romantique et épique, une bouffée d’optimisme qui se tapit derrière quelques mélodies nostalgiques.
Nous imaginons facilement des teintes sépia sur la plupart des titres, pourtant, tout, dans la production, semble appartenir à notre époque. Nous sommes loin d’un quelconque revival, même si l’esprit pourrait s’avérer assez proche de celui des seventies. Le groupe utilise un peu d’électronique, mais de façon légère et aléatoire, toujours censée puisqu’elle apporte une dimension supplémentaire d’âme à leur morceau.
Une invitation à se laisser bercer.
Très vite, nous nous laissons embarqué par la douceur de la voix, par celle des guitares, par ces rythmiques/pulsations qui possèdent le pouvoir de nous embarquer dans une spirale grisante, celle qui s’apparente à un état d’apesanteur. Car la musique de Mild Orange s’avère aérienne, débarrassée de toute contingence terrestre. Le cœur se fait léger, les entraves, qui d’ordinaire nous maintiennent dans un état de morosité avancé (surtout en cette période qui n’en finit plus de durer), s’évaporent.
Looking for space se fait souvent contemplatif, autant d’un espace extérieur que de celui de l’intérieur. Mais l’introspection, celle qui fait sens, se tourne non pas vers le groupe en lui-même mais vers le monde qui l’entoure.
Environnement.
Sans doute que les lieux où les garçons ont joué et enregistré leur album y sont pour quelque chose. Décors idylliques, en partie déserts de monde mais pas de vie, ils ont contribué à ce que Mild Orange se saisissent de l’isolement comme moteur. En effet, il leur a permis de se connecter avec eux-mêmes, d’une façon profonde et significative. Reid le dit lui même : « Là-bas, sur la plage, avec un enclos et cinq chevaux juste devant la fenêtre, nous pouvions faire autant de bruit que nous le souhaitions. » Et d’aller au bout de leur processus artistique.
La Nouvelle-Zélande, terre de contraste, peu habitée à l’exception de deux grosses villes (Wellington, la capitale, et Auckland), souvent magnifiée par et pour ses paysages époustouflant (volcans, glaciers, forêts, un peu à l’image de l’Islande d’une certaine manière), a nourri ce groupe depuis l’enfance, lui conférant cette sensibilité farouche, celle de ne pas tout polluer par la présence de l’homme, de garder la nature intacte.
Et c’est drôle, car c’est exactement ce que reproduit Lookin for space : la musique y est dépersonnifiée, comme si elle existait par elle-même (sans les hommes qui la jouent donc), mais nous y retrouvons une (grande) part de leur nature profonde. Loin d’être simplement des notes, cette musique-là provient de l’âme même du groupe. Et de l’espace libre qu’il laisse à la musique pour s’exprimer. Le sens est donc au rendez-vous. Tout comme le rêve, les yeux grands ouverts et le cœur sur la main.
LE titre de Looking For Space.
Pour nous, le titre Aurora possède tous les charmes nécessaires à rendre n’importe qui accroc à la musique de Mild Orange. Guitare scintillante bercée de réverb, voix aériennes, légèrement shoegaze, légèrement dream, petite rythmique « disco » qui met doucement la fièvre. Et le premier couplet n’est pas fini.
Ça monte doucement, les couches d’instruments se superposent avant d’embrayer sur un passage instrumental plein de sensualité, de groove, positivement rock dans l’âme. Le jeu de cymbale nous fait planer, avant que les voix ne reprennent (overdubs ou choeurs, dur de savoir exactement, même si nous posons une option pour la seconde hypothèse). Deuxième passage instrumental (et pas de refrain), lequel s’avère étourdissant, proche d’une certaine idée d’un psychédélisme du bout du monde.
Superbement mixé, on pense Pink Floyd, ou pense Tame Impala, le tout avec ce groove électrisant, toujours. Magnifique d’intensité sans violence, on pense à un surfeur faisant l’amour à sa vague. Sans pour autant qu’il ne s’agisse de surf rock. Subtile et sublime.
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