GEORGE SAN, EP.3 // poésie des familles
Nouvel EP de George San.
Il est des disques qui instantanément changent notre perception du banal, de l’ordinaire, ce qui du coup le rend moins banal, moins ordinaire. Tramway, premier morceau de ce 3 titres à l’équilibre parfait entre chanson française, hip-hop, poésie, rock, nous place devant le fait accompli, devant un combat gagné d’avance. En explorant la psyché de celui qui vient de découvrir un corps ami, George San (trio composé de Clément Serre, guitare/voix, Simon Sieger, tuba/synthés et Ben Dauvergne, batterie/électronique) s’inspire du mouvement réaliste pour nous décrire une scène qu’un grand nombre d’entre nous connait.
Sad day enfonce le clou, de la même façon puisqu’il évoque un jour d’anniversaire et ces personnes de l’entourage s’invitant, pour des 30 ans. « Qu’est-ce /que/j’suis con/tent ». Ainsi commence le titre, sur une mélodie en teintes mineures et voix découpée sur chaque mot, presque sur chaque syllabe. Massage cardiaque enterre l’affaire avec brio. Mais revenons sur les détails, ayant ici toute leur importance.
Singulier universel
Le premier, détail, étant le tuba. Rare, sa présence, comme le clavier, donne des sonorités de fête foraine à des morceaux ou le spleen, comme le brouillard londonien, est a coupé au couteau, sur des textes au cordeau découpés au scalpel d’un regard aiguisé. Poètes jusqu’au bout des idées, les textes sont riches et déconcertants de cette simplicité si complexe à mettre en exergue. Les scènes sont d’une limpidité confondante, nous placent dans un univers qui nous est tout de suite familier. George San parle-t-il de lui ou de nous ? Singulier universel, son propos dépasse le simple enjeu nombriliste pour parler de ce qu’on a à l’intérieur.
Sans fadeur, avec moiteur, celle des draps après les ébats, Tramway est brûlant de cette fièvre de l’amour, physique et inexplicable, bouillonnement hormonal, il nous rappelle ces corps à âmes des premières fois qui pourraient en être des uniques, on ne sait pas. Fêter ses 30 ans, appeler sa mère, voir débarquer tonton, dire « c’est cool j’m’y attendais pas c’est tout » alors que tout le monde voit que ça vous fait chier, dépressive exposition d’un jour que nous n’avons pas forcément envie de partager, parce que chaque dizaine nous rapproche un peu plus de la vacuité de celle qui vient de s’achever. Une vie qui se barre, les espoirs qui s’enfuient, foutent le camp comme les illusions, cœur qui cesse de battre, réanimation, mais foutez-moi la paix, bip.bip.bip.biiiiiiiiip.
Après la vie.
La voix est sur chaque titre posé comme un cheveu sur la soupe, implacable, et bel est le verbe. Sentences bien senties pour existence triste heureuse, tourbillon des mots que l’on ne dit pas en disant ceux qui en disent bien plus long sur ce qui se trame à l’intérieur, description sensible pleine de pudeur, l’écriture est forte. L’électricité de la guitare impose un flux nerveux, une fièvre, sur des rythmes qui pénètrent le squelette, moelle épinière en tête. Nous ressentons une force de vie dans cet EP.3, nous rappelant l’urgence de Fauve, en moins speed néanmoins. Ne pas brûler la chandelle avant de l’avoir tuée. Le déballage des maux/mots se fait moins pressé, comme pour mieux nous inviter à l’introspection nécessaire, parfois, qui permet de mieux cerner les contours de la vie.
Formidable de justesse, George San risque fort de nous hanter longtemps. Et c’est tant mieux
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